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Dans cet épais recueil dessiné à quatre mains, Aline et Robert Crumb affichent leur couple en toute impudeur. Parle-moi d’amour évoque 37 ans de vie commune sous le prisme des états d’âme. Une performance.
Robert Crumb est un sacré phénomène. Depuis le début de sa carrière, le dessinateur natif de Philadelphie prend le parti de se mettre à nu, au sens propre comme au sens figuré, dans les pages de ses bandes dessinées. A travers lui-même ou des personnages comme Fritz the cat et Mr Natural, il dresse le portrait de la société qui l’entoure. Pas vraiment politiquement correct à ses débuts dans les années 60, une époque où libération sexuelle et usage de stupéfiants font bon ménage. Robert Crumb est donc considéré par les uns comme le Pape des comics underground et par les autres comme un dangereux pervers à interner de toute urgence.
Un journal à quatre mains
Heureusement pour les premiers, il est parvenu à conserver sa liberté. Il a même réussi à entraîner sa compagne Aline Kominsky dans la création d’un fanzine sur leur vie, conçu à quatre mains, où chacun se représente. Un drôle de mélange de style dans chaque case, entre le dessin léché de Robert et celui, mal maîtrisé, d’Aline. Peu de gags ou d’anecdotes dans ce journal à périodicité aléatoire, mais plutôt des dialogues à bâtons rompus sur leur couple et les sujets, pas toujours fondamentaux, qui les préoccupent. Si je vous dis que le fascicule s’intitule Linge sale, vous cernerez mieux le propos. Le tout ne manque pourtant pas d’humour, notamment par le fait que, s’ils se chamaillent gentiment (notamment sur la judéité d’Aline et de sa famille), ils n’hésitent pas à user et abuser d’un sérieux sens de l’autodénigrement. Si je vous dis qu’à partir de 1994 le fascicule change de titre pour celui de Dégoût de soi-même, vous m’aurez compris. « Je refuse d’être inhibée… c’est mon devoir de tout dire, je dois tout déballer », lâche Aline en pleine réflexion. C’est sûr que la pudeur ne fait pas partie du vocabulaire de ces « snobs décadents », comme ils se décrivent eux-mêmes. Et les épisodes sexuels, aussi crus et naturels qu’ils soient, ne sont pas forcément plus obscènes que certains de leurs états d’âme ou de leurs (nombreuses) névroses. Mais parler avec sincérité est leur ligne de conduite. Pas sûr que cela plaise aux habitants du petit village provençal dans lequel habite le couple depuis 1995. Peu importe. Une chose dont on est sûr après avoir lu Parle-moi d’amour, c’est que ces deux « cinglés excentriques » ne peuvent pas se passer l’un de l’autre ! Et finalement, après 37 ans de vie commune, c’est peut-être cela le plus important.