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Une nouvelle fois nous retrouvons l’infatigable petit guerrier barbare de Kid Paddle empêtré dans ses aventures virtuelles tragi-comiques, et une nouvelle fois, le plaisir de lecture est au rendez-vous.
Sound of Silence a beau être déjà le sixième tome de la série Game Over, le scénario a beau être d’une simplicité confondante (suite sans continuité d’aventures drôles à raison d’une par page) et mettre systématiquement en jeu les mêmes « ressorts » tragi-comiques selon un schéma bien rôdé (découverte d’un moyen de progresser dans le jeu qui semble parfait dans un premier temps, effets avantageux dans un second temps, soudaineté des « effets secondaires » ou révélation des imprévus dans un dernier temps), le sourire spontané est toujours au rendez-vous quand arrive le dénouement.
Les points forts de la « recette » Game Over sont toujours présents :
- Réussite particulière de l’illustration de couverture.
- Un dessin par ailleurs élégant, parfaitement adapté (décors, expressions et attitudes de la princesse, du petit barbare, des monstres…).
- Une mise en scène efficace ménageant souvent un effet de surprise totale.
- Un « fonds » de gags sans cesse renouvelé.
Enfin, les premières pages d’introduction et leur séquence de dialogues savoureusement loufoques (victoire d’Horace qui arrive à la conclusion des décapsuleurs en or) offrent un plaisir supplémentaire au lecteur, en mettant en scène les héros de la série Kid Paddle.
Quelques petites choses décevantes tout de même :
- En haut de chaque page est figuré le petit barbare, malheureusement toujours dessiné dans la même pose, alors qu’il aurait pu être amusant pour le lecteur de scruter au fil des pages des modifications d’attitude et d’expression.
- Au terme de chaque séquence est dessinée une case « Game over », dont le traitement est fort inégal. La case peut en effet être particulièrement réussie, illustrant rétrospectivement le « ressort » principal du gag sous un jour nouveau et imagé (cf le coupe-ongle, p.39) comme elle peut être totalement ratée, ne faisant que répéter lourdement ce qui a fait le gag, et que le lecteur a parfaitement en mémoire sans avoir besoin d’en avoir la redite (p. 32 par exemple).
- Le coup du « bisou » final assez « faible » à mon sens, comparé à la tenue du reste de l’album.
Une lecture donc divertissante, pour petits comme pour grands, procurant plaisir simple et bon moment.
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Manga discret sur lequel je suis tombé par hasard, et qui me fait penser à une pierre précieuse à l’état brut : brillant déjà d’un bel éclat, ses facettes imparfaites comme la gangue qui l’enserre lui interdisent d’avoir la valeur qu’elle mériterait.
D’où un avis mitigé et coupé en deux, à l’image du manga :
Rapidement, la « gangue », à savoir la seconde partie, à partir de l’attaque du convoi :
un dessin et un scénario passables qui malgré quelques nuances, doivent trop à Terminator et à Matrix à mon goût (design des robots, idée guerre robots contre humains). Si le « talent » caché du robot est une surprenante révélation, le dénouement est assez facile à deviner, de même que l’enchaînement qui y aboutit. Les personnages sont caricaturaux.
Partie sans aucun intérêt.
Maintenant, la première partie, le joyau imparfaitement dégrossi, qui va de la première page jusqu’au départ définitif du robot de l’oasis :
Les points perfectibles :
- Le dessin du corps du manga qui n’est pas aussi luxueux et sophistiqué que celui de la couverture. Dommage.
- la manie qu’a la petite fille de taper sans cesse sur la tête du robot, même devenue jeune adulte (cf scène de dessin des visages sur le sol). Assez incompréhensible. On pouvait se passer du « Je tape quand je suis content » à mon avis, même si c’est mieux que le « Je vooomis quand je suis content » de Farrugia.
- Le manque de passages émouvants entre le robot et cette fille. D’ailleurs, cela se ressent avec la page des écrans verts, trouvaille ingénieuse qui permet au dessinateur de matérialiser la mémoire du robot : peu d’écrans, peu de souvenirs différents figurés.
- Les dessins de la petite fille très « manga », peut-être trop même à mon goût.
- La ratée majeure du manga : la mention en haut de la page 10, « J’ai vu 1238 couchers de soleil », qui casse radicalement toute la magie et la réussite de ces premières pages. Il fallait au contraire ne surtout pas indiquer ce repaire de durée pour renforcer l’effet de surprise lorsque le robot retourne enfin à l’épave : sans indications, le lecteur se trouvait déboussolé, incapable d’estimer le temps écoulé (2 jours, 10 mois ? 2 ans ?), et il aurait alors été complètement pétrifié en découvrant la « réalité »…
La beauté de ce manga, qui mérite qu’on le lise tout de même et qu’on ne passe pas à côté :
- Le design et le personnage du robot : tout en rondeurs avec ce que cela connote de douceur, la bonté, l’innocence, la naïveté, la bienveillance vigilante et attentionnée…
- Le dessin de couverture, superbe, qui cristallise et sublime ce manga et se suffirait à lui-même: robot aux formes chaleureuses, penché comme un être curieux et bienveillant, incarnation de la douceur protectrice et attentive de la machine qui, plutôt que d’écraser de sa titanesque force mécanique cette petite créature féérique, met au contraire un soin particulier à entourer précautionneusement de ses doigts de fer cette luciole précieuse et vulnérable.
- « La quête de l’eau ». Le dessinateur a un trait et un art de la mise en scène magistraux : sans avoir besoin du secours de l’écrit, en quelques cases au style dépouillé où seul l’essentiel est retenu, le lecteur « ressent » tout avec une incroyable force : la marche interminable, la chaleur accablante, cette détermination du robot qui va à l’eau sans se reposer et qui repart aussitôt, sensation de ce « sens de la mission » de la machine programmée, de l’aspect inébranlable et surhumain du robot, enfin, l’incompréhension, la stupeur interdite du robot quand « rien ne se passe » alors que la mission est techniquement remplie. Cette unique case où le robot verse logiquement l’eau sur l’homme possède ainsi une extraordinaire force de suggestion et d’émotion: l’eau sauve…à certaines conditions…
Le dessinateur réussit ainsi à nous mettre dans la peau du robot et à nous faire partager cette incompréhension, cette détresse finale : « j’ai tout fait, comme on me l’a dit, mais c’est l’échec. Pourquoi, pourquoi bon sang ? ».
- Les scènes de vie avec la famille de l’oasis : là encore, le dessinateur réussit à faire passer de nombreuses impressions et émotions, sans le recours à l’écrit, par les simples mises en situations: impuissance tragique du robot face à la mort, vulnérabilité de l’être humain, petits bonheurs de la vie de tous les jours, temps qui passe, et toujours, inéluctablement, l’unique et inaltérable vérité, terrifiante, qui s’impose : l’homme meurt, la machine reste, seule, riche de souvenirs sans échos et sans lendemain.
Un manga à lire comme une « Vanité », œuvre solaire et sombre à la fois, qui offre ainsi au lecteur sensible l’occasion de faire une expérience riche d’émotions, et de songer, tout simplement.
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Déterminé à retrouver un certain malfrat nommé Orland, arrive à Karelane un petit groupe, constitué d’un homme réfléchi et fine lame, d’une jeune fille impulsive et dotée d’une étrange épée, et de deux minuscules et bavards gnomes des bois.
Mais la situation de la cité dans laquelle ils commencent leurs recherches n’est pas des plus calmes: construite sur un éperon rocheux, faisant donc partie des rares endroits épargnés par le cataclysme qui a englouti sous les eaux une grande partie du continent, Karelane est devenu l’ultime refuge pour toutes les populations sinistrées ; tout juste tolérées par le Pouvoir qui voit dans leur détresse une occasion inespérée de s’enrichir et dans leur nombre une réserve inépuisable de main d’œuvre corvéable à merci pour construire une digue gigantesque de protection, ces multitudes s’entassent ainsi dans les marais insalubres qui ceignent la splendide cité et respectent craintivement l’ordre que le chef de l’armée, un nouveau venu désigné par un Pouvoir inquiet, fait régner d’une main de fer…sans tout à fait réussir à empêcher des actes isolés de rébellion et de sabotage qui secouent de plus en plus régulièrement Karelane et ses chantiers.
Révolte qui gronde, tension exacerbée et vigilance redoublée des armées de la Cité pour étouffer dans l’œuf toute velléité de soulèvement, épée magique pas très discrète qui pétrifie en glace les ennemis qu’elle transperce : rapidement, et malgré eux, nos héros qui voulaient mener une discrète enquête se retrouvent à découvert et doivent affronter, avec une aide inattendue, des situations de plus en plus critiques…
Cette bd que j’ai découvert par le plus grand des hasards est une belle réussite.
Le dessin fait un peu penser au « style Aldébaran » mais semble en être une version plus raffinée, et alors que le « style Aldébaran » se caractérise par une certaine « rigidité simple » qui s’applique à tous les éléments du dessin (animaux aux formes élémentaires et plutôt raides, visages inexpressifs ou avec une outrance sans nuance), le trait de ce tome des épées de verre se caractérise au contraire par une « finesse souple » : les animaux ont un rendu réaliste, vivant et original qui pourrait faire croire que le dessinateur n’a fait que recopier des spécimens existant réellement (cf la superbe bête de l’enfant Ilango, avec sa tête plate, ses belles moustaches, l’alliance heureuse du noir et du bleu, ou encore le bestiaire que l’on peut apercevoir sur la rampe d’accès à la porte de la Cité quand les gens tentent de fuir la montée des eaux en se réfugiant dans l’enceinte),
les corps et visages ne sont pas pétrifiés et on les « sent » vivre en dépit, parfois d’un hiératisme discret non dénué de charme,
les actions sont dessinées de manière à rendre parfaitement compte du mouvement, de la dynamique qui les animent (file des travailleurs se rendant sur le chantier, chute du bloc, fuite dans les catacombes…)
Mais c’est surtout les dessins fouillés et précis des paysages qui retiennent l’attention et font de cette BD un vrai plaisir pour les yeux :
- Les dessins d’architecture sont ainsi remarquable et l’on s’arrête facilement à contempler les nombreuses cases, comme:
celles sur la cité de Karelane (comme la première case de la p 1, ou à la p .8..), ville des hauteurs aux formes parfois surprenantes, aux verticalités à la blancheur étincelante, aux murs décorés de mascarons illustrant un riche bestiaire grimaçant et fantastique que le dessinateur prend la peine de dessiner avec détails dans les recoins et les plans les plus reculés de la perspective, aux catacombes obscures ornées de beaux reliefs, au dédale de voies, de terrasses à la Horologiom; les effets de plongée et de contre-plongée portent ces dessins ,déjà extraordinaires, à la perfection. (cf particulièrement la première case de l’album, ou la case avec la vue depuis le sommet de la rampe menant au palais).
celles sur le barrage-digue enfin, avec ses chutes d’eaux parfaitement bien « rendues », et ses murs massifs.
celles sur les appartements intérieurs…
- Le dessin de certains éléments est un autre point fort de ce tome : les armures aztéco-samouraïes (pièces d’armures et masques) surprenantes, sont magnifiques, enfin, les « arbres vivants oracles» sont d’une étrangeté saisissante et impressionnent autant le lecteur que le pauvre travailleur forcé qui passe devant eux. Pour peu d’arriver à s’immerger avec succès dans cette BD, ce passage des « arbres vivants » fait vraiment, à mon sens, vivre cette expérience de l’étrangeté radicale et effrayante que l’on peut ressentir dans la réalité en se confrontant soudainement, dans les voyages ou dans les musées, aux statues inquiétantes de civilisations perdues.
Le dessin, très bon en dépit de quelques légères imperfections tout de même (une épée magique excessivement grande, un peu trop à la manière des jeux de rôles, un rendu des pierres de la cité peu convaincant faisant penser à de trop minuscules morceaux de carrelage ou carreaux de mosaïque comparé au gigantisme de la Cité, paysages urbains parfois un peu trop au cordeau faisant sentir l’usage de la règle, dessins de la Cité trop « vides » de vie à mon goût, ne faisant pas assez « sentir » la foule, la multitude grouillante sans cesse en activité, de jour comme de nuit qu’il y a dans toute grande ville, comme ce que le dessinateur de Légendes des contrées oubliées a réussi à rendre avec le passage se déroulant dans la ville gigantesque au tout début des aventures des nains et de leur guide), sert enfin un scénario très bien élaboré.
Personnages et caractères nombreux et sans manichéisme, dialogues bien ciselés pour certains (oracles des arbres), allant toujours au but sans détours et lyrisme pénibles, actions qui s’enchaînent et s’entrecroisent sans difficulté et à la grande surprise du lecteur, péripéties surprenantes… : le scénario ne souffre d’aucun défaut majeur, et à la réflexion, peut-être devrais-je dire « ne souffre d’aucun défaut », car je n’arrive pas à trouver un seul détail qui pourrait venir nuancer l’impression positive qu’il m’a laissé.
En conséquence, une BD très agréable à ne pas rater, donc j’attends la suite avec plaisir.
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Un vieux monsieur qui consacre tout son temps et les ressources immenses de sa fortune à l’assouvissement de sa passion pour la cryptozoologie décide d’embaucher une équipe de chasseurs et de chercheurs pour partir traquer le célèbre mais insaisissable Big Foot américain.
Mais l’expédition ne se déroule pas comme prévu…
BD qui se laisse lire, mais qui ne casse pas trois palmes au canard du Loch Ness: assez quelconque (dans le sens de très neutre, sans connotation négative), ne réservant que peu de surprises et ne laissant que de rares souvenirs, donc largement dispensable, d’où ce court avis :
- L’intérêt comme le public-cible semblent assez réduit: qui en effet n’est jamais tombé sur des articles ou des dossiers consacrés aux créatures mystérieuses ? et laquelle de ces sources ne parle pas du Big foot en long en large et en travers? A l’époque où l’on peut trouver toutes les informations imaginables grâce au web, la reprise du sujet en bd est condamnée à l’anecdotique, sauf soit à trouver un scénario particulièrement original, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence, soit à tomber sur des individus n’ayant soit jamais rien lu ou s’efforçant de tout oublier avant d’ouvrir ce tome.
- On retrouve tous les « trucs » que l’on rencontre un peu partout, à savoir : un commanditaire richissime et passionné, une équipe engagée, une expédition montée, des péripéties-surprises qui rendent rapidement la situation incontrôlable et précaire, les locaux…
- Dès le début, le lecteur sait que Big Foot existe, ce qui enlève quand même pas mal de l’intérêt pour la chose.
- Une course-poursuite très rapide au final, très loin de se dérouler dans les conditions extrêmes et le paysage grandiose suggérés par la couverture.
- Une seule chose est particulièrement réussie : outre le passage avec les chercheurs d'or, le dénouement-révélation surprise de la fin : découvrir que les Big foot sont des Wookies exilés, lointains cousins par alliance de Chewbacca m’a complètement surpris… Blague à part, la fin est vraiment réussie. Mais c’est tout.
Désagréable impression que le bluff ne se limite pas à la creek. Il faudra attendre une autre bd pour renouveler un genre d’aventure sur lequel règne en maitre Hergé avec Tintin, le Tibet, et le yéti…
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Orgueil des tyrans qui ne craignent plus de défier son pouvoir et d’en faire l’éclatante démonstration , arrogance des cités prospères qui n’hésitent plus à s’affranchir de sa tutelle et à s’armer, insolence des peuples qui ne se retiennent plus de maltraiter ses émissaires qu’ils n’auraient pas même osés regarder auparavant, enfin corruption et ambitions personnelles effrontées de tous ceux qui le servent, jusque dans ses cercles les plus familiers: en cette fin de XVIeme siècle italien, le pape est seul, la sédition partout.
Et c’est au moment où l’Italie des seigneurs et des intrigants croit son impunité assurée et l’autorité universelle de l’Eglise définitivement réduite au seul espace de ses palais romains qu’une potion magique destinée au pape Jules II s’avère provoquer des « effets secondaires » non prévus: le philtre du mignon, qui était d’amour et qui devait simplement lier les cœurs, emprisonner un seul homme et abaisser un peu plus le pape et son Eglise moribonde, a en fait pour conséquences de déchaîner les haines acharnées, de libérer l’homme de pouvoir et de relever une Eglise en armes.
Et toute l’Italie de se voir alors insensiblement happée dans les guerres et les manœuvres d’un pape aux ambitions sans limite qui veut par ailleurs offrir à cette Eglise fière de sa puissance recouvrée un nouveau temple digne de sa gloire nouvelle.
Avec ce tome 2, les auteurs sont passés près du chef d’œuvre ; ce qui ne veut pas dire que le dessinateur et le scénariste en soient à égale distance : quand Théo le frôle d’un doigt, Jodorowsky le rate d’une bonne dizaine d’années lumières.
C’est d’abord l’extraordinaire qualité du dessin qui me vient à l’esprit quand je dois me souvenir de cette bd :
- Le trait,fin, est parfaitement adapté pour dessiner les plus infimes détails, ce qui nous vaut de très belles scènes en général, comme les scènes d’intérieur par exemple, le dessinateur profitant de la richesse des appartements pontificaux pour exploiter à fond les potentialités de son style : la case de la p.7 montrant l’effet du philtre d’amour sur le pape et Aldosi est ainsi particulièrement belle par le rendu jaillissant et aveuglant des rayons solaires, les détails des fresques soudainement éclairées…
- C’est aussi l’art du mouvement, le talent à représenter l’action qui frappe le lecteur:
que ce soit l’amplitude assurée et presque désinvolte du mouvement d’épée que le pape effectue d’un revers de main pour décapiter son chef de la Garde,
que ce soit la fluidité rageuse et violente des coups d’épées que le tyran de Bologne assène au Christ, rendue par le dessin raffiné des éclats et des mouvements de la lame,
ou les scènes de combats (superbe siège de Pérouse, avec l’homme se bouchant les oreilles dans le coin droit pour amortir le bruit du mortier, balancement des cartouches sur la ceinture du soldat à gauche qui court, le tout servi par une légère contre-plongée riche en impressions : proximité de la vision du siège mettant le lecteur dans le combat et non pas à distance de sécurité respectable, verticalité des murailles soulignée rendant parfaitement la difficulté de l’assaut),
que ce soit encore la scène en 3 cases de la p. 13 lorsque le lecteur voit émerger un pape nouveau trouvant dans l’intensité de son chagrin les forces obscures pour se métamorphoser en conquérant machiavélique et impitoyable (première vue de dos, pape effondré, courbé, puis évolution des points de vues, et case finale donnant l’ image d’un pape transfiguré),
le dessin « emporte » toujours le lecteur avec efficacité.
- Enfin, la mise en scène des « sentiments » est, à mon sens, le « trésor » véritable de cette bd du point de vue du dessin. J’appellerais cela les « vignettes des caractères » : représentant de près un seul personnage en pleine expression de sentiments divers et variés, ces vignettes peu nombreuses constellent le corps entier de la BD, souvent en fin de pages : p 10 « pape à l’épée », p 20 « pape écrasant la rose », p38 « pape mégalomane », p 41 « Michel-Ange sous la pluie »… A elles seules, ces vignettes pourraient presque faire une galerie de caractères à la signification plus forte que tout le reste de la BD…
Réussi, le dessin présente cependant quelques imperfections à mon sens :
- La finesse qui fait sa qualité est aussi son défaut : les scènes d’extérieur, plus vastes, plus « déployées », ne dégagent pas la même puissance que les scènes d’intérieur (flamboiement d’Aldosi p 7, atelier de Michel-ange travaillant sur son Moïse…), et le trait est à ce point fin qu’il donne l’impression de se rompre, de ne pas réussir à s’imposer (cf scène initiale du carrosse d’Aldosi, scène des carrosses sous la neige, scènes du franchissement des montagnes sous la neige par l’armée papale…).
D’où une impression parfois de cafouillage, de scènes chétives, au trait maladif.
- On peut regretter que le dessinateur n’ait pas plus exploré que cela le potentiel de son art de la « vignette » pour nous proposer une galerie plus fournie en « caractères ».
- Certaines cases sont peut-être un « cran en dessous » : j’ai ainsi eu un peu de mal à « sentir » la crainte religieuse qui saisit les armées de Bologne devant le christ et le mouvement général de génuflexion qui s’ensuit. La case ne « claque » pas assez à mon sens.
- On peut regretter que le corps de la BD n’ait pas la splendeur supérieure de l’illustration de couverture. Cela aurait été grandiose.
Mais quand on voit la qualité du scénario, on peut aussi se dire qu’il aurait été bête de dépenser sans compter un tel talent au service d’une bd condamnée à être assez mauvaise.
Le scénario est en effet particulièrement raté, au point même de faire oublier quelques points réussis, à mon sens.
- Le « sexe », que je trouve cependant bien plus discret et bien moins« agressif » que dans Borgia, n’a cependant aucune utilité dans cette BD : cf sexe ensanglanté du mignon que le pape fait gigoter devant la foule, scènes de maison close entre Machiavel et des femmes hideuses symbolisant les Etats d’Italie (le royaume de Naples, ce doit être le tas monstrueux sur lequel Machiavel monte, sans doute un clin d’œil humoristique à l’état de décharge à ciel ouvert qu’est Naples ? ^^), les scènes de pénétration entre Julio et Michel-Angelo, scène entre la papesse et le pape sur le trône…
- Les dialogues ne font pas dans l’originalité, et on ne retient aucune tirade ou dialogue qui se distingueraient par leurs mots ou le sens de la formule bien trouvés.
Certains dialogues sont ainsi très lourds en répétant par écrit des évidences que le lecteur sait déjà (cf p 16, la scène de l’escalier, quand les conspirateurs montent vers la salle des repas : « il nous a offert de l’argent et des bijoux, c’est nous les méchants, il ne sait pas que c’est nous, on est les rois de la terre, o la laaaaa »), d’autres sont comiques à force d’être ridicules ( la recette du philtre ou la cri de douleur du pape après l’assassinat « AAAAAAhh Adolsi, à la queueleuleu, AH AH AH… »…).
- Certaines idées du récit sont aussi ennuyeuses, incompréhensibles et superbement insignifiantes : la relation entre M-Ange et Jules II, le fait que le fils de l’écuyer tienne dans une aussi petite pièce-montée, le fait que les nobles aillent eux-mêmes commettre l’assassinat dans l’écurie au lieu d’employer des hommes de mains, la scène des corps dévorés par les chats et les chiens, la Garde Suisse « amas de tapettes »…
Mais il y a aussi quelques réussites qu’il serait injuste d’oublier de mentionner :
- Le thème. L’histoire de l’Italie du XVIeme siècle est une fabuleuse mine pour des scénaristes talentueux et cultivés : rapports de pouvoir entre l’Eglise et les seigneurs, rapports pouvoirs-arts, luttes et trahisons dans tous les sens, retournement d’alliances, assassinats… il y a dans cette période un excès de tout qui fait littéralement tourner la tête à tous les fans d’histoire haute en couleurs.
- Les transitions. Certains ont reproché un défaut de construction au niveau des transitions, mais pour le coup, il était impossible de faire mieux que Jodorowsky pour deux raisons : techniquement, dans l’absolu, la Bd ne peut ménager des transitions pour tout (cette critique vient ,à mon avis, d’une accoutumance à la Bd commerciale où le lecteur pris par la main n’a pas à réfléchir et à « jeter les ponts » entre les cases), dans le cas de cette Bd en particulier, vu le nombre important de « lignes » scénaristiques (politique extérieure, évènements intérieurs officiels, évènements intérieurs officieux, évènements intérieurs privés…), il faut bien « sauter » à certains moments entre chacune d’elles. Je n’ai ainsi ressenti aucune gêne de jointure, mais constaté au contraire une certaine adresse : Jodorowsky réussit à expliquer de manière rétrospective les conquêtes du Pape en faisant parler Machiavel.
Cette Bd apparaît donc comme un ratage partiel d’autant plus agaçant à constater que TOUS les ingrédients étaient à portée de mains pour donner un vrai chef d’œuvre : un dessinateur talentueux produisant un dessin sublime et parfaitement adapté, une thématique de scénario au potentiel quasi illimité (l’Eglise et le pouvoir dans le XVI eme italien).
Il aurait simplement fallu que Jodorowsky se mette sérieusement à étudier la période considérée: il aurait alors découvert que la réalité historique était suffisamment extraordinaire par elle-même pour se passer du talent bricolé du scénariste.
Une citation, pour faire « sentir » la médiocrité de la fiction Jodorowskyienne face à la richesse exubérante de la réalité historique :
Contexte : rivalité entre les candidatures à la charge papale de plusieurs factions, XIIeme siècle.
« C’est à la fin du troisième jour que les partisans de Rolando, qui détiennent une confortable majorité, décident de négliger l’engagement d’unanimité. Puisque les partisans de l’empereur espèrent l’emporter grâce à la fatigue des membres du conclave, les « Siciliens » hâtent le mouvement : forts des voix qui se sont majoritairement portées sur Bandinelli, ils s’apprêtent à poser sur ses épaules le manteau pontifical. En effet, cet acte rituel donne un caractère définitif et public à la désignation.
Les cardinaux impériaux réalisent qu’ils vont perdre la partie. Ils se déchaînent. Ottaviano se rue sur Rolando et lui arrache le manteau ; un sénateur, favorable à ce dernier, reprend de force le vêtement. La nef de Saint-Pierre est remplie de clameurs. Ottaviano produit soudain une copie du manteau rituel dont il a pris soin de se munir et qu’il a dissimulée jusqu’à présent. Dans le désordre général, il l’enfile. Mais à l’envers. Personne n’en a cure. Ottaviano, suivi de ses partisans, ouvre els portes de la basilique, se précipite devant la foule, se fait reconnaître comme pape »
p.77, Le pape et l’empereur. Georges Suffert.
Tragédie, comédie, personnages hauts en couleurs…En moins de 10 phrases, nous avons là un « concentré » d’histoires, de péripéties, de passions et d’actions qui balayent littéralement cette BD de 50 pages qui a mis plusieurs mois à s’élaborer…
En espérant qu’un scénariste talentueux saura un jour donner à cette histoire italienne l’éclat qu’elle mérite.
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C’est une impression de médiocrité d’ensemble que le lecteur pourrait retenir au sujet de ce tome :
- Médiocrité du dessin, qui se laisse bien lire dans le cadre d’une lecture très rapide, mais qui fatigue l’œil qui voudrait s’attarder sur les cases pour les contempler et non pas seulement les regarder.
- Médiocrité du scénario, qui donne de la bande vers l’insignifiant : scène d’ouverture dans l’auberge assez pénible par ses dialogues qui se veulent comiques, Bonnie (anglicisation contractée pour « bonnie de soutien-gorge » ?) qui a seulement pour elle d’être un canon, Killing Owie qui campe le balèze exotique-et-déconneur-qui-est-drôle ; évidemment il y a une carte illisible, des aventures qui s’enchainent à la manière de WoW (« pour trouver l’amulette, va tuer Croustibat le terrible monstre de la montagne»…)…Mahalia a un gros problème avec l’esclavage, ce qui nous vaut deux pages de bains et de réflexions dont on se fout un peu, le monstre se fait tuer d’un coup…
Il ne faut cependant pas passer sous silence les quelques extraordinaires réussites de cet album qui, quoique trop rares pour sauver le Pavillon du naufrage partiel, n’en sont pas moins très encourageantes pour le second tome à venir :
- Le dialogue vif et court de la première confrontation entre Mahalia et son grand-père est ainsi excellent par l’effet complet de surprise qu’il provoque chez le lecteur comme chez la fille, tous deux décontenancés par ce vieillard qui a l’air d’en savoir déjà beaucoup… « Comment connais-tu mon nom ? Et toi mon adresse ? ».
- Et surtout, la scène finale de l’île de pierre surgissant au milieu de la brume des marais. Une splendeur !
Le lecteur qui s’était habitué depuis des dizaines de pages à une bd à moitié coulée tant au niveau du dessin que du scénario assiste ,ébahi, à une démonstration aussi soudaine qu’éclatante du talent du dessinateur : en seulement deux pages qui pourraient tout à fait rivaliser avec les meilleures de Long John Silver voire même leur servir de modèle, le dessinateur fait « sentir », avec un talent et une subtilité qui confinent au génie, l’apparition et la solidification de l’île, grâce au seul détail de la lune : le cercle de l’astre passe ainsi à travers le mirage vaporeux de l’île avant de disparaitre pour partie derrière sa solidification.
Sublimant l’atmosphère de la « scène du seuil de la porte » de la BD Sanctuaire ou l’ambiance du tableau L’île des morts d’Arnold Böcklin, les dessins de l’île, aux formes insolites et intrigantes, et celui des portes monumentales sont enfin tout simplement sublimes.
En conclusion, un premier tome particulièrement médiocre, mais un potentiel considérable qui affleure encore trop accidentellement, et qui doit encore se chercher, entre humour décalé à la Lanfeust et noirceur fantastique à la Long John Silver.
Il faudra donc scruter avec attention la sortie du second tome, qui pourrait être une très belle surprise.
En espérant, enfin, que le dessinateur saura donner à la couverture une identité graphique et thématique bien plus affirmée que pour le tome 1, dont l’illustration est clairement passe-partout, sans parler du sous-titre, sans rapport véritable avec le contenu.
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Sous le règne de Trajan, un bouclier « de Mars », à la puissance réputée prémonitoire pour devoir par sa chute prévenir Rome des périls les plus graves, tombe, en pleine réception de délégations étrangères, aux pieds de l’ambassadeur impérial Parthe. Accident, machination ou signe des dieux ? Lorsque l’Empire tourne son regard et toute sa puissance vers les lointaines marches germaniques, une attaque des Parthes à l’autre bout du monde serait une catastrophe…
Au même moment, un brillant officier romain ayant toute la confiance de l’empereur et par ailleurs témoin de l’affaire du bouclier arrive dans la province de Syrie pour reprendre fermement en mains la place-forte de Zeugma accrochée aux rives de l’Euphrate, frontière naturelle avec l’empire Parthe.
Le trait surprend le lecteur, jusqu’à pouvoir le dérouter. Le dessin n’offre pas une ambiance fourmillante de détails mais se caractérise au contraire par une sobriété naïve. Paysages urbains, d’intérieurs (comme les salles palatiales du Palatin ou de Zeugma), d’extérieurs (comme les scènes se déroulant dans les campagnes de la province de Syrie), c’est un monde antique dépouillé qui se révèle, monde de formes plus que de détails : les ponts sont identifiables par leurs arches seulement, les fortifications par leurs crénelages…
La couleur semble être à l’origine de cet effet « BD pour enfant », car le dessin au crayon qui orne l’angle supérieur de la préface de Convard montre un rendu beaucoup plus farouche et moins naïf.
Une fois ce parti-pris esthétique accepté, la BD se laisse bien lire, mais rares sont les cases à se distinguer particulièrement : celle montrant l’incendie de Rome, superbement ratée grâce à ses flammes du premier plan qu’on pense être des algues marines, celle montrant simplement la cape de Charax au détour d’une rue portant le bouclier, sublime pour cette « absence » du héros qui, paradoxalement, fait parfaitement sentir la rapidité et les détours compliqués de la marche du héros dans la complexité urbaine de la Ville éternelle.
Le scénario, comme le dessin, se laisse lire, bien qu’ennuyeux par moments.
- D’emblée, une pointe d’agacement: la succession du résumé à l’arrière, de la préface superbement inutile de Convard et des deux premières pages d’ouverture de la BD proprement dite font de cette oeuvre un redoutable test pour évaluer la présence et l’étendue de la maladie d’alzheimer. Le lecteur doit en effet s’alarmer et se précipiter chez son médecin de famille si au bout de ces trois/quatre fois successives, il ne sait toujours pas que le bouclier de Mars indique l’imminence d’un péril grave pesant sur le destin de Rome…
- La péripétie du bouclier relève du merveilleux le plus authentique : non content de tomber au bas du mur à la balustrade duquel il était accroché, il va jusqu’à se déplacer sur ses petites jambes pour indiquer clairement l’ennemi, louvoyant gracieusement sur 10 bons mètres avant de tomber, non pas devant l’ambassadeur Parthe lui-même (visiblement, le bouclier magique sait se déplacer, pas monter les gradins de l’estrade), mais au pied d’un autre ambassadeur/ membre de l’ambassade Parthe ?? De plus, personne ne se pose la question de savoir si le bouclier qui tombe est le vrai ou l’une des onze autres copies…
- La scène de l’esclave de la Régia a un début assez lourd, la faute au discours trop explicatif de l’esclave, discours dont on ne comprend pas trop l’utilité: « bonjour, je m’appelle Servius, je suis chauve, j’aime les frites, je suis préposé à ce temple depuis X générations, il y a de l’humidité, je pense acheter une gazinière… ».
- La scène de colère de l’ambassadeur Parthe contre l’empereur himself. Qui peut se permettre de se mettre en colère en lançant un bouclier sur un empereur, puis repartir tranquillement sans se faire décalquer contre le mur dans la seconde ? La logique de la scène vaut d’être résumée : 1) l’ambassadeur Parthe annonce clairement qu’il va revenir à Rome pour tout casser comme un malpoli. 2) il emprunte un bouclier mal tenu par un soldat en goguette, et le lance sur le trône et la personne de l’empereur. 3) Propos de Trajan qui visiblement a parfaitement compris la situation : « je te pardonne varham, parce que tu as toujours été un allié fidèle… ».
Cocasse.
- La scène du prophète du peuple, originale: un loqueteux, une barbe, un bâton.
- Certains dialogues. Entre les références à la culture romaine et le cadre oriental dans lequel se déroule une bonne part de l’action et qui semble obliger le scénariste à faire dans la poésie, on obtient des dialogues pénibles: Apamée est évidemment « vibrante et sensuelle », le Parthe a le regard qui fait « courber les fauves de la montagne »…
- Rivalité classique entre le « fils de » et le gradé des classes populaires.
- La prise de la forteresse par trahison est sans aucun suspens, puisqu’on la suit pas à pas. Dommage à mon sens. Il y a avait matière à produire un effet de surprise intéressant pour destabiliser le lecteur.
Mais ces points plutôt négatifs ne doivent pas éclipser les réussites :
- On évite l’histoire « femme richissime et désoeuvrée. STOP. Recherche réconfort physique. STOP. Bras musculeux de légionnaire préférés. STOP »
- La rivalité n’est pas figée dans un radicalisme excessif, et le scénariste sait montrer l’union des forces quand un péril commun menace.
- Le suspens est bien parfois bien amené et entretenu. Chaillet sait ainsi éviter des ornières scénaristiques du genre et réussit efficacement à tromper le lecteur en faisant semblant de prendre à son compte, pour mieux les éviter, des péripéties à ce point classiques qu’on croit deviner leur dénouement par avance (pénétration de l’armée dans les gorges encaissées, harcèlement de la légendaire « flèche parthe »…).
- La fin, lourde par ses dialogues encore une fois, est cependant réussie, le lecteur ne comprenant absolument pas quelles sont les forces à l’œuvre dans une « affaire » qui semble devoir s’étendre aux dimensions de l’Empire tout entier.
Une BD classique donc, avec ses défauts et ses réussites, qui se laisse lire.
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Type d'oeuvre: B(aise) D(essinée).
Résumé: l'apocalypse nucléaire mondiale n'épargne qu'une française jeune et "sexy". En véritable "survitvore", elle choisit alors de se vouer à ses seuls seins pour combattre sa détresse et sa solitude, aidée d'un robot. Rapidement cependant, la machine voit son comportement s'altérer de manière inquiétante... Dès lors, qui baise qui ?
Avis:
- dessin: très beau. Ce qui permet de sauver cette bd d'une complète nullité.
-scénario: néant. Prétexte. Part en rut libre dès la seconde page. Dialogues pénibles à lire, situations et péripéties incohérentes (un robot du Crillon à l'armement et au blindage militaire, pouvant utiliser à son profit l'ensemble du pouvoir robotique mondial, l'absolue disparition de tout être humain sur toute la planète, embarquement et décollage en fusée...), dénouement au lyrisme mièvre. On sent l'application de l'auteur à réunir tous les ingrédients possibles et imaginables du "sexe en vrac" pour assurer la réputation d'une oeuvre grâce à l'effet de scandale: baise machi-nique, femme se faisant tentaculer...
Idée de départ géniale gâchée par un traitement trop fruste
Oeuvre réservée à un public facilement ébranlé.
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Monde radicalement nouveau interdisant toute orientation, voie de retour incertaine, et rencontre avec une première faune insulaire plutôt mauvaise, au réveil comme au contact : le lecteur avait laissé l’expédition Adamson dans une situation délicate.
Et les puissantes gerbes d’eau qui viennent désormais encadrer à coups redoublés le navire la font virer au positivement catastrophique : le Reich allemand possède ainsi un autre accès, l’ennemi déterminé de l’Ancien monde semble vouloir l’être aussi dans le Nouveau, le bateau est une unité de guerre, qui ,pour finir, semble avoir été expressément dépêchée pour couler l’expédition de nos amis…pourtant organisée dans le plus grand secret…
Tandis qu’en Angleterre un fermier parti chercher une vache trouve un U-Boat et la mort, qu’à Londres une porte rend nécessaire d’élargir les accès aux dimensions des canons et que des soupçons d’espionnage sont hautement ignorés, dans l’autre monde, Adamson et son équipe d’aventuriers doivent déployer tous leurs talents pour échapper à la traque. Mais si la ruse et la chance permettent d’éloigner la menace allemande, elles ne sont d’aucun secours contre la diminution des réserves d’eau douce ; et nos héros d’embarquer à bord de canots en direction d’une des îles de l’archipel, déterminés à se ravitailler, quitte à traverser la cité qui s’étend devant eux…
Indéniablement, le scénario constitue l’élément le plus solide de ce tome 3, en dépit de quelques rares imperfections :
S’agissant des aventures dans l’autre monde tout d’abord, le lecteur voit sans surprise mais sans ennui le scénariste réutiliser tous les archétypes du genre « aventure maritime en contrées étrangères » présents par exemple dans Barbe-Rouge : apparition du « navire ennemi impitoyable » se livrant à une traque impitoyable fort d’une supériorité à première vue évidente (blindage, portée de l’armement), recours des héros à l’astuce pour compenser le déséquilibre apparent des forces (il faut saluer à ce propos l’ingéniosité du scénariste, qui laisse le lecteur plonger dans le même état d’attente perplexe que le reste de l’équipage, entre le moment où le pilote sans en dire plus réclame d’arrimer une torpille à l’avion jusqu’au dénouement inattendu), mise à profit du relief pour se faufiler, urgence de l’aiguade avec nécessité de débarquer et affronter de nouvelles aventures, apparition de la cité abandonnée.
Les dialogues sont enfin très agréables à lire, bien écrits, mettant en valeur chaque individualité, chaque caractère de l’équipage, toujours nécessaires sans être fastidieux.
Si certains effets sont particulièrement efficaces (cf les deux premières pages : le navire en pleine première page fait croire que la scène se déroule sur terre puisque le navire d’Adamson est normalement le seul présent dans le nouveau monde, d’où, à la seconde page, le désespoir joyeux du lecteur : « Un navire de guerre là-bas…là…. ça sent le sapin, comment vont-ils s’en sortir ? » ), certains semblent un peu ratés :
- Saut du monstre marin. Le fait de le voir avant son saut enlève à mon sens tout effet de surprise et de danger invisible mais omniprésent que pouvait exprimer l’irruption de la bête. Voir, comme l’équipage, la bête sauter, sans signes annonciateurs, « comme ça », aurait sans doute été plus « impressionnant ».
- Navire qui se faufile dans le passage de la falaise : l’épisode est trop court, et si la manoeuvre est certainement risquée du fait de la faible largeur, de la longueur considérable, des écueils à frôler, on ne le ressent à aucun moment, ce qui est dommage : la scène mythique du « franchissement » se réduit à la rapidité banale d’un passage de tourniquet de métro.
S’agissant des aventures dans « notre » monde, le scénario est tout aussi agréable. A côté de certaines situations archétypales parfaitement bien traitées (le-pauvre-gars-qui-n’a-rien-demandé-à-personne-et-qui-déboule-au-beau-milieu-de-l’affaire, cinquième colonne allemande avec submersible débarquant sur la côte anglaise), d’autres passages sont plus originaux (humour sur la valeur des gentlemen de l’armée de Sa Majesté, usage original des tunnels du métro, motif de la porte).
Là encore, quelques imperfections. En fait, une seule : la scène du meurtre. La case du couteau est de trop. Alors que l’effet de surprise est total pour le lecteur (puisque l’homme sur la hauteur du fermier est l’homme au briquet au pied de la falaise, et que l’on ne s’attend pas à le voir surgir, le croyant autre part), la case réservée à la lame est inutile et sans aucun effet. A voir la tête de l’homme au chapeau, et la scène surprise par le paysan, on se doute bien que l’ustensile dégainé ne va pas être une cuillère…
Une nouvelle fois, il faut souligner l’intérêt et la vivacité des dialogues.
Si le scénario est une belle réussite, le dessin est quant à lui plus critiquable.
Parfaitement adapté dans l’ensemble, il est, à mon sens, raté par endroits :
- Pleine page 8 : le navire vu de haut est une belle horreur, et ferait presque penser à une image pixélisée mais trop agrandie par rapport à sa résolution. Cela est valable pour toutes les pleines pages. La page ultime montrant la cité est ainsi illisible.
- Secousse à cause de la torpille : là encore, le dessin n’est pas adapté pour rendre l’effet de secousse, l’onde de choc qui ébranle le navire allemand. Dessiner la passerelle au lieu de la classique salle des machines est à saluer, mais l’effet n’est pas visible.
- Scène du franchissement de l’isthme : les deux ou trois cases concernées ne permettent de ressentir aucune émotion ou tension de l’équipage soudain vulnérable dans un tel défilé, de même que le dessin est difficile à lire quand les hommes, apercevant le monstre sauter, prennent les armes dans un réflexe de défense.
- Quant aux dessins de maisons anglaises, ils sont assez bizarres. Le chaînage d’angle par exemple fait vraiment « peinture approximative à gros points ».
- Certains visages ont un traitement « réaliste » qui fait « bizarre ». Cf le sous-marinier.Visage trop réel par rapport aux autres visages?
Mais ces points négatifs sont-ils cependant à reprocher au trait ou à la mise en couleur?
En conclusion, une Bd d’aventures fantastiques particulièrement divertissante, au style enlevé, riche en rebondissements, avec des héros hauts en couleurs : indispensable à lire, en dépit d’un dessin assez particulier.
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A mon avis, Gangrène fait partie de ces BD mal achevées qui, malgré un potentiel excellent et d’autant plus frustrant qu’elles le font sentir sans doute possible, pâtissent d’une qualité d’exécution trop médiocre pour tenir leur rang et devenir des références dans leurs thèmes d’inspiration.
Le scénario n'est sans doute pas à mettre en cause: à l'exception du titre dont je n'arrive toujours pas à comprendre le lien avec l'intrigue, il s’avère être la partie la plus solide de l’œuvre. Une terre future presque entièrement polluée, partagée entre une société « abritée » et une humanité « abandonnée » : alors que ce thème banal à force d’être sillonné en tous sens peut faire craindre une énième répétition de tous les topoi du genre, Trillo réussit à trouver sa propre voie et à offrir un scénario à la personnalité suffisamment forte pour se détacher de ce qui se fait par ailleurs.
S’agissant du « paysage » dans lequel s’inscrit l’action tout d’abord, il surprend, et séduit : décharge abyssale à perte de vue parsemée de Hauteurs, réseau tentaculaire et aérien de tuyaux d’évacuation des déchets, suspension par des ballons, île-station, figure-inattendue et drôle- du grand dieu blanc sont les principaux éléments qui donnent au scénario une certaine force. Les personnages et leurs relations font aussi l’objet d’un soin particulier : Trillo réussit à élaborer un univers humain complexe et convaincant, le lecteur étant incapable de deviner la nature et les conséquences de ces relations troubles où se mêlent manipulation, intérêts, bestialité forcée de la survie, amitiés, rivalités, bonté, déception et espoir mystico-religieux, préoccupations humanitaires...
La dramaturgie est enfin plutôt bien maîtrisée : sans digressions ou vides inutiles, le scénario constitue un ensemble dont toutes les parties sont essentielles. Se détournant du manichéisme facile (les pauvres pollués sont honnêtes, les riches à l’abri de toute pollution sont tous des méchants), Trillo nous fait suivre une croisade incertaine où chaque camp se voit tiraillé par des sentiments très variés : les révoltés doutent, le Chef de la Cité Blanche tente de concilier nécessité de protéger la civilisation humaine en respectant une ligne de conduite digne face à ces hommes et nécessité de survivre en écrasant par la force ces mêmes êtres.
Il revenait à Giménez de donner à cette œuvre un dessin à la hauteur du scénario. C’est un échec, dès lors que le lecteur s’attarde sur les planches pour le plaisir du dessin après une première lecture rapide et récréative qui elle est très agréable, le style flou ayant un pouvoir de suggestion extraordinaire dans ces circonstances de lecture.
D'emblée, cela commence mal: aucun rapport entre les dessins de couverture et le contenu de l'intrigue.
Et si certaines cases ou planches sont bien dessinées, comme la double planche 2 et 3, les planches 4, 7, 8, 9, 16, ou encore 28-29 qui traduit le vacillement hallucinatoire de la pensée par le chancellement des lignes droites des cadres des cases,elles sont trop rares. Le dessin s’avère trop inégal, se résumant à un vague fouillis de traits, ce qui rend toute contemplation du détail vite pénible, contrairement à certaines planches de Moebius ou encore des Eaux de Mortelune qui se situent dans cette même atmosphère de fouillis ou de paysage pollué apocalyptique.
La mise en couleur achève de rendre ce dessin assez insupportable : les mêmes couleurs sans cesse utilisées gomment toute la richesse des quelques dessins travaillés. Le lecteur passe alors sur des détails importants : l’emblème des Hauteurs derrière le trône, le trône lui-même par exemple, éléments qui pourtant sont importants pour comprendre l’histoire de ces populations grâce à la similitude avec ce qu’apporte l’Exilé.
Gangrène déçoit donc, Giménez lui ayant fait rater un succès mérité, mais reste à l'esprit pour certaines idées bien trouvées et des impressions d'ensemble qui marquent.