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La révolution au Mexique...
De retour à Chihuahua, notre anti-héros se met à la recherche de Vigo, sa « dernière carte » pour prouver sa bonne foi auprès de Grant.
Bien sûr, les choses ne se passent pas comme prévu... Blueberry est coutumier du fait. Emprisonné puis condamné à mort (décidément...), mais cette fois-ci avec ses acolytes, les éternels Mc Clure et Red Neck, c'est finalement une nouvelle révolution qui les sauve...
Toujours, Charlier fait du neuf avec du vieux... Et pourtant, c'est sûrement l'un des albums de Blueberry que je préfère, parce que la maîtrise des deux auteurs est là. Peut-être aussi parce que je retrouve certaines sensations des western spaghetti en lisant cet album : l'humour, la radicalité du scénario et de l'esthétisme, une forme d'anarchisme et même un certain lyrisme... Cathartique.
D'ailleurs, le trio central est toujours aussi désopilant. Les intrigues complexes et fouillées, tissées par Charlier, tiennent la route, avec un volte-face scénaristique permanent. Des personnages s'invitent également dans l'univers de Blueberry : Lulu Belle (encore une femme double), « El Tigre » (dont le surnom prend tout son sens en fin d'album)...
Surtout, il y a des scènes d'action d'anthologie, comme il y en avait pas eu depuis plusieurs albums : l'évasion de Vigo donne lieu à un festival de fusillades, parfois violentes, avec de terribles explosions, des coups de poker, des chevauchées frénétiques et autres cascades virevoltantes...
Certes, les dessins et l'encrage sont moins approfondis, Blueberry passant même pour un bellâtre parfois. Mais ce que les décors et les visages des personnages perdent de burinage et de hachures, ils le gagnent en clarté, en lisibilité.
Les aplats de couleur en fond, bleu ou rouge, viennent d'ailleurs souligner la tension scénaristique. C'est aussi par la couleur que Fraisic Marot fait ressortir l'aveuglement d'El Tigre pour l'or.
Au final, le coup d’État ne semble pas changer grand chose pour la population. Mais...
...permet à Blueberry de prendre un nouvel envol.
Comme une spirale...
On retrouve dans cet opus certains points forts de la série : des personnages secondaires forts, que l'on a déjà croisés ; des cavalcades épiques et autres embuscades dans les canyons ; un humour au ton moqueur, satyrique ; un découpage complexe mais dynamique...
Jean Giraud dit Gir est toujours présent à la table à dessin, quoique ses projets personnels, sous le pseudonyme de Moebius, prennent de plus en plus de place...
Le dessin reste beau et de plus en plus stylisé. Giraud délaissant parfois le pinceau pour la plume. L'impact de cette patte "Moebius" se ressent en particulier dans certaines mimiques, des gestes, des postures et dans le traitement graphique des déserts.
Les paysages arides de l'Ouest sont toujours aussi plaisants à voir, magnifiés par les couleurs : jaune éclatant le jour, rosé lors du coucher du soleil et bleu azur le soir.
Dans une narration double, Charlier met en scène Eggskull, qui remonte peu à peu, avec l'aide de son chien Baal, la trace de la « tribu fantôme », à savoir les Apaches aidés par Blueberry.
Le rythme est assez lent dans l'ensemble, s'accélérant un peu sur la fin, comme pour une enquête, un thriller.
Cette narration, singulière, permet de dépasser une sensation de déjà vu, par rapport à d'autres cycles. Adulte, elle donne de l'intérêt à l'histoire, alors que Blueberry était destiné au départ à de jeunes hommes.
Mais de toute façon, lorsque l'on est piqué de Blueberry, on est un peu comme Mc Clure et sa bibine, boisson qui habite jusqu'à ses rêves...
On y revient toujours.
La roue tourne...
Quoique condamné à être pendu haut et court, Blueberry trouve la ressource pour s'en sortir, comme toujours.
Mais il n'est pas seul. Charlier en profite effectivement pour recycler ses vieux personnages : Mc Clure, Red Neck, ou encore Chihuahua Pearl... et on ne peut que s'en réjouir.
Cette fois-ci, Blueberry est plus heureux en amour, récoltant plus de baisers que de balles.
Autrement, l'ambiance reste à peu près la même, énergique (attaque de train...), parfois grave (déportation des natifs...), mais avec toujours une pointe d'humour, de dérision.
Les dessins sont invariablement bons, quoique le découpage peut être un peu biscornu, prenant de tangentes inhabituelles... Une nouveauté du cycle.
Autre innovation, le rôle du cheval est souligné dans l'intrigue par Charlier, un lappaloosa permettant à Blueberry d'échapper aux troupes du gouvernement américain. Rien d'anormal dans un western...
En définitive, un album fort sympathique, qui compense un peu les déboires de Blueberry précédemment. Avec une fin plus heureuse pour notre protagoniste principal, se réconciliant avec les femmes et même Vittorio.
Un combat de coqs...
Un mystérieux étranger vient d'arriver dans la réserve. On devine rapidement que Nez Cassé n'est autre que Blueberry, dont l'amour pour la fille de Cochise, Chini, suscite une compétition virile avec Vittorio, un Apache au nom hispanique, qui en vient à prendre des risques insensés.
Force est de constater que le scénario a pris une tournure résolument progressiste, puisque Blueberry, devenu renégat (avec une prime de 50 000 dollars sur sa tête...), vient chercher refuge chez les Amérindiens. Les femmes ont également un rôle croissant dans la série (quoique discutable).
Ce duel reflète les divergences, au sein du camp des courageux Apaches. Sujet aux humiliations et autres violences récurrentes d'une partie des colons, des natifs veulent prendre leur revanche, repartir en guerre. C'est la tentation de Vittorio et de l'aile dure, qui tend à convaincre la majorité, émue par les exactions des Blancs. Quand d'autres, autour de Cochise et Blueberry, qui ne veut pas faire couler le sang contre ses anciens frères d'armes, souhaitent une solution plus raisonnable.
Mais, Chini se désintéresse complètement des deux gaillards... dont les exploits lui paraissent très stupides. Elle préférerait « une boîte à moudre le temps et une robe à squaw blanche », traduction littérale et imagée de la langue athapascane.
D'ailleurs, Giraud brosse son visage de la même manière que celui des femmes blanches (comparez les planches 11 et 12 par exemple) : épuré, presque sans hachures, avec des yeux tournés vers le bas, des sourcils fins, un petit nez (quoique fin pour Chini et plus rond pour Thelma) et des lèvres pulpeuses, le menton et les commissures des lèvres remontant parfois un peu selon leurs émotions. Seuls leurs habits, leur coiffure, leur maquillage et leur couleur de peau diffèrent.
Les natifs ne semblent plus que l'ombre d'eux mêmes, attirés par une culture autre et sous la pression des pionniers américains.
Les décors d'Apache-Pass, superbement dessinés, viennent accentuer la pesanteur de ce contexte. Giraud utilise toute une gamme de fines hachures, d'aplats noirs ondulants... pour affirmer les pentes saillantes du nid d'aigle, où se terrent les Apaches. Une multitude de taches noires viennent modéliser les fourrés, autour de Fort-Bowie et du trading post à proximité.
Mais, si les graphismes sont toujours plus minutieux, le scénario de ce cycle a pris un ton plus potache, souligné par les expressions des visages.
La gravité de la situation des Apaches est également atténuée par des réflexions très second degré.
Mais la tension est tangible et l'arrivée de nouveaux personnages, comme Will Bill Hicock ou l'éclaireur Eggskull et ses chiens Gog et Magog, aux consonances sacrées, semblent sonner le glas des Apaches...
En somme, l'affrontement entre Blueberry et Vittorio n'est pas seulement vain et ridicule, Blueberry ayant toujours autant de difficulté à trouver l'amour...
Il amène le désordre et le chaos, la violence et la souffrance...
...dont le mal sera bien difficile à réparer.
Il ne faut pas se fier aux apparences...
Le 22 novembre 1963, John Fitzgerald Kennedy est assassiné en pleine ville de Dallas, au Texas. Si Lee Harvey Oswald semble être celui qui a appuyé sur la gâchette, de nombreuses théories du complot, autour des commanditaires de l'assassinat, viennent enflammer les débats. Vraisemblablement, ces récits ont influencé le scénario d'Angel Face.
Sauf que là, c'est le président Ulysses S. Grant (élu président quelques années après l'assassinat de Lincoln en 1865) qui est visé, tandis que Blueberry fait office de bouc-émissaire, ce qui lui vaut un placard à 10 000 puis 20 000 dollars.
Durango, petite ville décorée aux couleurs des USA pour l'occasion, sert de cadre à l'action. De nouveaux types de personnages sont introduits et permettent quelques pirouettes scénaristiques : détectives privés, pompiers, petite vieille...
Et quelles sacrées trognes ! Entre le vieux porc de tunique bleu, le politique imbu de lui même, ou encore le shérif qui bat sa femme... Giraud sait donner vie à ses personnages, même secondaires, quitte à la reprendre au bout de quelques cases...
La figure ambivalente d'Angel Face, en particulier, est assez marquante. Cet assassin, expert dans le maniement des armes, a un visage juvénile, si épuré qu'on pourrait le confondre avec l'un des personnages féminins. Et pourtant, ses traits fins, son nez aquilin, son regard perçant, son arme de précision, sa bouteille de 'sky... trahissent sa véritable personnalité, venimeuse, relevée en fin d'album par une palette de verts.
Du reste, la mise en couleurs est assez terre à terre, hormis certains passages, soulignés par des couleurs vives, expressives. Le rouge notamment, à saturation pour le sauvetage de la vieille dame, vient accentuer la dramaturgie de l'incendie, ainsi que celle des fusillades.
Mais Angel Face est aussi une histoire de travestissement, celui du complot contre Grant, qui oblige Blueberry à changer régulièrement d'habits et de cachette. Il finit même par adopter la moustache, à la Freddy Mercury...
En résulte un western hybride, un vrai mélange de genres : à la fois thriller, avec une réelle tension narrative... mais aussi vaudeville, avec ses blagues potaches, ses caricatures et son comique de situation.
La vérité vient finalement dans le feu qui, comme pour le miroir de Dorian Grey, reflète l'âme moribonde d'Angel Face.
Dernier volume du préquel sous le pinceau de Giraud...
le « Cavalier bleu », titre assez générique, poursuit la narration des mésaventures du jeune Blueberry pendant la Guerre de sécession (1861-1865).
L'album compile un ensemble de trois histoires, qui se suivent plus ou moins, sorties auparavant dans l'édition poche du journal Pilote.
Comme pour les deux tomes précédents, le style est plus relâché que dans la série principale, que ce soit pour le scénario ou pour le dessin.
On apprend cependant deux trois choses sur notre cher Myrtille et les auteurs se permettent quelques fantaisies (flingueur dans un tonneau, vue du dessus, visages un peu caricaturaux...), mais l'ensemble reste assez consensuel.
Or, il y a aussi des redondances (la tête de Blueberry est mise à prix à 1000 dollars, comme dans le cycle de Chihuahua Pearl etc.) voir des incohérences (je pensais que Mc Clure était apparu plus tard...) avec le reste de l'univers Blueberry.
Probablement divertissant à l'époque...
...mais un peu désuet maintenant.
Suite du préquel...
intitulé « Un yankee nommé Blueberry », car notre anti-héros se retrouve coincé entre le Nord et le Sud : servant de transfuge aux tuniques bleues, il est finalement considéré comme un rebelle par ces derniers et doit se sortir de cette cagade.
Ce deuxième tome de la Jeunesse de Blueberry, succession de mini-récits, souffre des mêmes problèmes que son prédécesseur : moins ambitieux que la série mère, les planches ont été initialement réalisées pour un format plus petit et bon marché, d'où un rendu peu flatteur en album.
De plus, le dessin de Gir est assez irrégulier, les visages du jeune Blueberry ne sont pas toujours réussis, à l'image de la page 34. La mise en couleur est tout aussi critiquable.
Certes il y a des passages réussis, des surprises (retour du personnage d'Henriet, l'amour de jeunesse de Bluberry) et les auteurs s'amusent un peu avec la mise en scène (château d'eau qui s'effondre...).
Mais l'ensemble reste assez convenu, on pourrait s'en passer...
...si ce n'est que c'est avec cette BD que Jodo à découvert le travail de Gir.
Préquel de Blueberry...
en trois historiettes.
On y apprend ses origines, sudiste et esclavagiste, ses amours contrariés, son exil, ses premiers pas chez les tuniques bleues, son refus de tuer...
Ces récits éclairent les motivations de Blueberry, donnent de la profondeur et justifient la complexité du personnage.
Néanmoins, les dessins et la colorisation de cet album valent à peine les débuts de la série. Si les traits du jeune Blueberry sont assez constants, l'ensemble est assez pauvre, avec des décors réalisés à la hâte.
Le scénario est un peu puéril, bizarre même parfois, quoique certains passages prêtent à rire (travestissement).
L'ensemble reste claire et facile à lire, avec quelques effets de mise en scène bien sentis (notamment la vue subjective, qui apparaît ponctuellement depuis le Spectre aux balles d'or).
...à lire, quoique la qualité ne rivalise pas avec l’œuvre antérieure de Giraud et de Charlier.
Comme un long fleuve...
L'aventure de Blueberry continue son cours inéluctablement, sous la plume abondante de Charlier et servie par le trait régulier de Giraud. Il s'agit cette fois-ci de découvrir le trésor... celui caché par Trévor.
La qualité de la mise en scène et de la couleur sont indéniables. L'album a son lot de scènes bouillonnantes mais aussi, comme dans le Spectre aux balles d'or, des cases plus sinistres, de nuit et bleutées.
S'apprêtant à remonter la rivière du Conchos, on retrouve les personnages principaux du cycle, réunis autour de notre héros en jeans, auxquels s'ajoute Hyéronimus, un vendeur ambulant et pharmacien casse-gueule, assez marrant... sa charrette s'avère être un élément clé pour faire avancer l'histoire.
Fuyant par les méandres du Conchos, où ils manquent de se briser le cou dans les rapides. Ils sont attendus dans les roseaux de la confluence, où la rivière rejoint le Rio Grande, par les hommes de Vigo, mais aussi Kimball et Finlay, avec en prime, Bluberry ayant un contrat sur sa tête aux USA... un chasseur de prime.
La frontière, matérialisée par le fleuve, ne met finalement pas un terme à leurs soucis...
Autrement, si on revoit certains décors (notamment le rocher troué du tome 13, ici planche 13), l'ambiance de l'album diffère des précédents... Charlier jouant avec les possibilités scénaristiques, apportées notamment par les cours d'eau.
Surtout les protagonistes, loin d'être tranquilles, sont constamment sous tension. Il y a au moins autant d'action que dans le tome précédent, avec là aussi son lot de scènes épiques : la découverte du coffre et les affrontements autour de l'église, où Chihuahua est restée seule ; la poursuite avec Lopez et son destin tragique ; le périlleux passage en bac, qui part à la dérive ; des fusillades et autres affrontements au revolver...
Comme à son habitude, Charlier nous réserve un certain nombre de retournements de situation, rythmant efficacement l'ensemble.
On apprend à mieux connaître Blueberry, notamment dans sa relation avec Chihuahua Pearl. Cette dernière se comporte en garce pendant tout l'album (le mouvement féministe n'a pas encore pris d'assaut le monde de la BD) et Blueberry lui répond violemment, non sans une once de misogynie.
Car, quoique courageux et habile au combat, il reste un anti-héros de l'Ouest, un soudard maladroit avec les femmes, avec ses travers et qui subit quelques déculottées.
Si son comportement peut parfois choquer, c'est bien sa rudesse, propre au genre du Far West, et la profondeur de son personnage, qui font qu'on reste immergé, qu'on y croit.
En conclusion, ce cycle autour de Chihuaha Pearl, autre trésor gâché par Blueberry, et de la "Frontier", celle qui sépare les Mexicains des Yankees, "naturelle" et poreuse, mais aussi celle, plus abstraite, que les pionniers américains cherchent à repousser, aveuglés par leur soif d'or, démontre encore une fois les talents de Jean-Michel Charlier et de Jean Giraud.
Ils savent toujours nous tenir en haleine, nous surprendre, usant d'un environnement...
...finalement assez capricieux.
PS : au début de l'album il y a un (faux) dossier historique.
Une couverture peu évocatrice...
si ce n'est qu'on comprend qu'il y aura de l'action.
La gestation de cet album a été plus longue, pour un résultat plus convaincant, que le tome précédent.
Le scénario de Charlier, en particulier, est mieux ficelé, avec des dialogues plus incisifs. Il y a de nombreuses surprises et des retournements de situation à la pelle.
Giraud aux manettes, la mise en page tout comme la mise en couleur sont mieux maîtrisées. On retrouve cette mise en scène typique de Blueberry, capable de surpasser les western de cinéma.
En effet, l'album offre son lot de scènes fortes. Plusieurs d'entre elles sont restées gravées dans ma mémoire : les scènes de torture de Blueberry (notamment avec le bourreau chinois, assez stéréotypé), sa tentative d'évasion, le mariage forcé de Chihuahua Pearl avec Lopez (qui tranche avec la crasse ambiante), l'attaque du fort de Corvado avec un contingent d'anciens sudistes, un chariot explosif, des vaches en furie... et enfin la cachette de Trevor dans un aven.
Au final, un concentré de bravades, de fusillades, de cavalcades... en gros de la testostérone en vois-tu en voilà. Mais aussi une touche féminine avec Pearl...
...faisant ressortir un monde rude et violent, où les protagonistes rêvent de luxe et de volupté.
Un album un peu ennuyeux...
mais qui pose les bases d'un nouveau cycle.
Le lieutenant Blueberry cavale seul le long de la frontière, lorsque des soldats mexicains font irruption, poursuivant un mystérieux messager.
En découle une histoire à dormir debout, où Blueberry est missionné pour dénicher un trésor de 500 000 dollars (200 000 de plus que les soldes des travailleurs du chemin de fer, dans le cycle précédent).
Les graphismes sont dans la lignée du précédent tome. Le trait de Giraud est toujours aussi foisonnant. Il croque admirablement bien les intérieurs de Chihuahua, grouillants de culs-terreux et autres prostituées.
Cependant, la mise en couleur, à la Valérian, ne convient pas et le découpage est inconstant (successions de plans identiques sur certaines pages...). Il y a peu d'innovations, si ce n'est le retour d'un univers mexicain... donc redondant au final.
Ainsi, l'histoire est lancée sur un faux rythme, avec beaucoup de dialogues, assez plats et attendus, voir puérils par moments.
L'album regagne en intérêt dans son dernier tiers, lorsque Blueberry arrive à Chihuahua. Un personnage féminin vient alors mettre un peu de piment au scénario de Charlier...
C'est son visage qui illustre la couverture de l'album et c'est en effet elle que recherche sans le savoir Blueberry.
Le rôle de Chihuahua Pearl s'avère plus important que celui de Guffie Palmer auparavant et moins stéréotypé que celui de Miss Dickson, dans les cycles précédents. Cette femme, au double jeu, attise la curiosité.
Si elle reste cantonnée dans un rôle de femme fatale, intouchable, qui se met en scène dans un troquet sordide...
Il n'en demeure pas moins qu'on s'attache à Chihuahua Pearl, plus pour son caractère bien trempé et son aura mystérieuse, que pour ses charmes de papier...
Un regard dans le rétroviseur...
Dans ce bouquin, au titre un peu martial, Fabrice Neaud revient sur son passé, comme il l'avait fait auparavant avec les quatre tomes du Journal.
Si la couverture mystérieuse m'avait emballée, j'ai un peu déchanté en soupesant la BD dans mes mains. Je ne suis pas fan des gros spécimens... Mais je ne regrette pas de l'avoir achetée.
Déjà, on y apprend beaucoup de choses : sur l'homosexualité bien sûr, mais aussi les rapports sociaux, les tyrannies de la distance, de la géographie urbaine... ou encore sur la BD. Tout cela, Neaud nous l'enseigne de manière plus empirique que théorique, en le plaçant de manière ingénieuse dans le récit, avec force d'exemples.
Ensuite, la qualité graphique, tout de blanc et de noir, impressionne. Certes, les dessins à la plume de Fabrice Neaud n'ont pas cette instantanéité, propre à la « BD de papa ». Or, la précision du trait, sa clarté, mais aussi l'abondance des hachures, dégagent une force émotionnelle particulière. A la longue, j'ai eu comme l'impression que les personnages étaient entièrement dessinés avec des poils...
A cet esthétisme, d'une certaine puissance virile, s'ajoute un découpage rigoureux, jusqu'à réfléchir aux césures des doubles-pages... On sent dans ce détail l'intelligence artistique de l'auteur, qui mène aussi une réflexion sur son propre travail.
Les codes du langage graphique de Neaud intégrés, on peut apprécier la profondeur de son récit, d'une certaine honnêteté, avec des moments de justification, de remise en question et aussi d'auto-dérision. Sa liberté de ton fait plaisir.
Sensible, rarement une BD n'a été aussi intimiste. Sans fard (je pense au moment où meurt sa sœur notamment...) elle est même crue par moments (scènes pornographiques).
Néanmoins, Fabrice Neaud a aussi ses coups de gueule... Ses jugements, ses interprétations, sa rudesse verbale peuvent parfois choquer... j'ai eu alors un sentiment de rejet, j'ai pris du recul. Si je ne prenais que ces moments, pas sûr que j'apprécierais cette personne dans la vie réelle...
D'ailleurs, la BD n'offre pas beaucoup de place à l'interprétation : l'auteur objective ses propos constamment... le texte dicte autoritairement le déroulement du récit, celui du réel, de la vie de Neaud, quitte à pointer du doigt quelques incertitudes de sa mémoire. Les graphismes passent presque comme secondaires.
Et pourtant je m'y replonge, je m'y immerge de nouveau.
Les dessins de Neaud ne sont pas que de simples illustrations, ils transcrivent aussi ses émotions, son énergie, ses sensations, ses fantasmes, ses obsessions... Ils prennent une place centrale dans l'explication des moments les plus intenses, les parenthèses heureuses (Antoine...)... ou non (violences homophobes...).
Neaud, personnage (égo)central du récit, paraît alors plus humain. Il n'est ni un modèle ni une figure rassurante, ni même un ami voire un compagnon de voyage. C'est juste quelqu'un qui raconte sa vie, un peu merdique, mais de manière talentueuse et dans ce qu'elle a de plus touchant.
Finalement, Neaud a su retranscrire dans sa BD une forme d'amour. Rarement consommé, il passe par l'intellectualisation, le voyeurisme, l'attente, la frustration, le passage à l'action,...
Et enfin des tergiversations : est-ce un refus...
Ou une invitation ?
En voulant faire une œuvre de contre-culture...
Eric Judor, accompagné de Fabcaro, a réalisé une BD ou roman-photo.
Théoriquement, cela aurait pu être sympathique : Eric est un acteur qui fonctionne bien, idem pour Fabcaro dans la BD.
Ce roman-photo aurait pu être subversif, drôle, décalé, rendant un bel hommage à la pop culture.
La réalité est différente... Cette BD ressemble plus à un film, à la Eric et Ramzy, sans queue ni tête, dont on aurait sélectionné quelques photos et ajouté des bulles... Mais sans les voix, la synergie du duo, le comique de situation, le mouvement, le sérieux de la réalisation... fade.
Alors c'est régressif, ça c'est certain... c'est même grossier, puéril et attendu. Je n'ai pas eu de plaisir à lire cette BD. Je me suis clairement ennuyé.
Les figurants que l'on y retrouve ont fini de m'achever (Alison Wheeler, Elisabeth Quinn... non merci). Or, j'imagine que ce sont les « fan-base » de ces « comédiens » et influenceurs qui ont dû attirer les lecteurs.
Au final, on frôle l'indigestion, à cause de la lourdeur des blagues, mais aussi de la présence d'acteurs de la télé ou de youtube...
Ainsi, à faire de la transmédialité...
...On en vient parfois à produire un peu de la merde.
Les difficultés psychologiques d'une mère au foyer...
Sans surprise, Des maux à dire contient une histoire forte.
La relation fille et mère, dont les rôles en viennent à se renverser, est particulièrement émouvante.
La vie tortueuse de la maman, sa souffrance psychologique, suscite l'indignation voir l'incompréhension : comment en est-elle arrivée là ? L'ouvrage nous donnera finalement quelques éléments de réponse (traumatismes d'enfance, conditions de travail ou de vie difficiles, discriminations...), mais ce n'est pas si simple...
On peut aussi être interpellé par l'emprise des uns et des autres (les sectes sur la maman, la maman sur ses enfants...), ou encore par les réponses insuffisantes du corps médical.
Quand est-ce qu'on va se décider à soigner la maladie mentale avec dignité, à intégrer à notre société ceux qui en souffrent et non à les traiter comme des marginaux, les gavant de médicaments ?
Des progrès ont sûrement été faits depuis le XXème siècle, mais cette BD témoigne autant de la persistance de la misère psychologique, que d'une prise de conscience récente de certains citoyens (voir des médecins eux mêmes) à ce sujet. Il y a encore de nombreux défis à relever !
Enfin, la proposition graphique de Bea Lema est tout aussi ambitieuse qu'enrichissante. Ses planches, réalisées aux crayons feutres... et surtout en broderie, sont assez insolites (à part la tapisserie de Bayeux... je ne connais pas de planches de BD réalisées ainsi). Une belle réussite !
Ainsi, sans être totalement révolutionnaire (il y a pléthore de BD autobiographiques et la conclusion pose encore pas mal de questions...), Des maux à dire est une BD innovante, marquante et résolument engagée. Quoique triste et un peu désespérée, cette BD a quelque chose de profondément beau... elle est sublimée par les liens d'amour qui lient ses deux acteurs principaux, la fille et sa mère...
...dont le destin repose sur l'aide salvatrice et solitaire de sa fille.
En marge...
Le scénario de Monica est assez délirant : dès les premiers chapitres, on apprend ainsi que Monica a été abandonnée enfant par sa mère, une sorte de hippie un peu paumée...
Mais, si je n'adhère pas totalement au propos de Daniel Clowes, qui nous fait un peu le SAV des années 70... j'ai quand même accroché.
Car Daniel Clowes maîtrise son art. Il a un sens aigu de la mise en scène, les plans des cases étant choisis avec brio (ne serait-ce que pour le « générique » du début). Les regards spectateurs notamment ont le mérite de nous interpeller, de nous impliquer plus que ne le ferait une autre BD.
On a aussi la sensation de rentrer dans un vieux Comics, avec des couleurs délavées, des ambiances d'époque...
Les graphismes sont caractéristiques de Daniel Clowes, on ne peut pas se tromper : les contours épais des personnages font ressortir leurs silhouettes, tandis que de fines hachures, parfois obliques, leurs donnent du volume, une forme de vitalité.
La narration est profonde, faisant appel à notre sens de l'image autant qu'à celui des mots. Cela veut aussi dire qu'il y a des monologues, en vois-tu en-voilà...
Car la première personne du singulier, le « je », est central ici. Ce n'est plus le héros d'après-guerre, invincible et sur-protecteur, qui nous amène du réconfort, mais bien nous qui psychanalysons une héroïne mortelle. Exercice intéressant que celui d'être à l'écoute...
Quoiqu'il y aussi des à-côtés dérangeants : le ton des personnages est parfois un peu pathétique, dérisoire voir un peu méchant... Ils s'écoutent parler... mais entendent des autres que ce qui les intéressent. Les bulles à demi-rognées en témoignent et nous renvoient aussi à nous, à notre façon de lire la BD.
Mais quelle est la part d'empathie des personnages entre-eux, de l'auteur pour ses personnages, de la nôtre ? J'avoue à avoir eu du mal à m'impliquer totalement dans cette histoire, car j'ai parfois me-compris les motivations de l'auteur, son engagement, si ce n'est artistique.
Je me demande si Daniel Clowes n'est pas devenu un peu conservateur, tant dans ses idées que dans la forme de son comics, dit « indé ». Le jugement est d'ailleurs une constante dans le récit, à la fois pour s'en moquer, mais probablement aussi pour en tirer un véritable enseignement moral... une forme d'éclaircissement dans toute cette folie.
Comme Burns, le style de Clowes est maintenant bien établi dans le petit monde de la BD, à tel point qu'il est commercialisé par Delcourt, qu'on lui décerne des prix... Il est vrai que, comme d'autres auteurs de la scène indépendante, il a renouvelé l'art de la BD... Mais ça date déjà du début des années 2000.
Néanmoins, j'ai lu cette BD avec un réel plaisir. J'aime la dimension onirique, surréaliste de cette œuvre. J'apprécie son look. J'admire aussi le travail, le génie de son auteur, qui est parvenu à capter mon attention.
Cette BD a su me transporter dans un monde parallèle. Comme la parabole d'une vie, à la Moebius... son récit oscille entre des périodes de bonheur et des périodes de crise, mais aussi entre la clairvoyance et la folie, le réel et l'irréel, l'ordre et le chaos...
Au final, c'est une belle histoire d'enquête, à la fois mémorielle et existentielle, qui miroite dans les zones d'ombres, celles des interstices propres à la BD.
A nous de recoller les morceaux.
Attention !
Avant de déguster ce grand, cru veillez à avoir le matériel adéquat ! Un bon lit, une paire de binocles et quelques feuilles de sopalin (pour les moments les plus intenses) sont nécessaires pour déguster cette grande BD, à sa juste valeur.
Manipulez là avec précaution ! Les pages collant parfois un peu, veillez à les tourner sans les déchirer.
Dernier conseil avant de vous lancer ! Il faut trouver le bon moment ! S'il y a trop de monde autour de vous, vous pouvez opter pour les toilettes.
Puis, faites-vous plaisir ! Le grand-cru spécial Edika plait généralement aux garçons comme aux filles, de l'adolescence jusqu'à l'Ehpad.
Mâchouillez bien les pages, tout en les gardant longuement en bouche et sans oublier d'aspirer de l'air par votre trou du cul, et vous devriez sentir son petit-goût absurde...
Labellisé « Fluide glacial » et avec la désautorisation de la censure.
Œuvre marquante du tournant du siècle...
Persépolis est une BD autobiographique. Marjane Satrapi y évoque sa jeunesse, tiraillée par les troubles politiques en Iran et son déracinement dans l'Europe libérale. Elle finit cependant par revenir au pays, remettant ce sombre et épais voile noir.
De manière didactique, l'autrice nous prend par la main, amenant des repères historiques (révolution islamique, guerre Irak-Iran, guerre du Koweït...) et géographiques (toponymie, carte astucieusement placée...) clairs et concis, pour nous transporter dans son histoire et celle de son pays.
Les dessins, dans un style persan, sont élégants, sans fioriture. Marjane Satrapi use du noir et du blanc pour composer les traits des visages, d'une grande régularité, ainsi que les formes et les volumes des décors... et leurs ombres aussi. Lumineux et obscur à la fois, cette bichromie accentue la dramaturgie de l’œuvre.
Car la vie qu'elle traverse nous mouille parfois les yeux. Intimiste, familiale, la narration nous rapproche des personnages. On partage leurs peines, mais aussi leurs joies.
En effet, le récit n'est pas sans humour, avec une forme d'autodérision de l'autrice sur sa jeunesse, mais aussi des caricatures des personnages les plus détestables...
Ceci étant dit, le bouquin de Marjane Satrapi témoigne d'une réflexion sur les libertés : celle de pouvoir s'exprimer, mais aussi de manifester, de se déplacer comme on veut, de se réunir avec ses amis, d'être jugé équitablement... La privation de liberté en Iran contraste avec l'Europe et amène des incompréhensions, entre Marjane Satrapi et ses amis Européens... mais aussi Iraniens.
Elle semble alors coincée entre deux mondes.
L'arrivée de Marjane Satrapi en Europe est une petite révolution pour elle, un changement de paradigme qui se concrétise graphiquement : pâleur des décors et surtout Marjane ne sourit presque plus... Tout semble beaucoup plus triste, dans ce qui semblait pourtant être un échappatoire à la tyrannie iranienne.
Ce bouleversement n'est pas non plus sans lien avec son entrée dans l'adolescence. Son corps se transforme, elle expérimente (drogue, sexe...), change de look... C'est une période difficile pour elle au final, car confrontée à la xénophobie, à l'éloignement de ses proches...
Ainsi, Marjane Satrapi parvient à représenter la violence, pas seulement celle de la guerre mais celle de la vie en générale. Elle y parvient dans une forme de déplacement poétique, par des discussions, des symboles, des visages marqués (cernes, yeux vers le bas, bouche triste...), des effets graphiques et autres chiasmes de la mise en page...
A contrario, le témoignage de Marjane Satrapi contient aussi ses solutions : les repères (valeurs inculqués par ses parents, culture persane...), les personnes (ses parents, sa grand-mère...), les dynamiques (affirmation, rire...) qui lui ont permis de s'en sortir. L'autrice fait en quelque sorte office de grande sœur.
Le propos est consistant, avec des thématiques aussi diverses que la religion, la politique, les discriminations... Les dialogues sont d'ailleurs nombreux, avec une grande part d'introspection voir d'autocritique de la part de l'autrice, et donnent toute sa profondeur au récit. Les dessins aident également à se rendre compte de l'apparence des personnages, de leurs émotions (leurs visages sont comme des smileys), de leurs souvenirs et de leurs rêves aussi parfois...
Le temps s'y déroule lentement, avec des flashbacks, nous laissant apprécier l'évolution des personnages, en particulier celui de Marjane.
En résulte une œuvre majeure, dans la lignée de Maus, roman graphique ayant servi de modèle pour Persépolis. Il ouvre une nouvelle ère pour la BD franco-belge, celle du réel et de l'éclatement des formats. L'Arabe du futur par exemple, de Riad Sattouf, fait partie de cette nouvelle vague.
BD alternative au regard nouveau, Persépolis a été très bien accueilli et est devenu un blockbuster, encouragé par une critique unanime, un film (2007) et trustant les rayons BD des bibliothèques scolaires.
Avec Persépolis, la BD iranienne rentre aussi dans l'Histoire du neuvième art, source d'inspiration pour de futurs dessinateurs ou caricaturistes (je pense notamment aux Oiseaux de papier, où l'on reprend l'image de la tisseuse de tapis).
Surtout, Marjane Satrapi aura su nous transporter dans son enfance, à la fois singulière et commune à tous, avec une sortie de l'innocence compliquée, mais forte en apprentissage.
Persépolis est enfin un plaidoyer pour le sort des femmes...
...dont l'émancipation constitue le but, le point final.
Pas besoin de vous droguer, Dope rider le fait à votre place !
Une anthologie des shots du squelette toxico, mais aussi d'autres récits de Paul Kirchner (l'auteur, qui apparemment serait clean...), comme les travailleurs aveugles de la Ruche, en passant par la sexualité des poupées à minuit.
On ne sort pas indifférent de cette lecture...
Certes, les histoires ne sont pas toujours intelligibles, mais c'est bien parce que les décors simulent un trip dantesque, au goût des années 70.
Le tout est harmonieusement surréaliste, les graphismes faisant forte impression, avec des décors particulièrement soignés. Mais, pour apprécier cette œuvre, il faut faire appel à son inconscient : Cartésiens, fuyez !
De plus, des explications viennent étayer la fin du bouquin.
Kirchner y explique, sans fard, son parcours, ses rencontres, ses méthodes de travail, ses galères, ses chances...
Clairement, c'est pas un gugus. Paul Kirchner maîtrise son art.
J'aurais aimé que Kirchner ait au moins 1% de la notoriété de Daniel Clowes en France (d'ailleurs si BDthèque pouvait arrêter de me bombarder de pubs de Monica ça serait cool...), j'aurais aussi souhaité que les auteurs de Dali s'en inspirent... Je suis un grand rêveur.
A découvrir sans tarder.
Pour ma part...
j'ai trouvé cette BD intéressante. C'est la troisième que je lis du Cil Vert et je suis de plus en plus convaincu par son style.
Si on peine à rentrer dans cette BD, notamment à cause de passages peu crédibles : je pense en particulier aux bizutages des gedzarts, si déconcertants avec leurs looks que j'ai cru à une fiction...
Le récit reste clair, sensible... On apprend des choses, sur l’École des Arts et Métiers surtout, mais aussi les ressentis de l'auteur sur son parcours de vie...
La narration témoigne de ses réflexions sur certains sujets, quoiqu'on peut parfois être en désaccord avec lui...
Le bizutage à l'ENSAM est-il si négatif ? Faut-il rentrer dans le moule pour vivre avec dignité ? Est-ce qu'on a le choix ? Comment s'émanciper, quand on est une femme ou un homme ?
Simple, personnel...
...mais riche en enseignement.
Une œuvre qui a fait du bruit...
Martin Panchaud raconte, dans La couleur des choses, l'histoire d'un jeune homme en proie au harcèlement, dont un ticket gagnant, aux courses hippiques, va changer la vie...
D'entrée, on est surpris par la représentation des personnages, en forme de ronds, vus du dessus. J'ai donc dû utiliser mon imagination.
Mais, l'identification aux personnages reste laborieuse et on peine à s'immerger dans l’œuvre. De ce fait, on garde un certain recul...
Un peu monotone (notamment avec des enchaînements de cases équivalentes), j'ai dû faire des pauses en lisant cette BD, avant d'y revenir, animé par une forme de curiosité. Les dialogues, nombreux, font avancer l'histoire, mais sont aussi plein de pathos...
Par contre, ce qui impressionne, dans le sillage de Chris Ware, c'est la complexité graphique de l’œuvre : mise en page millimétrée, découpage composite, plans variés et inserts de pictogrammes ou autres représentations infographiques... donnant une énergie singulière à l’œuvre.
Tout est justifié, rien n'est gratuit et les intrigues finissent par se croiser, dans une conclusion explosive.
A ce titre, le talent de Martin Panchaud est immense. Sorti en 2023, La couleur des choses a d'ailleurs cumulé les prix, parmi les plus prestigieux (ACBD 2023 et FIBD 2024). Mais elle est aussi restée inaudible, pour une partie des lecteurs...
Personnellement, je n'ai pas passé une expérience inoubliable.
Si j'apprécie cet angle de vue inédit, que je préfère aussi juger les personnages par leurs actes et non par leur apparence physique, que la narration est aussi claire qu'innovante graphiquement...
...Je n'ai pas eu « d'effet Waouh ». Comment pourrais-je d'ailleurs être émerveillé, par une BD dont l'intérêt principal est d'utiliser des plaquettes d'information, comme outil de narration ?
Néanmoins, le défi relevé par Martin Panchaud était colossal : en définitif, il est parvenu à créer un ouvrage qui tient la route, en prenant le contre-pied des vieux classiques et en construisant son propre langage BD. On finit d'ailleurs par avoir une forme d'empathie pour ce jeune r... garçon de 14 ans.
Plus qu'une BD, Martin Panchaud a fait de « l'art neuf », comme pourrait dire Benoît Peeters...
Une BD avec matière à penser...
qui en surprendra plus d'un.
C'est le présent qui nous y est raconté, mais à la manière d'une histoire de saint médiévale : il y a des passages absurdes et on ne comprend pas tout. Cependant, ce néo-Saint-Nicolas, à l'allure d'un playmobil, finit par faire des miracles.
Évidemment, les lecteurs d'extrême-droite ou les béni-oui-oui n'y trouveront pas leur compte...
...Parce que ce bouquin est une façon de dénoncer l'hyper-sécurisation, les politiques anti-migrants, le rapprochement de Macron et de Le Pen (planche 71), les problèmes écologiques et autres catastrophes climatiques... en bref, les difficultés qui s'annoncent pour nos enfants...
...Mais les autres pourront profiter de cette bouffée d'oxygène, cette liberté de ton, ces graphismes puissants, ce découpage personnel (de deux cases par page, l'auteur complexifie ensuite son découpage comme pour la planche 46).
Une lecture sensible et résolument engagée...
Qui laisse une lueur d'espoir.
Une série western qui ne révolutionne pas le genre...
...quoiqu'elle est parmi les meilleurs du moment.
Le trait, de Ralph Meyer, rappelle celui d'autres dessinateurs célèbres : hachures à la Jean Giraud (not. Blue... Undertaker) ou dessins pulpeux de Boucq (Lin ou le manchot des tomes 3-4)...
L'esprit des réalisateurs Sergio Léone et surtout Quentin Tarantino transpire aussi dans le scénario, de Xavier Dorisson : je pense à la caravane de Jonas Crow et son haut de forme à la docteur king Schultz.
On reprend donc des recettes qui marchent, de façon plutôt efficace : personnages badass, scènes d'action époustouflantes, des bandits (pas toujours ceux qu'on croit), des redresseurs de tort (pas forcément si gentils), des femmes, du love et un peu d'humour aussi, et enfin des décors frappants...
Si ce n'est pas hyper novateur, que les dialogues peuvent être un peu simplistes aussi et que j'ai commencé à décrocher à partir du tome 3...
...cela reste une façon plaisante de prolonger l'expérience Blueberry.
MiYaZaKi !
Un beau livre, sorti des cartons poussiéreux du maître japonais. On retrouve ici son trait, rehaussé par des couleurs pastel... Rafraichi.
C'est visiblement aussi une matrice, celle des films d'animation Ghibli. En ce sens, le bouquin est assez intéressant...
...et, du même coup, assez redondant aussi. L'impression de déjà vu est constante.
L'histoire est courte, avec beaucoup d’ellipses. Plutôt réalisé à la façon d'un livre illustré, La narration externe n'arrange pas les choses...
..petit à petit on pique du nez. Ce n'est pas une grande expérience de BD.
Si on lui préférera le plaisir de lecture du manga Nausicaa, beaucoup plus long et approfondi...
...ça reste une curiosité, qui laisse rêveur.
Une bonne BD dans l'ensemble.
Je n'ai pas accroché tout de suite, notamment à cause du format roman graphique qui me décourage parfois : c'est long, les parties en gaufrier ne m'attirent pas trop et le lettrage est un peu mou.
Cependant, l'histoire est attrayante et j'ai fini par passer un bon moment, le temps de rentrer dedans.
Pour conclure, les graphismes sont intéressants et amènent une forme de douceur froide, loin du ton pathétique (un peu comme dans le Sommet de Dieu) ou hormonal (à la Blain) d'usage classique dans ce genre. Un flegmatisme qui sied bien à cette histoire d'aventure, pourtant un peu folle.
Néanmoins, elle s'inscrit dans les tendances de l'époque, à la recherche d'un réalisme parfois sans émoi. En ce sens, je n'ai pas été très surpris.
En Avant !
C’est la traduction littérale du titre en langue Lakota, clin d’œil à la série Blueberry, où les auteurs utilisent abondamment ce cri dans les bulles, pour illustrer les offensives des Sioux et autres Apaches...
Car cette BD s’inscrit dans les nombreuses mutations du western, depuis les années 60. En d’autres termes, elle fait du neuf avec du vieux.
Entièrement scénarisée et dessinée par Neyef (artiste montant de l’écurie Label 619...), l’histoire est résolument progressiste, dans l’ère du temps : les personnages principaux (Little Knife, No Moon... et aussi un enfant, qu’ils et elle prennent sous leurs ailes, quoiqu’on dirait un Mexicain...), sont essentiellement issus des minorités opprimées (Amérindiens, Irlandais...). La nature y est omniprésente et le discours presque écologique (animisme Lakota).
Le découpage est moderne, sans fioriture. Les dessins sont beaux, si ce n'est que j’ai commencé à apprécier les dessins vers le milieu de l’album seulement (magnifique feu de camps sous les étoiles, au détour d’une page...). D’ailleurs, les paysages chaleureux adoucissent l’album... entrecoupé sinon de scènes violentes : âmes sensibles s’abstenir, comme on dit...
Le scénario est intéressant, quoique les dialogues ne m’ont pas emballé (c’est pas Charlier...). Les protagonistes principaux, pour ne pas dire les héros, sont loin d’être lisses : comme on s’y attend un peu, ça tue du pionnier blanc... mais le patriarcat amérindien est lui aussi sévèrement critiqué.
De fait, les personnages chevauchent librement, se perdant parfois, sans autre projet que de survivre, échapper à un chasseur de prime... et se venger. Déracinés, méfiants vis-à-vis de la « civilisation » qui les entoure, ils n’ont plus que des repères triviaux, eux aussi... Comme des adolescents en quête d’identité, d’émancipation, d’un apprentissage différent..
Or, la violence y est souvent gratuite, excessive même, la conception de la justice étant comment dire... particulière. A vivre en dehors des limites, il est naturel d'en arriver à une forme de bestialité.
C’est bien ça qui me choque, ainsi que le regard toujours plus acide sur les colons, dégénérés, et aussi sur les Amérindiens, non plus perçus comme des sauvages, mais comme une civilisation tout aussi cruelle.
Au final, si j’ai apprécié le progressisme de cette œuvre, reflet de notre propre société, ainsi que la qualité du travail de son auteur, je reste dubitatif quand à l’objectivation de cette violence. Je lui préférerais l’intensité suggérée, celle du trait ardent de Giraud...
Mais au moins, j’aurais appris ce que veut dire « Hoka Hey ! ».
Une belle BD...
bien écrite et bien illustrée, qui conviendra aux petits comme aux grands.
A l'heure où le racisme et autres idées réactionnaires sont banalisés dans les médias, cette BD nous offre un bon bol d'air frais, parlant de la situation migratoire en Côte d'Opale, avec justesse et simplicité de ton. Mais, si la question est épineuse, est-ce que le propos détourne les jeunes de la réalité ?
Sans surprise, Calais sert de lieu de transit aux migrants, désireux de rejoindre l'Angleterre (c'est l'entrée du tunnel sous la Manche). Une partie d'entre eux réside maintenant dans des squats, puisque les camps de migrants, mis en place de manière informelle dans les années 2000, ont été détruits par les autorités, parfois avec le concours de groupes de vigilantisme, proches des milieux d'extrême-droite.
Si une partie des Calaisiens se sent incommodée par cette présence et cherche donc à les éloigner, la vie des migrants est loin d'être de tout repos, harcelés par la police et les autorités locales. Car il s'agit bien de réfugiés, pour une grande partie d'entre eux. Leur nombre a d'ailleurs considérablement augmenté depuis la guerre en Syrie, en 2011. De ce fait, parce qu'ils rêvent d'une vie meilleure, ils sont prêts à prendre des risques insensés, pour passer la Manche clandestinement. La « sécurisation » de la frontière n'a fait qu’accroître le risque de cette traversée. Il y a pourtant des enfants parmi eux...
Ainsi cette BD, qui représente de jeunes migrants fuyant la guerre (« les bonhommes de pluie »), se terrant dans des squats, en attendant de tenter la traversée de la Manche, est tout à fait représentative de la situation réelle.
De plus, elle a le mérite de parler d'un sujet sérieux sans passer par un ton pathétique. Il est normal que ce sujet intéresse aussi les enfants...
...d'ailleurs parfois plus perspicaces que leurs parents, dans l'incapacité d'expliquer correctement les phénomènes de migration et leur concrétisation sur le terrain.
Une BD patrimoniale intéressante.
Un auteur, Kristen Foinon, qui laisse une BD inachevée en 1996. Finalisée récemment par une graphiste et éditée en 2021.
Un personnage historique, Jules Le Gall alias "Gueule d'Or", anarchiste à Brest et mort à Buchenwald pendant la Seconde Guerre mondiale.
Un résultat saisissant. Tout en noir et blanc, dans la tradition des Seiz Breur, les graphismes ont quelque chose d'hypnotique, avec un enchevêtrement des formes.
On y reconnaitra le vieux Brest des cartes postales...
Celui où s'engager voulait parfois dire donner sa vie.
Mais qu'est-ce que c'est que ce livre ?
Je me suis posé la question, dès la couverture... Une simple ligne, traversant les cases, illustre les deux premières pages. Puis, progressivement, apparaissent des personnages, du texte et une narration.
Dans un style très personnel, Lukasz Wojciechowski met ainsi en scène un dessinateur industriel, encore marqué par la Grande guerre...
L'ouvrage est assez incommodant au premier abord, avec des dessins numériques, d'une simplicité quasiment infantile. Il faut s'accrocher.
Passer cette étape, c'est accepter que l'ouvrage nous prenne aux tripes, que les graphismes avivent nos émotions : calme inquiétant, aphasie, bruits abrutissants, DUMDUMBUDUM, monotonie, fureur, mortification, DUMDUMBUDUM, kaleidoscpoe hypnotique, apaisement...
Au final, on entre dans la tête du personnage, on pense, on ressent avec lui.
Mais l'ouvrage a plusieurs niveaux de lecture. Au delà des approches artistique et narrative, l'auteur a aussi une démarche historique : en 1919, l'Europe occidentale s'industrialise à vitesse grand V. Tout est standardisé, mécanisé, rationalisé, au millimètre près. Ingénieurs, chercheurs ou même psychologues, prennent une place nouvelle dans cette organisation scientifique du travail.
Ainsi, Lukasz Wojciechowski réalise une BD déroutante, mais réellement engagée et riche d'enseignement...
C'est une œuvre minimaliste, d'avant-garde et c'est aussi un objet particulièrement fascinant.
Inclassable.
Une œuvre fleuve...
Matthias Lehmann, auteur complet sur cette BD, réalise quelque chose de rare : suivre une famille brésilienne sur le temps long, de 1937 aux années 2000. Autofictionnel, l'auteur a puisé dans ses propres souvenirs de famille pour faire ce livre.
Le challenge est immense ! L'auteur a du accumuler une somme de travail colossale pour arriver à ce résultat. Mais quelle maîtrise de Matthias Lehmann, c'est bluffant, à en être jaloux !
L'histoire est particulièrement dense, profonde. Matthias Lehmann restitue avec réalisme l'ambiance du Brésil contemporain, en en soulignant les enjeux (dictature, patriarcat, partage des richesses, insécurité, sexisme, ségrégation, corruption...), tout en développant les ramifications de son scénario avec brio. Il n'hésite pas à mettre en évidence certaines contradictions : comme celles de Severino Wallace, fils à papa qui passe par le communisme, avant de devenir un richissime auteur de romans...
Le découpage des pages est tout aussi intelligent. Si les compositions de Lehmann sont variées, ses choix sont toujours justifiés. L'ensemble est très dynamique, avec des respirations de temps en temps (doubles ou pleines pages) et le livre ne m'est pas tombé des mains, ce qui est régulièrement le cas quand je me lance dans un roman graphique.
Ses dessins, au stylo, sont également très plaisants. Un peu comme dans La vengeance de Croc-en-jambe (du même auteur), les protagonistes du livre ont l'allure de pieds-nickelés, littéralement. Longtemps auteur de fanzines, la composition graphique de Matthias Lehmann grouille de traits, de hachures et autres canevas. De cette manière, il souligne la couleur de peau, la crasse ambiante ou encore l'âge de ses personnages, qui vieillissent inexorablement.
Ces graphismes, qui évoluent à chaque chapitre, influencent notre discernement. Tout est en noir et blanc. De cette façon, Lehmann voulait « éviter de faire du tropicalisme ». Ainsi, on peut parfois être attristé par une scène dramatique, souvent soulignée par une case plus grande, une mise en page spécifique. Inversement, les personnages, aux looks un peu caricaturaux, prêtent souvent à sourire. Car, finalement, la vie de ces personnages n'est pas totalement tracée, elle est aussi assez absurde, avec de nombreuses situations imprévues. Cela tempère pas mal nos émotions : on n'en vient jamais aux larmes, mais on ne rit pas non plus à gorge déployée...
De ce fait, je n'ai rarement eu d'émotion forte en lisant ce livre, qui alterne entre le chaud et le froid. Mais, j'ai apprécié plonger dans une certaine ambiance, dans un ailleurs, un autre temps... et découvrir les vies de ces personnages, tout en relief.
Une certaine perception des années de plomb brésiliennes (Chumbo)...
à lire et à relire.
Ce deuxième tome de Slava reste globalement dans la même dynamique que le premier...
Il a les mêmes atouts : des décors remarquables (architecture...), avec des couleurs intenses (contrastes de bleu et de rouge) se mariant parfaitement avec l'encrage noir ; un univers fouillé, qui permet de toucher du doigt l'histoire de la nouvelle Russie ; un découpage moderne, qui n'est pas sans rappeler le travail de Rémi Farnos ou de Blain, pour ne citer qu'eux, avec une variation maîtrisée des cases (en particulier pl. 39) ; et enfin des moments forts dans la narration.
Mais Slava 2 souffre des mêmes défauts que son grand frère : le mélange des genres entraîne quelques lourdeurs ; c'est d'ailleurs très verbeux, avec une narration parfois pesante, qui perturbe la suspension d'incrédulité ; certaines expressions de visages se répètent et manquent de réussite (visages de Nina qui parle la bouche à peine ouverte pl. 64).
Pour moi, la grande nouveauté de ce deuxième album, c'est la place prépondérante prise par un personnage un peu second, mais plein de relief. A tel point qu'on peut se demander qui est le héros de cette histoire ? S'il y en a un...
Je dois avouer que l'histoire d'amour de Slava et de sa copine m'a semblé un peu terne, comparée à la passion capitaliste dévorante qui en anime d'autres. D'ailleurs, Nina est souvent cantonnée à un rôle de concubine et ses prises d'initiative sont un peu téléguidées. Pas facile de trouver sa place dans ce monde de brutes.
Mais, si Slava est l'un des protagonistes de cette histoire, qu'il fait figure de narrateur dans un jeu complexe de mise en abîme, son nom lui permet aussi d'incarner la nation russe. Car, ce sont bien les Russes qui sont au cœur du propos, qu'ils soient héros ou contre-héros.
Ainsi, quoique je me sois un chouia ennuyé, les particularités de cette série me donnent envie de voir la suite...
Mais j'ai peur que ça finisse en une Lavrine...
Premier tome de la série Fante Bukowski (mais le deuxième que je lis).
Je suis de plus en plus en convaincu par l'art de Noah Van Sciver : son graphisme assez crade illustre magnifiquement la vie miséreuse de Fante Bukowski.
C'est très marrant, puisque Fante Bukowski tente à peu près tout pour percer en tant qu'auteur, sans grande réussite...
Mais en même temps c'est assez profond, puisque Fante Bukowski est sacrément têtu, arrogant parfois même, et ne se laisse jamais abattre.
Une forme de philosophie de l'abandon, où le chemin compte plus que le but.
Je n'avais pas prévu de lire cet ouvrage...
J'étais rebuté par son côté « BD de youtubeur » ou Hugo Clément®... mais ma copine le voulait (enfin la BD...) et j'ai finis par le lire aussi.
Force est de constater que c'est une BD accessible, très claire et bien fichue : Vincent Ravalec, le co-scénariste, a sûrement beaucoup contribué à la lisibilité de la narration. Les dessins aquarellés, de Dominique Mermoux, offrent aux personnages une plastique agréable, sans fioriture.
Les thèmes abordés dans ce livre (autour de la maltraitance animale et de notre rapport avec ces êtres vivants) m'ont intéressés. Sans être totalement scotché, j'ai tout de même appris des choses.
Car c'est une œuvre à visée morale, engagée. D'autres acteurs de la protection animale sont d'ailleurs mis en scène, aux côtés d'Hugo Clément : Sea Shepherd, L214...
Mais cette BD n'est pas vraiment marquante : elle n'a pas la force d'opinion d'un Rob Stewart (avec son film Sharkwater), ni la puissance alarmante des photographies de L214, ou encore l'humour caustique de la chaîne youtube L'ami des lobbies. Par exemple, la BD Les algues vertes était beaucoup plus profonde, avec un travail d'enquête et des documents en appui.
Concernant Hugo Clément, j'avais été marqué par le reportage qu'il avait fait sur le charbon en Australie. Alors quel est donc l'intérêt d'utiliser le support BD ici ?
Car, si cet ouvrage peut plaire aux jeunes générations, je ne pense pas que sa dialectique, parfois un peu simpliste, convaincra tout le monde... D'ailleurs, il ne fait pas bon d'être gros dans ce bouquin...
L'objectif est donc pédagogique (eh oui, manger de la viande c'est pas très bien)...
mais avec Hugo Clément pour argument marketing.
Un jalon dans l'évolution de la BD...
d'ailleurs reconnu par son petit monde en 2002, avec l'Alph-Art du meilleur album (tome 1 Les Amériques). Mais, en ce qui me concerne, je trouve au moins aussi intéressant les albums suivants.
Au départ, Isaac n'est pas prédisposé à être un pirate : c'est un peintre, il a une compagne, une vie de citadin... mais il manque de boulot, aspire à être quelqu'un et finit, un peu malencontreusement, par prendre le large, avec une bande de fiers à bras.
Dans cette oeuve, le sentiment d'immersion est total : mise en abîme, dégénérescence progressive du héros, vie très crue des flibustiers... Christophe Blain, lui même passé par la Marine nationale, engendre ainsi une oeuvre plutôt réaliste.
A la manière de Sfar, son collègue d'atelier dès 2002 (avec Sapin et Sattouf), Blain a un trait cinglant, particulièrement expressif. Les scènes d'action sont représentées dans leur jus : batailles navales ; combats, à mains nues, au couteau ou au pistolet ; cambriolages et parties de jambes-en-l'air...
L'émotion des personnages est tout aussi tangible, avec des sourires, des ombres éloquentes mais aussi des couleurs (par Walter et Yuka). Les relations des personnages, entre amour, amitié... et toxicité, sont ainsi brossées avec talent.
Le scénario est tout aussi consistant. De la grande aventure, on passe petit à petit à un récit plus posé, presque redondant. Au milieu du tome 3, la narration gagne aussi en érotisme, avec une vision assez libre de l'amour, de la sexualité... assez violente même.
D'ailleurs, dans ce jeu de chassé-croisé, Blain sait nous tenir en haleine, nous frustrer : on se demande toujours si Isaac retrouvera Alice ? Qu'est-ce qu'il se passera alors ?
Mais maintenant, ça commence à faire un peu long...
Une fiction qui mélange les genres...
avec de l'action, des investigations, de l'humour... et même un brin de romance.
Pour vous donner une idée : Slava est un artiste contemporain, qui accompagne une crapule guillerette, dont le but est de piller d'anciennes villas de l'ex-URSS, pour revendre ensuite son butin à des oligarques russes...
Pierre-Henri Gaumont, auteur complet, réalise une histoire consistante. Quoiqu'un peu stéréotypée par moment (« On est des russes, Nina. On survit. Le trafic coule dans nos veines. Avant, pendant, et après le communisme. »), l'ensemble reste assez convaincant, plutôt équilibré.
Le trait de P.-H. Gaumont, nerveux et élancé, m'a fait immédiatement penser aux dessins de Blain et à l'auto-désignée " Société nationale de bande dessinée " (avec Sfar, Sattouf et Sapin).
Les couleurs, lumineuses, font régulièrement référence au rouge communiste voir aux couleurs de la confédération de Russie (bleu, blanc, rouge).
D'ailleurs, depuis les Bidochons tome 5, je ne me rappelle pas avoir vu d'aussi bonnes représentations de l'architecture soviétique...
En tout cas, les graphismes sont convaincants et guident plutôt bien notre regard.
Par contre, j'ai été un peu perturbé par la narration omnisciente du personnage principal, qui apparaît dans les interstices.
De plus, le ton vulgarisateur, qui se rapproche de celui de la BD du réel (explications divers et utilisation d'allégories pour certains propos périphériques), m'a parfois rappelé certaines BD de Blain (En cuisine etc.)... mais sans les penchants de ce dernier (prise de parti, manque de recul critique, snobisme, idolâtrie). Heureusement...
Ainsi, quoique j'ai eu un peu d'appréhension par moments (Le monde sans fin de Blain n'a pas fini de me traumatiser...), Slava est une BD éclectique...
...et passablement moderne.
Un humour à se pisser dessus...
Eric Salch, connu pour ses BD irrévérencieuses mais profondes et porté par l'éditeur Fluide Glacial, nous offre une vue d'ensemble des looks français de 2015, année de l'attentat de Charlie Hebdo.
Au programme, beaucoup de têtes « cons »... mais aussi des « petites putes », des « fils de... », des « connards » et au final tout le monde en prend pour son grade : selon Salch, le « beauf de 2015... rigole à mes dessins ».
Hilarant (aïe...), je me suis délecté de ces caricatures, un peu puériles et surtout très grossières...
Un exutoire tout en dérision.
Une BD pour les enfants... et aussi pour les plus grands.
Camille Jourdy (autrice de Juliette ou encore de Rosalie Blum, des classiques du genre) met en scène les espiègleries de deux enfants, Pépin et Olivia, dans une série d'histoires courtes.
Les aquarelles sont très jolies, quoique les couleurs édulcorées me laissent indifférent. J'ai été plus particulièrement intéressé par les détails minutieux de la couverture (planque dans l'arbre, la souris qui s'invite au goûter...), aspect que l'on retrouve dans certaines cases et qui ravit mes yeux (les constructions de legos multicolores de Pépin par exemple...).
Le découpage alterne entre des planches assez classiques, d'autres avec des cases sans bords (espaces extérieurs et « conversations hors du temps »...) ou des doubles pages (train fantôme...).
Cependant, je n'accroche pas trop à la narration. Est-ce que c'est le côté un peu lourdaud des facéties de Pépin ? Est-ce que c'est parce que c'est un peu genré, un chouia stéréotypé ?
La personnalité des enfants et la construction narrative restent cependant assez complexes, avec des liens entre chaque histoire. Peut-être est-ce que c'est quelque chose d'autre alors ?
Je me dis que j'ai souvent eu du mal avec certaines BD de ce style, utilisant la candeur des enfants comme ressort comique. Je n'avais pas accroché non plus à Pico Bogue, pour son côté enfant philosophe.
De plus, je ne suis pas dingue des BD de Camille Jourdy, s'attardant souvent sur le quotidien des protagonistes.
Au final, peut-être que c'est tout simplement une BD d'allure trop normale et que je préfère l'humour absurde ou un peu plus caustique. Je pense notamment aux BD où les enfants sont dépeints comme bêtes et (un peu) méchants : Tom Tom et Nana, Calvin et Hobbes voir même Mortelle Adèle...
Néanmoins, cette BD pleine de bons sentiments plaira sûrement à beaucoup de monde.
Une œuvre pleine d'ironie (il suffit de voir les première et quatrième de couverture).
Contrairement aux avis précédents... j'ai pris du plaisir à lire cette BD, à l'humour non-sensique.
J'ai eu un rictus tout au long de la BD et les gags m'ont pas mal fait marrer.
L'art d'Emmanuel Reuzé, dans la veine de son éditeur Fluide glacial, consiste à raconter des historiettes sur un ton assez sérieux, mais en ajoutant des éléments incongrus... pour rendre l'ensemble absurde et désopilant.
Hâte de lire les autres albums de cet auteur.
Une BD épaisse, au titre ironique...
Sans grand intérêt, elle m'a irrité par plusieurs de ses aspects.
Les arguments technicistes que l'on y trouve sont les mêmes que ceux assénés par Jancovici, dans de très nombreuses tribunes médiatiques : selon ses chiffres, les efforts écolo sont un peu inutiles (à part le vélo et le végétarisme), de toute façon c'est trop tard, la décroissance finira par se faire de manière contrainte et le nucléaire sauvera les meubles...
J'ai cependant appris 2-3 choses... contre les énergies vertes, façon pour Jancovici et son dessinateur de défendre vaille que vaille le nucléaire.
A titre de comparaison, l'interview de 2023 sur Médiapart était plus édifiante, avec des questions profondes, des contre-arguments. Ces aspects sont trop absents de cette BD, au ton vulgarisateur, mais à la dialectique sans saveur.
Je préférai quand Blain dessinait des aigrefins : pirates, cow boys, hommes politiques... Mais a-t-il vraiment changé ?
Cette BD aurait aussi pu s'appeler " EDF - Devenons l'énergie qui change tout, sans transformer votre quotidien ".
Un modèle de découpage de BD...
C'est ce qui m'a sauté aux yeux en lisant Dernière rose de l'été.
Ici, Lucas Harari nous plonge dans la vie de Léo, adulte d'âge moyen qui rêve de devenir écrivain. Il passe quelques semaines dans une villa idyllique, prêtée par son cousin, lorsqu'une affaire de meurtres en série vient défrayer la chronique...
Les graphismes sont magnifiques ! Il y a du Chaland dans la ligne claire d'Harari, mais aussi du Burns dans ses ombrages au noir. Les architectures des bâtiments, notamment les villas et leurs intérieurs, sont particulièrement bien soignées. La colorisation est admirable, avec un effet moiré maîtrisé. Un plaisir pour les yeux !
Surtout, la narration graphique est exceptionnelle, avec des cadrages dignes d'un as du storyboard (on appréciéra notamment les travelling devant la villa, le zoom/dézoom lorsqu'il se coupe au rasoir...). Ses choix de cases sont pesés au millimètre près, avec de l'audace et une efficacité sans pareil.
Le scénario est prenant, dynamique, avec un versant assez psychologique. Quoique la scène finale avec le « serial killer », un peu déroutante, nous demandera de faire appel à notre sens de la déduction, pour raccomoder nous même toutes les ficelles de l'histoire.
Au final, une oeuvre aussi chaleureuse par ses thématiques et ses couleurs, que refraichissante par sa modernité. Même si la place des femmes y est un peu discutable, avec une sorte de « Lolita », j'ai pris beaucoup de plaisir à la lire.
Un auteur à suivre...
Coco raconte son histoire autour de l'attentat de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015.
Une BD expressive, belle et émouvante... mais marrante malgré tout.
A lire.
Une BD sur la résistance à l'occupation nazie (1940-1944).
je l'ai lu juste après la série Madeleine, Résistante... et ça fait un choc.
Les graphismes de Camille Lavaud Benito sont hétéroclites, avec un découpage avant-gardiste, très loin des codes habituels de la BD. Parfois je me suis dit, c'est assez moche et d'autres fois, c'est simplement beau !
Si cette proposition artistique est intéressante, très expressive en fait, exacerbant les émotions, elle rend cependant la narration difficile à suivre.
Une œuvre étonnante.
Un sentiment mêlé...
Comme pour le premier album, c'est ce qui ressort de ma lecture de L'édredon rouge, où la résistante Madeleine gagne en responsabilités.
En effet, si le sujet est aussi poignant que les dessins magnifiques, j'émets quelques réserves sur la couleur, qui personnellement me rebute, ainsi que pour la narration : je trouve le système des vignettes un peu archaïque et le témoignage de Madeleine entre trop souvent en dissonance avec la narration graphique.
Pour ces raisons, je n'ai pris aucun plaisir à lire les 60 premières pages.
Mais, la montée en intensité (narration, graphismes) vaut qu'on s'accroche : il y a matière à réflexion tout comme à l'action... avec un cliffhanger final qui ne peut que susciter l'effroi.
Si je ne suis toujours pas entièrement convaincu par la forme que prend cette série, je reste admiratif de la vie de Madeleine et lirait la suite malgré tout.
Une BD toute bleue et à l'odeur de citron...
qui raconte, évidemment, les premiers pas de Madeleine Riffaud en tant que résistante. Un sujet qui me fascine et qui plaira à beaucoup de Français(es).
Sa vie, impressionnante, semble aussi avoir subjugué la « dream team » réunie autour d'elle : du scénariste Jean-David Morvan, qui s'est spécialisé dans les scénarios historiques ces dernières années (Simone, Magnum génération...), au dessinateur Dominique Bertail, auteur de Mondo Reverso entre autres.
Car Madeleine Riffaud fait figure de modèle : femme forte, courageuse, intelligente et engagée... elle a aussi un physique attrayant, croqué par Picasso.
Jeune, elle brille ici de mille feux, avec son visage d'un blanc pur et éclatant, ses cheveux bouclés... Une image idéale, peut-être trop, qui contraste avec les nazis, placés naturellement dans l'ombre.
Ce traitement graphique et narratif, qui m'évoque de vieux films sur la Seconde Guerre mondiale, ne m'a pas entièrement convaincu. J'aurais aimé plus d'éléments de dialectique, d'autres sources que celles de Riffaud...
Son témoignage reste cependant d'une grande intensité et est largement suffisant pour se rendre compte des enjeux, ceux de l'entrée en résistance. Wikipédia est également très instructif à son sujet.
Alors pourquoi utiliser le support BD ? Est-ce un intérêt économique ? Un effet de mode ? Un moyen de parler aux jeunes ? Est-ce pour la sensibilité, l'expressivité ou même la modernité du neuvième art ? Ou pour donner vie aux images et souvenirs de l'autrice ?
Dans tous les cas, cette BD aura réussi finalement à me marquer...
...du R majuscule.
Un prédateur sexuel en polo rayé...
Tout en contraste, l'histoire de ce polar gravite autour d'une immolation. L'événement a lieu dans un quartier résidentiel américain assez spécial, car y habite des délinquants sexuels...
De mon point de vue, le principal intérêt de cette BD c'est ses sujets forts : pédophilie, cyberharcèlement, justice... mais aussi famille, ghettoïsation, investigation, stéréotypes, religion.
Le scénario, de Carlos Portela, assez bien mené, traite de ces thématiques avec justesse et ingénuité. Néanmoins, c'est un peu lent à se mettre en place et il n'y a pratiquement aucune scène d'action ni de grand coup de théâtre.
Côté graphisme, si les personnages sont représentés dans le style BD le plus pur, les décors eux sont calqués sur des photographies. Tout est en noir et blanc, avec des aplats noirs, mais aussi des hachures, des pointillés et autres textures particulières. C'est assez stupéfiant...
Cependant, je ne sais pas si c'est le flou des images ou à cause d'un effet moiré, mais j'ai eu une migraine au bout de 10 minutes de lecture. Cela étant dit, le thème n'est pas des plus léger non plus....
Au final, que ce soit le scénario ou bien les graphismes, cette BD est assez peu divertissante. Par contre, elle a su me bousculer un peu, m'apprendre deux ou trois choses, me faire réfléchir.
Au fond, comme pour l'effet de chiasme de la couverture, sa lecture est assez...
Incommodante.
Un autre bouquin sensible et intéressant du Cil Vert, dans la veine des BD autobiographiques.
L'auteur y aborde la vie de famille, l'amour... la mort aussi, ainsi que son rapport à la BD.
Beaucoup de choses intéressantes, quoique j'ai préféré un " faux boulot " du même auteur, plus touchant je trouve.
Dans tous les cas, cet album apporte sa pierre à l'édifice... celui du Cil Vert et de la BD de non fiction.
Mon bibliothécaire a des goûts atypiques...
C'est la première chose que je me suis dit, en découvrant une rangée de BD du Cil vert, sur l'étagère "nouveautés" de la médiathèque.
J'ai été intrigué : une BD simple, expressive, immédiate... avec un sujet intéressant : l'accompagnement de personnes handicapées. Et je n'ai pas été déçu.
La narration donne à ce bouquin l'inclination du témoignage. Car, plus que le handicap, ce sont les accompagnateurs eux mêmes qui sont scrutés dans cet ouvrage. Loin de l'héroïsme des BD classiques, ceux-ci ont leurs difficultés, leurs états d'âme... C'est même un « faux boulot » dit sa mère...
Au final, je n'ai pas été déçu par cette découverte. Les graphismes ont le mérite de mettre en valeur une histoire sensible, presque sociologique, qui procure de profondes émotions.
Une BD qui vaut le détour...
Une Carmen Cru sauce anglaise...
...Solitaire, teigneuse et rude en affaires. La vie terne de Cassandra DARKe est finalement bousculée par plusieurs événements, dont l'arrivée de sa belle-fille à ses côtés...
Un thriller rondement mené, avec du suspens, de l'action, des histoires d'amour... ou pas.
Posy Simmonds ne sait pas qu'écrire... elle a aussi un bon coup de crayon.
Ancienne dessinatrice de presse, ses personnages sont expressifs, quoiqu'on puisse parfois les confondre (je pense à Deano et Billy surtout). Elle sait aussi varier son style, avec des tailles de cases, des couleurs, des rendus différents, selon les émotions qu'elle veut nous faire traverser.
Tel un roman illustré, le texte prend beaucoup de place. L'autrice avait illustré des livres pour enfants pendant un temps. Sauf qu'ici le propos est adulte, qu'il y a une succession de cases, des bulles...
En résulte une BD à la forme particulière (c'est vrai aussi pour Gemma Bovary et Tamara Drew), pas facile aux premiers abords, mais qui se révèle terriblement efficace, d'une beauté vraie.
Et cette Cassandra Darke, est-elle si pourrie que ça finalement ?
Un autre coup de génie de Jason Shiga...
Dans ce huit clos, le personnage principal se retrouve coincé dans une cabine téléphonique, ensevelie. Il va devoir faire preuve d'intelligence et de créativité pour s'en sortir.
Le scénario de Jason Shiga est efficace, assez mathématique au départ puis ça s'accélère sur la fin, avec des bouleversements et une fin émouvante.
On retrouve son trait caractéristique, simple mais expressif.
A lire.
BD érotique et autobiographique, qui met en scène les amours des auteurs, Mimi et Toto, blogueurs.
Tout comme les historiettes, les graphismes sont hétéroclites, puisque c'est un ouvrage réalisé à quatre mains. Mais ça rend bien et c'est assez excitant.
Le sujet n'est pas très profond (quoique...), mais c'est divertissant et on rigole un peu.
Une expérience intéressante.
Fante Bukowski est un personnage haut en couleur...
Poète assez lose et à la vie misérable, Fante passe par toutes les émotions. Mais il ne se laisse pas abattre pour autant et on finit par faire appel à lui pour écrire la vie d'une starlette américaine...
L'ambiance un peu crade de cette BD, est bien rendue par le trait gras et relâché de Noah Van Sciver.
Ainsi, Fante Bukowski ne laisse pas indifférent. On se marre, on est triste aussi parfois et puis on cogite, sur ce qui lui arrive, sur la bohème.
A la fois une plongée dans l'Amérique profonde, l'insuccès dans l'art et l'absurdité de la vie.
A lire.
Surpris d'entrée...
par la couverture psychédélique, qui attire l’œil comme un flash, mais aussi par le format à l'italienne, ses cartes et dépliants, son titre intriguant, son lettrage peu commun, son découpage en gaufrier alternatif, son sens de lecture, ses thématiques (drogues, rapport à l'autre), son univers dystopique, ses couleurs chaudes et vives... En résulte un OBDNI (Objet BD Non Identifié), propre aux Comcis Indé.
La stupéfaction passée, le récit de Shaw n'en reste pas moins assez clair et facile à lire : un botaniste excentrique cherche de nouvelles plantes à fumer... L'une d'entre elles a des effets vraiment spéciaux et permet de transcender sa personnalité avec celles des autres.
L'histoire est dynamique, avec des surprises et plusieurs sous-intrigues, impliquant trois autres personnages, qui se rejoignent dans un final un peu déroutant.
Il y a beaucoup de scènes de discussion, mais aussi de l'action, de l'humour... On rentre en PROFONDEUR dans le village de Boney Borough, découvrant les fantasmes des habitants, leurs états d'esprit... et on ne s'ennuie pas. Si les fantaisies de l'auteur sont justifiées par l'intrigue, ça reste souvent assez absurde.
Le scénario a plusieurs sens de lecture : on pourrait penser à une forme d'apologie de la fumette, avec son effet calumet de la paix, mais la nouvelle drogue a aussi des effets secondaires...
Les graphismes, expressifs, variés et tout en maîtrise, tournent souvent autour de la perception des sens (vue, toucher, goût, odorat, ouïe), déformés. Ces détails sensoriels participent à la suspension d'incrédulité, un peu comme dans un rêve éveillé, un trip...
Pour moi, c'est un chef-d’œuvre, plus savoureux encore que Bottomless Belly Button. Au delà de me surprendre, Dash Shaw (drôle de nom...) a su m'immerger dans un monde décalé, où personne ne nous est étranger, puisque l'on ressent ses émotions, ce qu'il pense...
Époustouflant !
Surpris d'entrée...
par la couverture psychédélique, qui attire l’œil comme un flash, mais aussi par le format à l'italienne, ses cartes et dépliants, son titre intriguant, son lettrage peu commun, son découpage en gaufrier alternatif, son sens de lecture, ses thématiques (drogues, rapport à l'autre), son univers dystopique, ses couleurs chaudes et vives... En résulte un OBDNI (Objet BD Non Identifié), propre aux Comcis Indé.
La stupéfaction passée, le récit de Shaw n'en reste pas moins assez clair et facile à lire : un botaniste excentrique cherche de nouvelles plantes à fumer... L'une d'entre elles a des effets vraiment spéciaux et permet de transcender sa personnalité avec celles des autres.
L'histoire est dynamique, avec des surprises et plusieurs sous-intrigues, impliquant trois autres personnages, qui se rejoignent dans un final un peu déroutant.
Il y a beaucoup de scènes de discussion, mais aussi de l'action, de l'humour... On rentre en PROFONDEUR dans le village de Boney Borough, découvrant les fantasmes des habitants, leurs états d'esprit... et on ne s'ennuie pas. Si les fantaisies de l'auteur sont justifiées par l'intrigue, ça reste souvent assez absurde.
Le scénario a plusieurs sens de lecture : on pourrait penser à une forme d'apologie de la fumette, avec son effet calumet de la paix, mais la nouvelle drogue a aussi des effets secondaires...
Les graphismes, expressifs, variés et tout en maîtrise, tournent souvent autour de la perception des sens (vue, toucher, goût, odorat, ouïe), déformés. Ces détails sensoriels participent à la suspension d'incrédulité, un peu comme dans un rêve éveillé, un trip... Pour moi, c'est un chef-d’œuvre, plus savoureux encore que Bottomless Belly Button.
Au delà de me surprendre, Dash Shaw (drôle de nom...) a su m'immerger dans un monde autre, où l'étranger n'a plus lieu d'être puisque l'on ressent ses émotions, ce qu'il pense...
Époustouflant !
Avant Gala...
Premier tome d'une trilogie sur Dali, avec Julie Birmant (scénariste de Pablo...) et Clément Oubrerie (dessinateur de Pablo également, mais aussi d'Aya de Yopougon...).
Une conversation entre Picasso et Paul Eluard, au sujet des ambitions du jeune artiste espagnol, sert d'introduction à l'album. C'est une transition parfaite, entre la série précédente des auteurs, Pablo, et celle-ci sur Dali.
Sans surprise, la lumière est mise sur la jeunesse de Salvador Dali, entre la Catalogne, Madrid puis Paris. On y représente sa relation avec ses amis et camarades des Beaux Arts (Luis Bunuel, Frederico Lorca...), surréalistes également. La sexualité de Dali, ou encore ses bizarreries, sont abordées.
Le trait sensible et tout en décontraction du dessinateur, s'accorde plutôt bien avec ce récit de bohème. Clément Oubrerie a d'ailleurs su adapter son découpage, un peu plus excentrique que d'habitude.
En résulte une BD divertissante, accessible... mais qui ne m'a pas pleinement satisfait.
Indubitablement, les auteurs sont documentés (j'aurais aimé avoir des notes bibliographiques d'ailleurs) et leur récit est immersif, donnant vie au milieu artistique de l'entre-deux-guerres avec force de détails.
Il n'en demeure pas moins que j'ai le sentiment d'être resté un peu en surface. Il manque quelque chose. Peut-être est-ce une faiblesse du genre biographique en BD, qui verse naturellement vers une interprétation fermée et empathique du personnage, trop complexe à comprendre autrement ?
La difficulté était ici de donner du sens à cette première partie sur la jeunesse de Dali, sans en donner une vision anecdotique ou même téléologique. Car il s'agit d'un artiste controversé, dont la vision artistique, tout comme sa vie et ses positions politiques, sont sujets à débats. On serait tenté de voir dans sa jeunesse les causes de son exubérance future.
Or, je n'ai pas totalement compris les raisons de la loufoquerie de Dali, pas assez explicites (peut-être que la mort de son frère sera évoquée dans les prochains tomes ?), ni été convaincu par les évocations de son rapport à l'argent, ou des liens avec son père, sujets traités trop rapidement.
Au final, ce n'était peut-être pas l'intention des auteurs, mais j'ai trouvé ce portrait de Dali un peu trop candide, gentillet. A voir comment la série évolue par la suite...
Ne serait-ce pas une naïveté de façade, qui cache en réalité un appétit insatiable de Dali pour la grandeur, quitte à bousculer le Paris de Notre-Dame ?
Un opus qui prend la forme d'un thriller...
Le lieutenant Blueberry, accompagné de Jimmy Mac Clure et du tueur rescapé, se laisse finalement entraîner à la poursuite de Luckner et de son hypothétique mine. Dans un environnement hostile, les protagonistes doivent aussi faire face à un adversaire invisible : le spectre aux balles d'or.
Jean Giraud a achevé sa mue graphique : il y a dorénavant des hachures partout, soulignant l'intensité des visages mais aussi des décors. Au pinceau, son trait n'en demeure pas moins précis, fouillé, sinueux.
Le découpage est également plus osé : utilisation des cases en « L » de façons variées, incrustation d'un visage ou d'une case par-dessus une autre case, succession de gros plans pour montrer une action précise, fusil qui passe à travers une onomatopée...
Beaucoup plus sombre que le volume précédent, Giraud multiplie également les aplats de noir, pour les ambiances nocturnes ou les ombres. Cela renforce la sensation d'isolement, d'insécurité, de froid... et d'opacité. En contraste avec la nuit, les couleurs chaudes du désert ou de la sierra le jour, parfois à saturation, sont quasi aveuglantes.
Le récit de Charlier est une réussite, encore une fois. La particularité de cet album étant qu'il parvient à nous faire peur : dangers (manque d'eau, Apaches, éboulements, espèces venimeuses...), personnages imprévisibles, adversaire invisible (au départ on voit uniquement ses actions)... et d'aspect physique hors norme, ricanements...
Effrayant.
La chaleur suffocante du désert de Chihuahua...
Ainsi commence ce diptyque. Le lieutenant a été muté à la frontière mexicaine et, en tant que shérif, il doit gérer les troubles causés par un certain Luckner, dans son petit village.
Pour sauver ses miches, Luckner, un « géologue » à l'accent allemand, fait miroiter à Mac Clure le partage d'une mine d'or.
Cette histoire de bonimenteurs est un peu lente à se mettre en place, mais s'accélère au milieu de l'album et reste finalement très plaisante à lire.
Giraud entame également une mue graphique, représentant à merveille le désert et ses désagréments, dans un style plus relâché parfois (planches 30 et 31 notamment).
C'est avec envie qu'on lira la suite...
Quand la folie d'Allister fait rougir, par le feu et par le sang, les collines enneigées du Wyoming...
Dès sa couverture, cette BD a su me happer.
Mémorable, l'album est divisé en deux temps forts : la première partie où l'armée d'Allister traque puis exécute les civils cheyennes, sans ménagement, suivi du retour de flamme, avec la riposte des Cheyennes, alliés aux Sioux et aux Arapahoes.
Le scénario est au moins aussi convaincant que les précédents. En plus des ingrédients habituels (répartie des personnages, embûches...), Charlier nous sert son récit avec une dimension tactique (carte pl. 30), basée sur sa connaissance de l'art de la guerre.
Ici, les tuniques bleues peuvent s'appuyer notamment sur leur force de feu (artillerie), tandis que les « Indiens » les harcèlent par des attaques rapides et répétées. Au cours de l'aventure, chaque camp doit s'adapter à sa situation numérique, favorable ou non.
Malgré les événements graves qui sont relatés ici, Blueberry et ses amis ne manquent pas d'humour, une façon pour eux de survivre dans cette guerre absurde. Mc Clure et Red Neck, complètement saouls au début de l'album, forment un duo sympathique et quasi clownesque. Ce sont de vrais éléments perturbateurs, dans tous les sens du terme.
Blueberry donne également le change, contestant régulièrement les décisions excessives de son supérieur. Face au général « tête jaune », il s'affranchit des règles élémentaires de la discipline militaire. Car Blueberry est un héros rebelle, dont les valeurs humanistes entrent en conflit avec celles de l'armée.
Les graphismes sont toujours aussi efficaces (avec de plus en plus de hachures pour les visages), représentant les différents événements de la guerre avec expressivité. Les nombreuses scènes de bataille dessinées, en font ressentir toute la tension. C'est sûrement l'un des albums les plus crus, depuis le début de la série. La violence y est d'ailleurs de moins en moins suggérée, avec plusieurs scènes de charnier et des tueries en direct.
Dans ce volume tout en contraste, les auteurs confrontent les peaux-rouges aux tuniques bleues, le froid au chaud, la solitude à la multitude, le burlesque au tragique... mais aussi ce qui est juste avec ce qui est inacceptable.
Intense.
La couverture n'évoque rien de précis...
on y voit simplement Blueberry, habillé d'une veste en cuir à franges et brandissant un fusil, une forêt en arrière plan...
La piste des sioux est un album de transition, entre Steelfingers et Général tête jaune, du même cycle. Encore une fois, Blueberry cherche à mettre une fin aux guerres indiennes, alors que les colons le soupçonnent d'avoir volé l'argent de l'Union Pacific.
Ce volume est pauvre en scènes d'action et ce sont essentiellement les discussions entre les personnages qui sont mises en scène. Mais le scénario reste attrayant et l'intrigue assez complexe, presque sociologique, avec quelques coups de théâtre...
Hormis Steelfingers puis Allister, archétype du général ambitieux et cynique, la moralité des personnages est contrastée. D'ailleurs, même les civils peuvent nourrir de sombres desseins... Au contraire, Sitting Bull a un rôle salvateur dans ce tome.
Les diverses ramifications et la profondeur de l'intrigue, donnent du souffle à l'histoire.
La vigueur des dessins et l'audace du cadrage (les plongées/contre-plongées remplaçant peu à peu les plans fixes pour les scènes de dialogues) accentuent également ce dynamisme.
Au final, si La piste des sioux n'est pas particulièrement marquant, il reste intéressant pour sa narration, progressiste, et indispensable pour comprendre l'ensemble du cycle.
Un point tournant dans les scénarios de Blueberry.
Encore un album de grande classe...
Dans L'homme au poing d'acier, Blueberry est chargé de ramener puis d'escorter un train de secours, au camp avancé de l'Union Pacific. Il contient les armes pour se défendre contre les Sioux, ainsi que que les salaires des ouvriers en colère.
Le lieutenant y est confronté à Steelfingers, dans une alliance intéressée avec les Amérindiens de Sitting Bulls. En effet, en bon archétype du brigand de grand chemin, Jethro Diamond nourri le plan de récupérer les 300 000 dollars, convoyés dans le train. Mais rien ne se passera comme prévu...
Encore une fois, le scénario de Charlier tient la route, avec de nombreuses surprises et autres retournements de situation. Il introduit quelques personnages supplémentaires : en particulier la tumultueuse Guffie Palmer.
Les « Indiens » sont mieux mis en avant, notamment lors de leurs tractations avec le crapuleux Steelfingers. Mais ils restent rattachés au camp des méchants.
Dans ce cycle, si ces braves guerriers ne sont pas responsables de la guerre, leur fierté les poussent tout de même à l'entreprendre avec brutalité. Influencés par Jethro, leur côté naïf et primitif contraste avec la crasse modernité des colons blancs. Ainsi, Chalier développe une atmosphère hétéroclite, propre aux western des années 1960.
Les grandes étendues de l'Ouest sont également réalisées avec de plus en plus de finesse. Dans ce cycle, Giraud pousse son art vers l'avant, pour encore plus de réalisme. Ses décors gagnent en profondeur, avec une succession de plans dans la plupart des cases. Les dernières planches sont justes magnifiques et Giraud, en accumulant des cadrages impossibles au cinéma, apporte avec la BD une dimension nouvelle au western.
La narration graphique prend d'ailleurs le pas sur l'écriture. Si les dialogues restent fondamentaux pour l'intrigue et l'ambiance de la série, les vignettes explicatives paraissent parfois désuètes. En effet, le dessin et la mise en page de Giraud sont devenus suffisamment éloquents.
Ainsi, dans la scène finale de l'attaque du train, on passe par tous les états : inquiétude quant au sort des protagonistes, tristesse pour ces hommes tués, surprise, rire et finalement bonheur de voir nos héros s'en sortir.
Une petite pensée pour cette vieille carcasse de Mc Clure, au plongeon désopilant...
Avec Le Cheval de fer, la série ne déraille pas...
...Blueberry reprend son train-train quotidien : deux compagnies de chemin de fer, l'Union Pacific et la Central Pacific, sont en concurrence pour le monopole de la ligne entre l'Atlantique et le Pacifique. Blueberry est appelé par l'Union Pacific, pour les aider face aux Cheyennes et aux perfides transfuges de la Central.
Première impression, on nous ressert la dichotomie classique du mythe américain : les pionniers blancs sont attaqués par les Amérindiens, qui sont en réalité les dindons de la farce. Encore une fois, Blueberry aura bien du mal à faire renverser la vapeur...
Ce constat fait, les dessins et le cadrage restent exceptionnels. Giraud parvient à nous faire ressentir toute la crasse, le tohu-bohu, l'excès de la conquête de l'Ouest.
Les nouveaux personnages introduits par le scénario de Charlier vont dans ce sens : Red Neck, qui guide le lieutenant dans les plaines du Colorado, ou encore Steelfingers, au nom évocateur...
Ainsi, malgré un thème traité de manière un peu archaïque (la vision des colons plutôt que celles des Indiens, pourtant spoliés de leurs terres) et des répétitions par rapport au cycle précédent, le récit reste percutant et les dialogues amusants.
Lu sur le tard...
...cet album reste très sympathique.
La Piste des Navajos conclut le premier cycle de Blueberry.
Notre héros cherche à arrêter par tous les moyens un convoi d'armes, destiné aux Apaches, afin de mettre un terme à la guerre.
On retrouve ici les dessins riches et sublimes de Giraud, qui ne font que s'améliorer, gagnent en assurance et en précision : les visages sont réalisés avec constance, les décors encore plus vivants...
La narration reste claire, avec une colorisation adaptée : les décors de jour sont chaleureux et les scènes de nuit, en bleu, rendent très bien.
Plusieurs scènes ont marqué ma jeunesse : le départ de Crowe poursuivi par Aigle Solitaire, l'escalade de la falaise, la mine, le combat final au tomahawk...
Ainsi, Giraud parvient à transcrire avec brio le scénario de Charlier, bourré d'humour et d'énergie.
Un album d'anthologie.
Première fois que je lis cet album...
...où Blueberry va à la recherche de Graig puis continue sa quête pour faire cesser la guerre.
Mais ce volume accumule les lacunes je trouve.
Il est moins beau que le tome précédent, avec une partie dessinée par Jijé, Giraud étant reparti en Amérique pendant un temps.
Il n'y a pas de grande surprise non plus dans le scénario. Les scènes sont assez classiques : poteaux de torture, pendaison à cheval, Rio Grande, Mexique, sudistes... De plus, mais c'est vrai pour l'ensemble de ce cycle, les Apaches font un peu trop l'effet de sauvages.
C'est assez verbeux. Si c'est une caractéristique des Blueberry et des albums de cette époque, certains dialogues ne sont pas nécessaires : je pense notamment à la planche 11 où l'on nous indique toutes les réflexions de Blueberry... ça casse l'action.
Le point positif, c'est l'arrivée de nouveaux personnages, en particulier Mc Clure, prospecteur et alcoolique notoire (encore un...), impayable sur toute la série. Miss Dickson est aussi la première femme à avoir un peu d'impact dans Blueberry... mais on reste entre hommes globalement.
En résumé, j'ai trouvé plus de défauts, d'archaïsmes, à cette BD que de qualités. Quoiqu'elle reste moderne pour l'époque, il y a des répétitions, un faux rythme et elle est moins crédible que les tomes précédents.
Enfant, j'avais apprécié le cycle sans la lire.
Pas indispensable.
Avec L'Aigle solitaire, l'art de Giraud gagne en maturité.
Des cavaliers remontent la piste du lieutenant et du jeune Stanton. Le garçon sauvé, Blueberry est chargé de mener un convoi à camp-Bowie. La mission est dangereuse, ils vont devoir traverser une zone contrôlée par les Apaches...
Pour la première fois de la série, Blueberry prend les commandes d'un détachement. Il doit faire face aux difficultés d'être à la barre et d'avoir des subordonnés inconstants. Ce nouveau rôle lui donne une nouvelle ampleur, d'autant plus qu'il fait face à un adversaire de grande qualité...
En effet, les personnages secondaires ont beaucoup de profondeur et enrichissent l’œuvre de Giraud et de Charlier. Dans ce volume, on découvre O' Reilly, dans le stéréotype du soiffard irlandais, ou encore le mystérieux Quanah-n'à-qu'un-oeil.
Pour le scénario, on se rapproche de la dichotomie classique : les méchants sont les guerriers Apaches et les gentils les tuniques bleues. Cependant, les choses sont plus complexes. Si les albums précédents nous ont appris que l'armée US est à l'origine de la guerre, Blueberry doit faire son boulot de soldat malgré tout.
Dans la même veine que les tomes précédents, Charlier nous offre un récit plein d'action et de rebondissements, non dénué d'humour. Le milieu de l'album prend l'allure d'une enquête, où Blueberry cherche à comprendre qui sabote ses plans...
Par contre, les graphismes de Giraud sont beaucoup plus aboutis que les deux premiers tomes. Les traits des visages sont plus réguliers, les chapeaux dessinés avec plus de précision... et les décors représentant l'Arizona sont splendides.
Blueberry a pris sa forme définitive : un grand costaud à l'allure désinvolte, souvent mal rasé et coiffé d'une tignasse brune. Il a un nez un peu cassé, une mâchoire carrée et des lèvres plutôt charnues. Le visage d'un gars "qui en a pris plein la gueule" (Moebius).
Surtout, L'Aigle solitaire nous offre des scènes d'anthologie, avec des batailles incroyables. Celles dans le canyon...
Épique.
La couverture signée Gir est pleine de promesses.
Après le coup fourré du major Bascom (authentique), Cochise continue de rassembler les Apaches, pour encercler Fort Navajo et récupérer les autres chefs amérindiens, faits prisonniers.
Cet album donne aussi plus d'ampleur au personnage de Crowe, un sang-mêlé qui finit par changer de bord, après avoir été humilié par Bascom.
Dans ce tome 2, on retrouve l'influence des western classiques, Blueberry devant se battre à plusieurs reprises contre les Amérindiens.
Les graphismes de Jean Giraud, épaulé par Jijé sur ce tome, sont dans la continuité du premier volume et manquent toujours de régularité. Par exemple, le visage de Blueberry prend des formes multiples : parfois hideux (dernière case de la pl. 8) ou copie conforme de Belmondo (milieu pl. 15), il devient même un peu distordu ou longiforme sous le pinceau de Jijé.
Enfant, si j'avais eu du mal à distinguer Blueberry de Crowe (pl. 9) et que j'avais remarqué certaines bizarreries. J’avais tout de même pris du plaisir à lire l'album. Je ne m'étais pas rendu compte non plus que le passage dans la ville fantôme avait été réalisé par un autre dessinateur (Giraud étant parti au Mexique à ce moment là), ce qui témoigne de la proximité de style avec Jijé à cette époque.
Car, le récit reste toujours aussi prenant, avec des moments de suspens, des surprises et plus d'action encore que dans le premier tome. Néanmoins, le récit prend une tournure plus grave, il y a moins d'humour. On peut parfois questionner l'héroïsme de Blueberry, dont le rôle m'a moins marqué dans cet album que celui de Crowe, qui doit faire face à des choix difficiles.
Cependant, Blueberry reste l'homme fort de la série, usant de stratagèmes pour affronter seul, ou avec l'aide d'un grand-père, les Amérindiens. La scène à Tucson est particulièrement marquante (celle de la couverture) et illustre parfaitement l'adage « le calme avant la tempête ».
Ainsi, malgré ses défauts, Tonnerre à l'ouest reste un album marquant de la série.
Le classique de la BD Western...
...par Jean-Michel Charlier et Jean Giraud, dans le sillage de Joseph Gillain (Jerry Spring), qui signe d'ailleurs la couverture de ce premier album.
On y découvre la personnalité de Blueberry. C'est un soldat courageux, as de la gâchette et charmeur... mais terriblement tricheur et indiscipliné. Redresseur de torts, c'est un héros plein de relief, qu'on rêvait d'être gamin. Il contraste avec son homologue, le lieutenant Graig, brave mais un peu naïf et snob.
On retrouve les thèmes de la mythologie de l'Ouest : poker, saloon, Apaches, tuniques bleues etc. Mais Charlier sort de la dichotomie des western classiques : les bons et les méchants ne sont pas toujours faciles à identifier. Ici les Apaches, qui auraient attaqué une ferme, semblent être accusés un peu vite. Surtout, les tuniques bleues peuvent faire preuve de plus de cruauté encore, lorsque Bascom ordonne d'attaquer un convoi de femmes et d'enfants par exemple.
L'ensemble est bien rythmé, alternant entre action et humour. Les dialogues sont crédibles. Le scénario est captivant, jouant sur les situations d'injustice ou la tension de Fort Navajo, encerclé par les Apaches.
Consensuel, le découpage n'en est pas moins maîtrisé : succession de plans rapprochés pour les dialogues, cadrage panoramique pour les cavalcades de Blueberry, utilisation des contre-plongées pour rendre plus sensibles les scènes d'action...
Enfin, le trait de Gir est plein de vie. Formé par Jijé, il dessine de manière assez détaillée personnages et décors, sans nuire à la lisibilité des scènes. Les couleurs de Poppé, chaleureuses et tout en contraste, permettent d'ailleurs de faciliter la compréhension de l'action.
Il subsiste cependant des imperfections, notamment dans la régularité des visages. Mais on ressent tout de même les spécificités du trait de Moebius, fourni, anguleux et avec beaucoup d'aplats de couleur noire pour cette série. Les personnages sont particulièrement expressifs, on pense notamment au lieutenant Graig ou à Blueberry, lorsqu'ils font une moue gênée.
En contexte, Fort Navajo était une BD moderne et haletante, rompant avec les classiques hollywoodiens. Retro, elle reste agréable à lire et nous replonge en enfance.
Une œuvre fondatrice, qui en a inspiré plus d'un.
Une belle lecture.
Dans ce récit fictionnel, l'auteur aborde l'histoire de passeurs kurdes, transportant de la marchandise de contrebande vers l'Iran.
Iranien, Mana Neyestani connaît bien le contexte du pays. Il y était dessinateur de presse, jusqu'à son incarcération pour un dessin humoristique en 2006, qui a provoqué son départ en exil.
Le principal point fort de cette BD, c'est son scénario. On sent que l'auteur connaît son sujet : le récit est bien ficelé, avec des sujets forts (violences sociétales, ségrégation des Kurdes, frontières, dictature iranienne, inégalités et pauvreté...), des dialogues crédibles, des surprises... et une tension qui monte crescendo. La fin est particulièrement émouvante.
En débutant ma lecture, je trouvais les dessins un peu pauvres, ce qui n'était pas sans rappeler la condition des personnages eux mêmes d'ailleurs. Mais la proposition graphique, de Mana Neyestani, a fini par me convaincre : le découpage est efficace, son trait est expressif et il y a de belles idées, comme le tapis tissé peu à peu par Rojan, qui sert de transition aux chapitres. La couleur est rare, mais elle trouve quand même sa place dans le récit.
De cette manière, on est immergé petit à petit, pour finir par ressentir les émotions des personnages et frisonner à la vue des péripéties qu'ils traversent.
Enfin, Les oiseaux de papier est une BD qui invite à la méditation. On pourrait débattre des heures durant sur les thèmes du livre, comme la frontière iranienne par exemple : autant abstraite et injuste pour les Kurdes... qu'elle n'est un instrument de pouvoir et de répression pour l’État Iranien ; qui attire (pour la contrebande) et qui repousse (à cause des soldats, des mines...).
Pour conclure, que vous aimiez les récits d'aventure ou la BD du réelle, les thématiques sensibles ou la camaraderie virile, ce livre devrait vous plaire...
Tant que vous n'êtes pas iconoclaste.
Je suis tombé sur cette BD par hasard... et c'est une belle découverte.
L'autrice Yudori raconte l'histoire fictive d'une jeune femme, Amélie, vivant aux Provinces Unies, lors de la première mondialisation. Elle est mariée à un marchand, qui ramène de ses voyages une belle esclave asiatique...
Ce manwha a su me surprendre à maints égards :
Malgré une profusion de thématiques (amour, sexe, beauté, religion, travail, émancipation, exotisme, inventions, histoire de l'art, chat...), la narration (alignée essentiellement sur Amélie) est très fluide.
Sans faire œuvre d'Histoire et malgré le point de vue particulier de l'autrice, le récit parvient à nous immerger dans un Pays-Bas renaissant, grâce à des évocations efficaces.
L'esthétisme, un peu efféminé, m'a étrangement plu. Éclectique, l'autrice a su jouer avec les codes de l'art oriental (shojo/josei) et occidental (Vermeer, Vinci), avec du nouveau et de l'ancien.
Au final, une BD qui pousse les frontières de l'espace et du temps, pour nous offrir une saga féminine engagée. Saisissant !
Une BD sympathique, bien fichue, dans l'air du temps.
Les graphismes sont convaincants et le découpage dynamique.
Accessible et agréable à lire.
Toujours aussi bien Aya !
Les dialogues de Marguerite Abouet sont toujours aussi vivants, avec de nouveaux proverbes ivoiriens (ou d'ailleurs). La recette du scénario reste à peu près la même : il y a des thèmes forts et l'intrigue des personnages, entre France et Côte d'Ivoire, évolue, avec son lot de surprises.
Le trait relâché, de Clément Oubrerie, sert toujours aussi bien le récit, avec des couleurs chatoyantes. Aya et ses amies sont toujours aussi belles et pleines de personnalité.
Le découpage ne change pas non plus : contours irréguliers et 3x2 cases, sauf lors des moments clés.
C'est à la fois un plaisir de retrouver cette série plein d'amour et de voir comme évolue la vie des personnages, que l'on connaît depuis longtemps maintenant. On attend la suite avec impatience !
La couverture donne le ton : The nice House on the Lake est un thriller distordu, entre deux mondes.
Les graphismes sont puissants et novateurs (mouvements saccadés, couleurs hallucinantes, découpage osé etc.) et accompagnent efficacement le récit.
Dans cette histoire, assez bizarre, on s'ennuie peu. Au départ l'enjeu n'est pas clair : il ne s'agit pas de survivre comme dans tout classique de l'horreur. Mais, petit à petit, les personnages (avec le lecteur) comprennent les règles du monde qui les entoure, et certains se rendent compte qu'ils ont perdu la mémoire... De plus, les rôles sont inversés, celui qui semble être le méchant a de l'empathie, est séduisant, semble vouloir les aider...
Surtout, cette BD a réussi à m'effrayer : un petit bijou que je vous laisse découvrir...
Première impression : c'est beau, très beau ! Les graphismes de l'autrice sont fouillés et elle nous met quelques claques (scènes de téléportation notamment). Les couleurs, très vives, sont assez belles. Mais je trouve que leur aspect numérique gâche un peu. Il y a aussi une forme d'avant-gardisme : je reste marqué par cette représentation d'une femme qui fait un pipi nature, assez rare dans les représentations graphiques.
Deuxième impression : c'est grossier et pas facile à comprendre. En effet, la juxtaposition de la narration externe avec les dialogues s'avère compliquée à suivre et il y a trop de violence verbale, souvent gratuite. Le design des personnages/objets est parfois un peu ridicule (trop avant-gardiste ?) et me sort du récit (après c'était pas facile, j'avais pas lu tous les tomes...). Les cliffhangers réguliers rajoutent un peu de piment, mais je reste sur ma faim.
Au final, cette BD n'est toujours pas ma came, je lui préfère un bon vieux Aya de Yopougon par exemple.
Je connais les BD de Berberian depuis petit et je dois avouer que je n'ai jamais accroché.
Mais je me suis tout de même lancé dans cette BD, sorte de biographie de l'auteur, qui raconte son enfance au Proche-Orient.
Première impression : graphiquement c'est le chaos ! On en voit littéralement de toutes les couleurs, avec des styles graphiques aussi divers que ne l'est la BD du réelle (photos, stylo, aquarelle, encres etc.) et un découpage explosif. On retrouve cependant le trait, entre élégance et gros nez, de Berberian.
Ce patchwork graphique n'est pas sans faire penser à la vie cosmopolite de l'auteur, ainsi qu'au désordre qui règne au Liban.
Mais, pour les mêmes raisons, l'ensemble est difficile à lire, trop décousu.
Si ce retour aux racines pourrait susciter de l'empathie et que j'admets avoir passé quelques bons moments, avec des passages touchants, je ne suis pas convaincu.
J'ai trop l'impression d'avoir affaire à une BD de l'intelligentsia parisienne.
De plus, cette BD fait pâle figure par rapport à la puissance d'un L'Arabe du futur ou même de la pédagogie d'un bon professeur. Berberian, qui était un auteur innovant à une époque, a ici un cran de retard.
Au final, je n'accroche toujours pas à ses BD.
Je me suis lancé dans cette série avec un a-priori négatif. En effet, j'avais vu beaucoup de publicités pour les 5 Terres sur les sites spécialisés, mais peu d'articles sérieux, ni de récompense (aucune sélection au FIBD etc.). En d'autres termes, je voyais ça uniquement comme un succès commercial. QUE NENNI !
Cette BD est une pièce d'orfèvrerie, comme on en voit rarement en heroic-fantasy. J'ai accroché dès le premier tome et lu (très) rapidement les albums suivants (cycles 1 et 2).
Cette série BD est tout aussi addictive qu'un Game of Thrones. Les personnages y luttent pour le contrôle du pouvoir, avec des retournements de situation brutaux (au moins un à chaque fin de tome globalement) : inutile de s'y attacher trop...
Les protagonistes sont anthropomorphes et, ça tombe bien, je suis fan de ce type de BD depuis longtemps. Les 5 terres sont ainsi dominées par 5 grandes familles d'animaux, aux traits humains et avec une variété d'espèces : félins, singes, lézards, ours et cervidés. C'est mignon, un peu fantaisiste, ça fait appel à l'animal qu'il y a en nous... et en même temps ça permet de faire des intrigues, avec des sous-factions (lions contre tigres etc.). Si on peut comparer les 5 Terres avec Blacksad, l'anthropomorphisme y prend une tournure un peu différente. Dans les 5 Terres, le ton est moins satyrique et les sujets controversés plus rares (tout de même homosexualité dans le cycle 1, matriarcat dans le cycle 2 etc.). Surtout, si la personnalité de chaque personnage repose sur un archétype, ces représentations animales peuvent être contrariées, en particulier par des alliances contre-nature, surprenantes.
L'univers, élaboré par Andoryss, est consistant et les nombreux personnages, imaginés par Didier Poli, ont un graphisme et une psychologie fouillés. Cela a contribué grandement à mon immersion.
Car, pour les 5 Terres, l'éditeur et ses auteurs ont vu grand : ce n'est pas moins de 3 scénaristes, 1 character designer, 1 dessinateur et autres encreurs, coloristes et lettreur... qui ont contribué à ce blockbuster.
Selon les termes de David Chauvel, ceux-ci travaillent à un « train d'enfer » : en effet, ils ont prévu de sortir près de 3 tomes par an. Ils n'hésitent pas à se chamailler sur le scénario et à refaire maintes fois le découpage s'il le faut. De cette manière, on peut rapidement lire la suite, mais la qualité reste là.
Les planches sont dynamiques, avec un découpage caractéristique, à la manière des 7 voleurs ou de Wollodrin auparavant : successions de plans rapprochés, cases à bords perdus ou pleine/double-page pour les panoramas... Ainsi, les auteurs nous font voyager dans leur monde, donnent vie aux personnages et à leurs relations avec les autres, recentrent notre attention sur les éléments de l'intrigue, qui vont les déchirer.
Il y a quelques (rares) scènes de baston.
Mais, la plupart du temps, les personnages discutent, manigancent. C'est donc assez verbeux et il peut y avoir des lenteurs. En même temps, la narration est très dense et on reste tenu en haleine par les différentes intrigues politiques. Globalement, ça se tient.
Les décors de Lereculey sont somptueux et que dire de son trait... toujours aussi talentueux pour dessiner des bestioles. On ressent les émotions, intenses, que traversent les personnages.
Les couleurs de Martinos sont tout autant réussies et l'ensemble témoigne d'une bonne synergie dans le groupe.
Enfin, que dire de la régularité des artistes... si ce n'est que j'attends avec impatience le cycle 3, que j'espère aussi bon que les précédents !
Pour Océan Express, François Ayroles peaufine sa narration en miroir. Avec cet ingénieux procédé, il parvient à raconter les déboires de deux jeunes gens, dans une station balnéaire à l'allure générique : l'héroïne sur les pages de gauche et le héros sur les pages de droite. Mêlant les stéréotypes de genre, on peut ainsi comparer, de manière amusante, la façon dont se débrouillent les deux personnages.
Ceci étant dit, j'ai rapidement éprouvé une sensation de mal à l'aise en lisant cette BD. La monotonie du gaufrier en 3x3 cases et des ombrages bleus, entrent en dissonance avec la chaleur estivale attendue. Car les héros ne passent pas non plus un bon moment... D'ailleurs ceux-ci se ressemblent énormément. Ils ont un caractère lisse et trop gentil, quoique leurs choix sont différents... Au contraire, les personnages secondaires sont durs et antipathiques... sauf le chien. Dans ce registre, quitte à être caricatural, j'ai préféré Qui a tué l'idiot ? de Dumontheuil. J'ai également été gêné par le manque d'identité des lieux : à la fois partout et nulle part. Enfin, si le trait de François Ayroles est expressif, dans la à-peu-près-droite ligne des auteurs de l'Association, je ne le trouve pas excessivement beau.
J'ai quand même eu envie de lire cette BD jusqu'au bout, pour voir si les deux personnages principaux allaient finalement se rencontrer. Pour cela, j'admire le talent de l'auteur, qui sait nous frustrer jusqu'au bout et croise les intrigues, de façon assez ludique. En ce sens, je ne peux m'empêcher de penser au jeu Micro Macro, où l'on rencontre des gens peu recommandables à chaque coin de rue. Enfin, les mises en page qui sortent du gaufrier classique font beaucoup de bien et ont vrai rôle narratif... Mais elles sont fort rares.
Au final, si certains des aspects de cette BD sont surprenants et géniaux, je n'ai pas été véritablement emballé. Le scénario, un peu trop urbano-centré à mon goût, est un peu déprimant. C'est dommage, parce que l'on aurait pu y voir une critique intéressante, quoique sévère, de notre rapport aux voisins, aux touristes, aux étrangers... . Je n'ai pas ri aux gags, alors que l'ambiance de ce roman graphique, à la Monsieur Hulot, s'y prêtait bien. Les graphismes ne m'ont pas plus convaincus. Dans le même thème, j'ai préféré un Café de la plage, au style plus personnel et tranchant.
Néanmoins, le bouquin vaut le détour, pour se faire une idée.
Monstres est un roman graphique épais... mais j'ai été intrigué dès la couverture : on y observe une figure monstrueuse, torturée, avec un drapeau US posé ridiculement dans l'oreille.
Après avoir lu quelques pages, j'ai accroché et je suis allé jusqu'au bout de l'ouvrage. J'ai eu envie de comprendre ce qui est arrivé à ce personnage, mélange de Hulk/Frankenstein/Captain America.
L'auteur a un trait d'une grande dextérité et les personnages alternent entre le beau et l'horrible, propres à émouvoir. Tout est en noir et blanc, avec des ombrages hachurés caractéristiques.
Le découpage est efficace, varié et bien rythmé.
Les dialogues sont d'une grande réussite. (c'est pas si courant)
Le récit est tout aussi bien pensé, mélangeant des genres différents, autour du fantastique. La longueur du récit a permis à l'auteur de développer ses différentes intrigues et de dresser un portrait psychologique profond des personnages.
Ainsi, sans être ultra novateur et s'inspirant allègrement de l'héritage Comics, Barry Windsor-Smith a su trouver l'alchimie parfaite pour raconter cette histoire de Monstres.
Cette couleur... C'est ce qui m'a marqué dans l'album. Il vaut le coup d’œil juste pour ça. Les aplats de couleur de Peeters, intenses, presque à saturation, créent une ambiance particulière, dérangeante. Ce graphisme sied bien aux mafieux et autres psychopathes du récit de Lehman. Particulièrement expressive, la couleur relègue le trait épais du dessin et les dialogues, au second plan ! Elle est ainsi au cœur de la narration.
Cependant, j'ai trouvé moins pertinente cette colorisation pour les parties plus lentes de l'album, qui sont d'ailleurs majoritaires, où les enquêteurs discutent entre eux pas exemple.
J'ai donc pris du plaisir à suivre les scènes d'action ou celles avec la mafia de Saint-Elme, mais je me suis un peu ennuyé pendant le reste du récit.
Les déboires de Spoogue continuent dans ce tome 3. Le récit est agrémenté de nouveaux personnages, en particulier des barbares très... hmm... barbares... et monstres (j’aime beaucoup le design de ce rocher vivant). Il y a aussi de nombreux effets magiques grotesques, que je vous laisse découvrir.
J’ai apprécié le retour des scènes enneigées, comme sur la couverture, la plus réussie de la trilogie. Les dessins, dans la même veine caricaturale que les tomes précédents, prêtent toujours à rire. Comme pour le tome 2, les détails marrants sont plus rares... mais il y en a encore quelques uns dans les plans larges, panoramiques.
Je n’ai pas été déçu par la fin du volume. Certes, elle clôt la série de manière abrupte, mais convient au ton trash de la trilogie. D'autre part, si Delcourt à mis un terme à sa collaboration avec Milhiet... Je rêve toujours d’un autre tome de cet auteur atypique.
Dans ce tome 2, on continue d'aller de surprise en surprise, en particulier avec l’apparition de nouveaux monstres (voir planche 35, monstre qui fait penser au film d’animaton Le voyage de Chihiro et qui permet d’accélérer le récit). Le style graphique de Milhiet a gagné en maturité, quoique les scènes enneigées ou macabres (référence au conte cauchemardesque de Burton) m'ont un peu manquées.
L’auteur a aussi recentré sa narration. C’est pourquoi les petits détails amusants, sans lien direct avec la narration, sont plus rares. Ce qui m’a un peu déçu. Peut-être est-ce aussi une question de délais, plus courts pour le tome 2 ? Quelques détails rigolos sont à se mettre sous la dent tout de même, en particulier dans le lupanar... grivois bien entendu...
En définitif, j’ai encore passé un bon moment avec ce tome 2 de Spoogue. J’étais très heureux à l’époque qu’il y ait une suite.
Après avoir vu sa sélection au FIBD 2024, je me suis procuré cette BD, en espérant passer un bon moment de lecture. J’en sors un peu mitigé.
Certes, le contexte d’écriture de l’oeuvre est intéressant : l’auteur s’est appuyé sur des notes transmises par sa mère pour les raconter en BD. Ses thématiques sont tout aussi peu communes : les relations amoureuses compliquées d’une femme coréenne d’âge mure, sa vie quotidienne etc.
Mais, j’ai eu du mal à adhérer aux graphismes de l’auteur (un trait fin, quoique cassant, des décors épurés), mal servis par un lettrage trop rond, ainsi qu’à son découpage, assez redondant. Quelques scènes se démarquent graphiquement du reste de l’ouvrage, ce qui accentue leur puissance émotive : scènes de crêpage de chignon, très expressives pour le coup, scène de flashback, lavage d’urinoir, conflit social etc.
J’ai un sentiment tout aussi contrasté pour la narration. Les scène de la vie de So-Yeon Lee sont assez rébarbatifs : j’ai peu d’empathie pour ces récits de commérages et autres tromperies. Si ça reflète l’histoire du personnage principal, c’est peu plaisant à lire et l’ensemble est assez décousu. Je me suis senti plus impliqué à partir du milieu du livre, lorsqu’on aborde enfin le conflit de So-Yeon Lee avec une autre femme (je vous laisse découvrir la raison), à la fois dramatique et un peu absurde.
En résumé, si les thématiques abordées par ce roman graphique sont fortes et inédites, qu’il y a de belles scènes, l’ensemble ne m’a pas convaincu. Vous voulez entrer dans la tête d’une femme de ménage corréenne ? Lisez-le ! Vous cherchez plutôt un ouvrage à l’efficacité d’un Maus ou d’un L’Arabe du futur ? Passez votre chemin !
Dès la couverture, le premier volume de Spoogue a su attiser ma curiosité.
Mais, tout d'abord, c'est quoi « Spoogue » ? Spoogue c'est le nom du fossoyeur d’un village, dans le royaume de « Kloug ». Lui et l’univers médiéval dans lequel il évolue, complètement déjanté et assez grotesque, ont été imaginés par l’auteur multi-tâches Olivier Milhiet. Une parodie d'heroic-fantasy en somme.
On découvre rapidement le style d'Olivier Milhiet : noms farfelus, bulles stylisées, détails cocasses... Les personnages sont caricaturaux, pleins de vices, mais leurs laideur les rend presque attachants.
A l’instar d’un autre Olivier célèbre de la BD... Milhiet travaille en couleur directe. Il associe l'encre à l'aquarelle, pour les décors en arrière plan notamment, et à la peinture acrylique, du meilleur effet pour la magie.
La planche 35 illustre la virtuosité de ce bédéiste : l'arrogance de Bourak, qui se croît surpuissant avec le marteau qu’il vient d’invoquer ; la lâcheté des diablotins, qui prennent la poudre d’escampette ; et la corruption des inquisiteurs, qui s’interrogent sur l’orthodoxie de leur chef, prêtent à rire. Le décor enneigé, entre la « forêt d’Astoupek » et le « cimetière Balthazar », n'est pas sans faire penser au film L'étrange noël de Mr Jack, dont s'est inspiré Olivier Milhiet. Il joue sur les empreintes, celles des pas dans la neige ou du marteau, qui a cloué au sol le pauvre démon, ainsi que sur les ombres. Fonctionnant à la manière de vases communicants, ces détails alimentent la logique du récit et contribuent à la suspension d'incrédulité.
Le découpage de Milhiet, dans la veine franco-belge, est tout autant efficace, avec une variété d’angles de vues.
Mais, le vrai plaisir dans Spoogue, c’est de chercher tous les petits détails semés par l’auteur dans ses planches... Un peu comme un Où est Charlie pour adultes. En voici un petit florilège : stalactites sous le pont, qui tombent au passage d'une charrette ; trace d'un vautour sur la neige, qui s'est mal réceptionné sur le toit ; enfant en laisse, qui finit par s'échapper ; la main du barbare, qui enfle de case en case, après s'être cogné avec un marteau ; une fresque sur un mur, qui retrace la répression paysanne menée par le roi de Kloug ; une statue d'un saint inquisiteur, à la limite du SM ; un zombi à la main baladeuse ; la collection de têtes de monstres chassées par le roi ; un manteau en fourrure de marsupilami ; les scènes aux fenêtres etc. Ce foisonnement de détails, qui évoluent durant le récit, donne de la profondeur à l’univers de Spoogue, le rend plus vivant.
L'humour de Milhiet n’est peut-être pas pour tout le monde : souvent un peu gore (à la Kroc le Bô ou même Spoon et White dans un autre registre) et parfois puéril, comme l'était aussi le théâtre d'Aristophane. Mais Milhiet exprime son art avec une grande sincérité, sans censure. Il exploite pleinement l'ambiance macabre du cimetière, avec des jeux de mots comme « Sapin pour tout le monde », lors de l'offensive des zombis.
Spoogue, c’est aussi une BD un peu punk, gothique. Par contre, elle N'EST PAS :
• de la branlette intellectuelle
• mainstream
• un exutoire pour taper sur des minorités
• réalisée par un auteur du star système BD
• plein de femmes canons
• de droite
Au final, le premier album d’Olivier Milhiet, réalisé en deux ans (1999-2001), est déjà un petit chef-d’œuvre. Il se démarque de la mode naissante des romans graphiques ou des BD d’inspiration étrangère. Empreinte de la contre-culture bédéesque, elle est divertissante, drôle. Le style est personnel, touchant et on ne se lasse pas de la relire. Les graphismes d'Olivier Milhiet sont inimitables, faisant du beau avec du laid, et son scénario est une critique non voilée du fanatisme religieux et de l’ambition démesurée des hommes. Que peut-on attendre de mieux ?
Cette BD est une drogue dure... que l'on ne peut lâcher, avant de l'avoir lue jusqu'au bout.
Heureusement, elle ne m'a laissée que peu de séquelles, si ce n'est un goût de reviens-y et sans compter la fatigue, dû à une longue nuit de lecture.
Je n'ai qu'une hâte, lire le deuxième tome ! Je NE PEUX ATTENDRE la suite du récit de Jean-Michel, je VEUX me délecter du trait sublime de Mezzo...
Finalement, je commence à ressentir quelques effets secondez f fpe zefnM........................................................
Je viens de lire le tome 1 de The Fable, un assassin contraint de se mettre au vert.
La mise en scène est bien fichue, quoique un récit sur un tueur... cela n'a rien d'inédit et peut donner un peu la nausée... L'humour est un peu débile, mais on rigole tout de même. Il n'y a qu'à voir la couverture...
Rien à redire sur les graphismes, assez classiques, qui servent bien le propos de ce seinen humoristique et plein d'énergie.
En tout cas, j'ai lu ce volume 1 d'une traite et l'auteur a su me captiver. Mais, je me suis plus franchement marré avec un Slam Dunk par exemple. La thématique du tueur m'a un peu refroidie également...
Le tome 3 d'Evol nous emporte dans un univers dystopique, où de jeunes mutants sont pris à partie par des super-héros fascisants.
L'histoire est prenante et le manga se lit d'une traite. Je n'avais pourtant pas lu les deux tomes précédents. Sans être inédit, le scénario est suffisamment complexe et profond pour nous tenir en haleine. Il interroge notamment les notions de bien et de mal, les catégories de super-héros/super-vilains etc. Tout ça dans un univers un peu punk, underground.
Surtout, le trait précis et épuré de Kaneko, plus proche d'un Comics de Burns que d'un seinen classique, contribue au réalisme du récit et donc à notre immersion. Les scènes d'action sont magnifiques et pleines d'énergie.
En définitif, sans être un coup de cœur, Evol 3 a su me divertir de bout en bout et a pu m'ébahir. Je ne peux que conseiller sa lecture.
J'ai beaucoup aimé cette BD... ou plutôt, j'ai été marqué par une partie de la BD.
La première partie sur la vie d'enfant soldat en RDC est bouleversante, portée par des graphismes spectaculaires : personnages longiformes, qui s'affranchissent parfois des frontières classiques des cases. La couverture est d'ailleurs un petit bijou de BD : le héros a des étoiles plein la tête alors que la savane lui tatoue le corps.
Cependant, je trouve que le récit s’essouffle à partir du milieu de la BD. Des éléments fantastiques m'ont sorti du réalisme initial de la BD. Je ne suis pas non plus convaincu par la profusion de thématiques dans un même album (j'en dis pas plus, je ne veux pas vous spolier). De plus, certaines thématiques sont abordées de manière superficielle, ce qui peut être un peu frustrant voir ennuyeux.
L'ensemble reste cependant intéressant et je ne peux que conseiller la lecture de cet album.
La couverture m'avait donné envie de le lire. Mais j'ai assez vite décroché. C'est un roman graphique bien épais, un peu exigeant.
L'histoire, qui raconte la vie quotidienne d'un réalisateur plutôt paumé, ne m'a pas intéressée. Les personnages principaux m'ont plus rebuté qu'autre chose. De même pour les graphismes, un trait simple et un peu gras, en noir et blanc la plupart du temps. Si les dessins sont assez expressifs, avec un esthétisme un peu underground et assez fouillé, ils ne m'ont pas accrochés pour autant.
J'ai délaissé ce comics "indé", qui semblait pourtant avoir des qualités, pour aller lire un épisode de Sillage, bien plus agréable à lire.
Nine Antico raconte trois histoires de femmes, dans la société bigote d'Italie méridionale.
Après une première lecture, c'est la dernière histoire, celle de Rosalia, qui témoigne contre la mafia, qui m'a le plus touchée. Une deuxième lecture est nécessaire pour comprendre les autres nouvelles.
Le trait contrasté de l'autrice, gras pour les décors, mais délicat pour les visages des héroïnes, contribue à nous transporter dans cet univers, machiste et sombre.
Cependant, je n'ai pas été immergé complètement dans ces récits, assez complexes. La narration et le découpage ne m'ont pas permis de me faire une idée précise du déroulement des faits, ni d'en comprendre véritablement les structures. La variation entre des parties réalistes et d'autres plus fantastiques, comportant des zones d'ombre, m'ont surpris sans me convaincre.
Dans un autre registre, j'ai été plus profondément marqué par le reportage filmé sur le maxi procès de Palerme, auquel fait référence l'ouvrage, ou encore par la BD d'Ulli Lust, qui m'a réellement bouleversée.
Néanmoins, c'est un bouquin intéressant et Nine Antico sait transmette des émotions au travers de son style graphique, qui se différencie nettement d'autres autrices, comme Catel ou Bagieu par exemple.