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Un portrait du crépuscule d'une dictature africaine qui pourrait se dérouler dans n'importe quelle république autoritaire et dictatoriale, même s'il est évident qu'il s'agit du Congo.
Des dessins à première vue naïfs mais qui arrivent à véhiculer des émotions malgré leurs apparentes simplicités. On s'attache rapidement aux protagonistes qui existent dès le début de cette tragédie.
Niveau scénaristique, on est surpris à plusieurs reprises par les tournures très habilement amenées de cette histoire.
Tantôt symbolique, tantôt mystique, cet ouvrage se lit comme un thriller. Un thriller politique dans une ambiance révolutionnaire et anarchique comme l'Afrique subsaharienne en a le secret.
Une très belle réussite.
« Quand Phèdre rencontre Mobutu »
Plongé au cœur de la forêt équatoriale, on découvre dans cet album un surprenant complexe, où se déroule l'action de ce huit-clos. C’est le palais d’un dictateur déchu, T'zée, où réside encore une partie de ses proches (son fils Hippolyte, dont le nom est tiré de la pièce de théâtre antique, et sa deuxième femme Bobbi, protagonistes principaux de l’histoire, que l'on retrouve sur la couverture). Comme l’antique Mycènes, le palace est voué aux gémonies.
Appollo, au nom à consonance mythologique, est aussi un scénariste qui connait l'Afrique et en particulier le Congo, pour y avoir lui même vécu. Ses personnages, inspirés notamment de Mobutu (dictateur à la tête de la RDC entre 1965 et 1997, ayant fomenté un coup d’État avec l'aide de la CIA contre Lumumba... ce dernier étant érigé plus tard en héros national par le même Mobutu, qui l’avait pourtant fait assassiner...) et de sa famille, sont crédibles.
Brüno, dessinateur chevronné (on connait bien son Tyler Cross, mais je vous conseille également son Nemo ainsi que sa BD sur l’american sniper, qui a une saveur toute particulière...), adulé pour sa ligne claire, aussi saisissante que moderne, illustre avec élégance et poésie l’entre-soi de cette élite. On y ressent le simulacre d'opulence, la décontraction feinte, mais aussi une tension accrue, entraînée par la chute du patriarche. Car, peu à peu, la population se révolte contre le dictateur affaibli, se souvenant de ses crimes...
Outre ses ressorts dramatiques, le récit, pensé à la façon d’une tragédie grecque, contient une forme d'allégresse, une musicalité toute africaine. En effet, les auteurs ont su jouer de différents dualismes, sise entre deux cultures, mais aussi entre mythe et réalité, traditions et modernité, passion et amour-vide, animalité et valeurs humaines, violence déchirante et calme plat... et enfin ils opposent un certain processus de décolonisation (T'Zée cherchant à faire de son pays une puissance indépendante) aux soubresauts coloniaux (la France de Versailles restant un modèle pour un T'Zée kleptocrate et mégalomane, malgré l’arrivé de nouvelles influences comme la Chine...).
Parfois un peu décontenancé, notamment lorsque j'ai compris que Mobutu était comparé au héros Thésée (roi unificateur et bâtisseur), en particulier pour sa face obscure (il tue son fils à cause d’un amour interdit avec sa femme)... C’est plutôt le réalisme historique de cette œuvre, inspirée de documentaires sur le Zaïre/RDC, qui m’a bluffé. Appollo maîtrise cependant le genre de la tragédie grecque, qu'il étudie avec ses élèves de lycée à Saint-Denis de la Réunion. Finalement, le trait épais et aéré de Brüno, vivifié par les couleurs de Laurence Croix, donne toute son énergie à cette BD, participant pleinement à la fameuse suspension d'incrédulité.
A lire !
Quand je pense à l'Afrique, je ne peux que tomber amoureux de la savane et de ses animaux sauvages dans une biodiversité importante. Nous avons là le berceau de l'Humanité il y a 3 millions d'années.
Cependant, ce continent évoque également pour moi la corruption et la dictature à un niveau presque inégalé. Mise à part une ou deux démocraties, c'est tout le continent qui est gangrené par ce mal privant le peuple de bien-être.
Bien sûr, il y a eu les ravages de la colonisation. Malgré ce terrible passé, ce continent aurait dû véritablement décoller surtout au vu des richesses de son sol. C'était sans compter sur des hommes qui vont prendre le pouvoir et l'exercer dans toute sa terreur.
On va se situer dans un pays imaginaire avec un vieux dictateur, histoire de ne pas pointer du doigt tel ou tel pays. Cependant, il n'est pas très difficile de voir qu'il s'agit du Congo de Mobutu rebaptisé Zaïre. Il a régné sans partage pendant 32 ans sur ce grand pays avant de s'enfuir en exil au Maroc car renversé par des rebelles soutenus par un pays voisin à savoir le Rwanda ayant subi un génocide. Ce tyran sanguinaire allié de l'Occident laisse un pays économiquement exsangue, en conflit avec de nombreux pays voisins pour ses richesses et son espace et en pleine guerre civile. Le pays sombra dans le chaos, la misère et la violence. Moi et le chaos...
Sa mégalomanie a été presque sans égale dans le monde. Ce soi-disant père de la nation a fait construire un palais luxueux dans la forêt équatoriale près de son village natal qu'il surnomma d'ailleurs « le Versailles de la jungle ». L'homme-léopard a pillé totalement son pays à son seul profit pendant que son peuple mourrait de faim. Il a même tenté d'être le premier pays africain à envoyer une fusée dans l'espace pour la gloire mais celle-ci s'écrasa devant ses yeux dans le fleuve. Cet épisode sera d'ailleurs présent dans ce récit.
Bref, ce sont tous les travers de l'Afrique qui seront exploités intelligemment dans ce récit.
J'ai adoré ce scénario car on ne lâche pas l'histoire jusqu'à la dernière case. C'est vraiment prenant avec 5 actes. J'ai été surpris par la force du contenu jusqu'à ce final dramatique. Pour autant à ce qu'on sache, le maréchal dictateur n'a pas commis cet acte impardonnable mais on sait qu'il a fait pire durant sa vie.
Pour autant, on sait que son « œuvre » a inspiré des petits Mobutu partout en Afrique qui ont utilisé le mensonge, la corruption et le goût du pouvoir en reproduisant son comportement et ses vils manœuvres.
Un mot sur le dessin pour dire qu'il est efficace avec une belle colorisation rendant la lecture plutôt agréable. Les couleurs sont d'ailleurs assez sombres ce qui va bien avec l'ambiance de ce récit centré sur le crépuscule d'un régime.
Au final, un bel album que je vous encourage à découvrir malgré la cruauté qu'elle renferme sur la fin d'un régime dictatorial.
La rencontre d'un excellent scénariste et d'un dessinateur de grand talent peut engendrer un chef d'oeuvre... ou pas. Le résultat, ici, est une franche réussite avec deux auteurs qui ont pris leur temps, sans contrainte éditoriale précise, d'aboutir à un dialogue parfait entre l'histoire et sa transcription en images. La postface à elle seule vaut la peine d'être lue, et nous permet de comprendre que le scénariste sait de quoi il parle. Brüno est fidèle à ses dernières réalisations. Le rythme laisse place à la réflexion, aux non-dits. Cette histoire africaine a été réfléchie, méditée, pensée, et cela se voit, cela se ressent. Enfin, la couleur tient une place de premier plan. et contribue de façon notable aux ambiances africaines qui changent radicalement d'une page à l'autre.
« T’zée » fait partie des grandes œuvres qui auront sans doute du mal à trouver un public.
Pour apprécier et saisir la force de cet album, il faut déjà connaître a minima l’Afrique. Or, qui s’intéresse vraiment à l’histoire de ce continent, ses peuples, ses cultures ou ses croyances ? Qui connait ses dictateurs, ses luttes d’indépendances, ses accointances avec la France, le Liban ou la Chine ? Car il est ici question de tout cela.
Et cette tragédie africaine – comme son sous-titre l’indique – EST fondamentalement africaine. Elle met en scène de façon tout à fait réaliste (et en 5 actes comme il se doit) les derniers soubresauts d’un dirigeant autocratique, mégalomane et corrompu. Après sa chute, ce qu’il reste du clan présidentiel est retranché dans son palais et assiste, impuissant, à la dislocation et l’embrasement des régions, livrées aux rebelles. Il n’est alors plus question que de sauver sa peau. Mais d’autres enjeux surgissent inopinément et un piège mortel se tisse.
Si le pays n’est jamais nommé cela pourrait se passer dans n’importe quel état du continent, tant ces régimes post-colonialistes s’y sont maintenus de partout, des années 60 à nos jours, avec l’appui de sombres officines politicofinancières occidentales.
Et Appollo, qui a vécu plusieurs années là-bas, le restitue avec beaucoup d’intelligence et d’acuité. Inspiré de « Phèdre » de Jean Racine, son récit est précis, sec, implacable. Y compris dans la théâtralité parfaitement maitrisée des dialogues et des situations. Chaque protagoniste est dans son rôle et incarne avec lui un pan du drame. Tout se joue sous le regard du « fleuve immense et éternel », élément de décor allégorique, immuable, indifférent aux piteuses intrigues du genre humain.
Toutefois, malgré son enracinement dans la culture africaine, cette histoire a valeur de conte contemporain et possède une ambition et une portée universelles. Comme le précise le scénariste dans sa postface : « Phèdre et Hippolyte, Thésée et Théramène, Aricie et Œnone, tous les personnages de Racine sont zaïrois. »
Une portée universelle certes, mais à condition d’avoir quand même de solides bases littéraires...
A ce texte rigoureux donc, répond idéalement le dessin de Brüno. Élégant, puissant, il atteint par son épure une forme de perfection. Il s’en dégage un équilibre hors du commun. La classe absolue.
En conclusion « T’zée » est une grande œuvre, j’insiste, mais très singulière, presque étrange. Accessible sans être grand public, sérieuse, multi-référencée, en appelant autant à la réflexion qu’à la contemplation… bref, une lecture édifiante, visuellement superbe, mais assez exigeante.