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J'ai retrouvé avec grand plaisir le duo Hubert/Virginie Augustin (dont le trait sûr et gracieux accompagne fort bien le propos du scenariste). L'album retrace avec éclat la vie d'une femme gay des années folles, et on s'enthousiasme et s'étonne de voir la liberté qu'elle s'octroie dans ce milieu aristo-conservateur. Pour autant, j'ai été déçue pas la 2e partie du livre, peut être parce qu'il y a moins à dire sur sa vie qui roucoule par rapport aux débuts. De plus les sauts temporels sont quelquefois un peu violents, et hachent un peu trop la lecture. Dans tous les cas c'est toujours un plaisir de retrouver le charme de l'écriture d'Hubert et sa sensibilité sans pareil.
Encore une fois, je pleure sur le sort du scénariste Hubert qui était véritablement au sommet de son art quand il nous a quitté. Il rendait les histoires très intéressantes pour les lecteurs en partant sur des sujets parfois tabous et difficiles. Ce fut l'un de ses derniers scénarios avant son décès.
L'auteur nous conte l'histoire singulière de Marion « Joe » Carstairs morte en 1993 à l'âge de 93 ans après une vie bien remplie. Il ne s'agit pas d'une adaptation au sens stricte mais d'une interprétation personnelle des faits à partir de la réalité. Moi, je n'ai rien contre d'autant que je ne connaissais absolument pas cette forte personnalité exubérante qui a marqué le XXème siècle avant de tomber injustement dans l'oubli et d'être réhabilitée par une journaliste et écrivain en 1997.
Un mot sur le dessin en noir et blanc façon rétro de Virginie Augustin pour dire qu'il est très agréable et qu'il sert fort bien ce récit biographique. Certes, le trait est épuré mais il demeure assez précis et efficace dans les décors et les différents personnages que l'on va croiser tout au long de cette existence. Bref, ma lecture a été plutôt fluide ce qui est fort appréciable compte tenu du nombre de pages à savoir 216.
J'ai bien aimé ce portrait d'une femme qui voulait jouer à être un homme pour vivre ses passions plus intensément. Il est clair que ses exploits de toutes sortes ont démontré qu'elle était fort capable et sans doute plus qu'un homme. Pour autant, force est de constater une certaine forme de vie dissolue dans un milieu riche, frivole, léger et mondain. Qu'importe car son énergie fut réellement salvatrice ! Elle fut même aimée par la célèbre actrice Marlène Dietrich.
Je retiendrais qu'elle fut une femme hors norme avec une fougue et une volonté absolument extraordinaire qui force l'admiration. Elle a participé à des courses maritimes. Elle s'est engagée durant la première guerre mondiale pour soigner les blessés. Elle a monté une compagnie de taxi féminin. Elle a acheté une île au Bahamas où elle a construit toute une société qu'elle administrait non sans mal avec les locaux. Elle a dû se séparer de son île non sans regret après un vent de changement qui ne traduisait pas une reconnaissance pour le travail accompli. Elle a eu une vie tout à fait extraordinaire et bien remplie.
Bref, il n'y a pas que Joe le taxi mais également Joe la pirate. On nous l'oubliera plus de sitôt !
Le tandem de « Monsieur désire » se reforme pour « Joe la pirate » et c’est peu dire qu’on attendait ce dernier opus avec impatience. Unique biographie dans l’œuvre d’Hubert mais quelle biographie ! Celle de Marion Barbara Carstairs, une « Violette Morris » américaine pour son côté frondeur et anticonformiste dotée en plus d’une fortune colossale puisque petite fille richissime d’un actionnaire de la Standard Oil. En treize chapitres dans une narration linéaire et une ligne claire proche de celle d’Yves Chaland, Virginie Augustin et Hubert nous racontent donc le destin hors du commun de cette enfant née à Londres en 1900 qui traversera le siècle entre « champagne et extravagance » pour s’éteindre en Floride à 93 ans.
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Celle qui décrétait « je n’ai jamais été une petite fille. J’étais queer déjà dans la matrice » et ajoutait « je suis ma propre création. Je ne dois rien à personne et surtout pas à mes parents » se rebaptisa « Tuffy » à l’âge de 5ans, puis « Joe ». Elle vécut mille vies en une : elle servit en France dans la croix rouge durant la première guerre, battit des records de vitesse dans des courses de bateau, fonda un garage féminin , acheta une île dans les Bahamas qu’elle gouverna, appris à piloter un avion, collectionna les conquêtes féminines (pas « mil et tre » mais 123 tout de même !) parmi lesquelles Tallulah Bankhead et Marlene Dietrich, fréquenta le duc et la duchesse de Windsor et eut pour confident et meilleur ami une poupée « le major Wadley » avec laquelle elle se fit incinérer…
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Un très riche matériel biographique donc, presque taillé sur mesure pour nos deux auteurs qui se sont documentés et appuyés sur l’ouvrage de Kate Summerscale «The Queen of Whale Cay » malheureusement non traduit en français et sur des clichés d’époque parois fidèlement reproduits. Ils nous offrent des dialogues piquants et qui font mouche, un découpage enlevé avec parfois de superbes pleines pages avec de magnifiques noirs contrastés ainsi que des notices biographiques fort utiles de toutes les célébrités évoquées dans un appendice final… Et pourtant, il manque un petit « je ne sais quoi ». La linéarité de la narration et le noir et blanc épuré mettent finalement le lecteur à distance instaurant un côté paradoxalement trop sage et désincarné. La couverture magnifique, l’unique séquence en couleur (aux crayons) été le portrait final dans ses tons chauds et mordorés laissent entrevoir ce qu’aurait pu être cet album tout comme les deux derniers chapitres. A la fin du roman graphique en effet, le visage trop lisse et semblable à celui de sa poupée de Joe Carstairs se trouve enfin marqué par le vieillissement et elle quitte son masque d’éternel Peter Pan trublion pour montrer son décalage avec les flamboyantes seventies… Là soudain, elle devient humaine et vraiment intéressante …