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Franchement, le procédé m’a lassé jusqu’au plus haut point. On passe d’un personnage à l’autre qui n’ont aucun lien à part celui d’habiter dans le même village de commères pour nous raconter l’histoire d’un jeune homme au lourd passé qui revient. On dit qu’il a été aperçu au café. On dit qu’il est barjot comme sa mère. On dit qu’il revient voir sa tante. On dit beaucoup de choses peu intéressantes.
A un moment donné, on n’arrive plus à suivre le fil de ce qui est raconté d’une case à l’autre par différents habitants (de l’éboueur à la fleuriste en passant par l’aide-soignante et même la clocharde) dans des plans totalement différents à la manière d’une discussion continue. Cependant, à la fin, il semble qu’il y ait une petite action à savoir des hommes dans une voiture afin de l’intercepter. Et puis, le trou noir à savoir quelque chose qui se produit sans avoir aucun lien. La question est de savoir si la rumeur a provoqué la tragédie. On nous montre encore le village sous son mauvais côté avec ses habitants repliés sur eux-mêmes et friands de ragots.
J’avoue m’être royalement ennuyé avec cet exercice de style certes audacieux et maîtrisé. Tout cela pour nous indiquer que la rumeur est nocive. On le savait déjà.
Une petite ville comme il en existe tant en province.
Ni grande, ni petite.
Tout le monde connaît tout le monde.
Tout le monde a un avis sur tout.
Et comme rien ne se passe, le moindre événement devient le centre de toutes les conversations.
L'événement en question: le fils Gabory serait revenu.
La rumeur enfle, de maison en maison. le fils Gabory est revenu. Comment ose-t-il après ce qui s'est passé ?
Casenave et Rochier on construit leur histoire comme un long dialogue dont les protragonistes changent sans cesse. A chaque case, nous changeons de lieux et de gens, mais la rumeur continue son chemin, chaque phrase amenant un élément nouveau, indiscutable parce que tout le monde le sait bien, même si personne n'a rien vu et si les événements se contredisent entre euc.
La rumeur n'a pas besoin d'être vérifiée. Elle grossit, empoisonne certains esprits.
Jusqu'à ce que...
Je dois reconnaître ne pas aimer les petites villes, pour en avoir pratiquée une pendant plusieurs années. Il y a toujours quelqu'un qui tient quelque chose de source sûre. de préférence quelque chose d'inavouable de préférence. C'est plus grisant.
Dans cette bande dessinée, Casenave et Rochier suivent la rumeur. La véritable héroïne de cette histoire. Les colporteurs et les rares contradicteurs ne sont que des anonymes. Certains auront l'honneur de voir leur rôle s'étoffer, mais pour la majorité, ils ne sont que des visages anonymes, comme on en croise tous les jours. Des gueules quelconques croquées avec talent par Casenave. On fil des pages, le lecteur est pris à témoin, découvre le que l'on reproche au fils Gabory. On découvre surtout toute l'hypocrisie d'une petite ville qui a ostracisé plus ou moins consciemment un indivivu marqué par les circonstances, mais qui a ignoré le comportement d'autres, mieux installés dans la hiérarchie.
Ce livre est la chronique de la violence sociale, lorsqu'un groupe décide d'exclure un individu. Ce mécanisme est implacable, d'autant plus qu'il repose sur uun effet de masse. Pour harceler efficacement, rien de mieux que la bonne conscience de quelques dizaines de personnes de bonne foi, et de petit esprit si possible.
Et la rumeur ne s'arrête pas.
Elle peut même en faire naître une nouvelle...