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Martin Luther King avait dit qu'au bout du compte, on ne se souviendra pas des mots de nos ennemis mais du silence de nos amis. C'était sans doute prémonitoire. Ce titre très remarqué aux USA lors de sa sortie nous raconte un événement ayant eu lieu pendant le mouvement des droits civiques à Houston au Texas en 1967.
On va s'intéresser au quotidien d'une famille blanche dont le père est journaliste cameraman et un des organisateurs black du mouvement en pleine émergence. Le récit ne décollera véritablement que dans sa dernière partie. Le dessin me fait penser à celui de Will Eisner dont j'aime bien la patte.
Au final, c'est un témoignage assez poignant et authentique de ce que fut ce long et difficile combat pour l'égalité des droits entre tous les hommes aux Etats-Unis.
L’auteur, Mark Long, nous offre une autobiographie romancée issue de ces souvenirs d’enfance. A travers le regard de son père et de sa famille (blanche), l’auteur nous envoie dans les sixties américaines, à Houston, au moment de la guerre froide, de la guerre du Vietnam, de la conquête spatiale et de la lutte contre la ségrégation raciale. Son père, Jack, journaliste pour une télévision locale, est chargé de suivre les évènements raciaux. Il noue des relations avec Larry, un des leaders du mouvement contestataire pacifique de la ville.
La grande force de ce témoignage est de rester neutre, de décrire sans prendre partie. Le racisme qui gangrène cette Amérique éclate dans toute sa laideur tant il paraît inscrit dans l’ordre des choses. Il s’affiche bien sûr à travers la violence physique (injures, « accident » de vélo dont la fille de Larry, percutée par une voiture, est victime, violences policières) mais de manière encore plus forte, car insidieuse, dans l’organisation de la société où les deux races s’ignorent totalement. La scène où les enfants de Larry et Jack se rencontrent pour la première fois et se découvrent en se touchant les cheveux en particulièrement troublante derrière son caractère drôle et enfantin.
La justesse du propos se retrouve également dans les doutes qui traversent les personnages : Larry qui s’interroge sur la portée du mouvement, la radicalisation prônée par les Blacks Panthers, Jack qui subit des pressions de son responsable hiérarchique, qui ne vient pas au secours de Larry lorsque ce dernier est tabassé par la police.
Le récit est porté par le dessin noir et blanc de Nate Powell. Il ne cherche pas le réalisme mais l’authenticité en recréant l’atmosphère de cette époque. Il y parvient grâce au soin apporté à la reconstitution des décors et son travail sur l’expressivité des personnages.
Loin des grands discours, ce récit touche par sa proximité, parce qu’il rappelle que la lutte contre l’injustice n’est pas faite que de grands combats, qu’elle est possible si l’on s’ouvre à l’autre et si l’on brise le silence. Pas sûr que le message soit encore bien passé de nos jours…