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C'est la première fois que cet auteur italien est traduit en France. Cette bd a obtenu un prix au dernier festival de Naples. On a droit à une vision de l'Italie qui est loin d'être idyllique. L'aspect social est décortiqué un peu à la manière d'un auteur comme Baru entre forme d'aliénation et déshumanisation.
Le cadre est celui d'une cité de banlieue située à proximité d'une usine pétrochmique dans le Nord de l'Italie, ce qui empoisonne la vie de ses habitants. L'auteur se contente de décrire sans expliquer ce qui me semble être une démarche un peu incomplète. Pourtant, il aurait pu le faire sur ces 350 planches.
Je n'ai pas non plus aimé le dessin avec ces traits noirs et épais. Cependant, le graphisme cadre avec perfection avec cet univers triste. Il manque réellement de l'émotion ce qui fait qu'on lira cet ouvrage avec un peu d'indifférence malgré la gravité du sujet pour ceux qui ont des préoccupations d'ordre écologique.
En attaquant ce roman graphique, si l'on se fie à la ronflante critique au dos, associée à un Grand Prix du festival de Naples, on aurait tendance à penser que c'est déjà plié avant de commencer : Attention, chef d'oeuvre !!
En réalité, c'est plus compliqué que ça :
D'abord, un scénario en béton, le quotidien déprimant et sans issue de gamins d'une cité jouxtant une immense usine pétrochimique, dont la naïveté, l'innocence et même l'amour du football sont mis à mal par la brutalité de la réalité sociale, et sa moisson de victimes.
Malgré une trame narrative assez décousue, on saisit rapidement vers où l'auteur essaie de nous entrainer, à savoir la dénonciation d'un quotidien aliénant, sciemment entretenu par le pouvoir et sa police, un mode de vie totalement autarcique, dénué de culture et d'ouverture sur le monde, et où règne une omerta des plus oppressante.
Visiblement désespéré, en proie à la panique, l'auteur ne juge pas ses personnages, il les laisse déambuler au gré de leur propres vies qui s'enfoncent irrémédiablement dans un futur qui a tout d'une voie de garage, comme une fatalité, une malédiction qu'il faudrait absolument briser.
Des réflexions intelligentes, des phrases qui marquent, et une ambiance tendue, à couper au couteau, c'est du tout bon au niveau des dialogues.
Sur le fond donc, rien à redire.
Par contre, je trouve vraiment que la fin a été négligée, l'ouvrage se termine en queue de poisson, sous la forme d'une pirouette stylisée très dispensable et qui déçoit par manque de perspective et de lisibilité, même si le ton général le laissait grandement présager.
Cela nuit à l'ensemble, car on on reste vraiment sur sa faim...
Pas de happy end dans le "Real World", donc, faudra s'y faire...
Pas de manichéisme à outrance non plus, on est plus dans l'approche documentaire, même s'il est difficile d'éviter à un moment ou à un autre de tomber dans le misérabilisme.
Quant au dessin, sombre mais percutant, des visages très expressifs mais forcément monotone, avec un travail sur les ombres assez impressionnant, il y a une patte certaine, mais j'avoue être resté perplexe sur les personnages esquissés mais pas finis, coupés en deux, incomplets.
Sans doute était-ce précisément le but de l'auteur, montrer que dans ce contexte sordide les personnalités, et même les visages, sont incapables de s'épanouir, de laisser une véritable empreinte dans la réalité.
Certains apprécieront, d'autres beaucoup moins...
Au final, malgré un sujet bien traité, on ressent une certaine déception en refermant le livre. Gageons qu'une seconde lecture permettra de mieux saisir toute la portée de l'oeuvre...