Strange Fruit (Waid/Jones)
Strange Fruit
Une BD de
Mark Waid
et
Jeffrey G. Jones
chez Delcourt
(Contrebande)
- 2017
Waid, Mark
(Scénario)
Jones, Jeffrey G.
(Scénario)
Jones, Jeffrey G.
(Dessin)
Jones, Jeffrey G.
(Couleurs)
Moscow☆Eye
(Lettrage)
Rivière, Benjamin
(Traduction)
04/2017 (05 avril 2017) 128 pages 9782756091853 Format comics 300866
Chatterlee,1927. Le fleuve Mississipi est en crue et menace de dévaster des villes entières. Des villes qui ont vécu - il n'y a pas si longtemps encore - de la richesse des plantations de coton où l'esclavage était de mise. Un être venu d'ailleurs - aux pouvoirs extraordinaires - descend littéralement du ciel et fait irruption au milieu de cette catastrophe naturelle. Sa peau est noire...
Tout d’abord, c’est typiquement le genre de dessin réaliste que j’aime bien où les corps des personnages sont bien distincts. On arrive à les reconnaître ce qui peut constituer quelque fois un exploit. On est toujours ravi de voir un comics bien lisible sur un style graphique réaliste.
Ceci dit, le récit se passe dans le Sud des Etats-Unis en 1927 où une crue du Mississippi entraîne de grandes inondations ce qui n’arrange pas forcément les plans des fermiers blancs qui se servent alors de la main d’œuvre noir comme au temps de l’esclavage.
Il y a l’introduction d’un élément fantastique, une sorte de Superman black venant de l’espace. Pour autant, le ton reste à chaque fois assez réaliste. Dommage que la fin soit si expéditive et nous laisse sans explication sur l’origine.
Le thème est bien entendu celui des souffrances infligées aux noirs par les blancs racistes avec comme contexte historique cette inondation exceptionnelle qui a constitué l’une des plus grandes catastrophes naturelles aux USA à cette époque.
Un colosse noir, presque un super-héros, débarque de nulle part en 1927 dans une petite ville du Mississippi aux Etats-Unis. Entre le racisme, la ségrégation, l’exploitation par le travail et le Ku Klux Klan, l’époque est évidemment loin d’être favorable aux gens de couleur et l’inondation qui guette ne contribue qu’à rendre le climat local plus tendu encore. Et pourtant, cet homme va rester (Strange Fruit 2015, #1-4).
Le titre de l’album, Strange Fruit, est une référence évidente à la chanson de blues de Billie Holiday interprétée en 1939 et reprises par de nombreux autres artistes par la suite. Mais, si ce "fruit étrange" désigne initialement le lynchage des noirs dans le sud des Etats-Unis dans les années qui suivirent la fin de l’esclavage, il prend ici un autre sens avec l’étrange apparition de ce colosse noir à Chatterlee.
On ne saura cependant rien, ou si peu, de ses origines ou de ses motivations, il ne dira d’ailleurs pas le moindre mot de tout l’album, se contentant de sauver la population sans se préoccuper outre mesure du reste (la disparition d’un enfant, les querelles entre blancs ou les conséquences économiques de l’inondation). Ce qui se révèle très frustrant lorsque l’on referme l’album ; d’autant plus que la fin de l’histoire et les derniers instants de notre héros me paraissent précipités. J’aurais presque préféré que cet homme se contente de retrouver son vaisseau et s’en aille en laissant la population se noyer, il ne s’agissait pas de son combat après tout.
Ce qui m’a surtout poussé à lire cette mini-série, ce sont les superbes planches de J. G. Jones, qui assure aussi le scénario en compagnie de Mark Waid. Le style est certes très éloigné de ce que les comics nous offrent habituellement mais cette peinture et ces couleurs sépia n’en sont pas moins belles et rappelleront le travail d’Alex Ross ou de Gabriele Dell'Otto.
D'accord avec les deux avis précédents. Si cet album possède d'indéniables qualités graphiques, il m'a laissé froid, et je trouve que le scénario aurait mérité un développement beaucoup plus fort. Il y a avait moyen. L'adage : "un mauvais scénario ne rattrapera jamais le plus beau dessin qui soit" est vérifié ici malheureusement. Dommage.
A mon grand désarroi, je suis passé à côté de cet appétissant "Strange fruit".
Le dessin est superbe mais il ne m’a pas touché ; orienté "illustration", il est trop froid et figé pour de la BD. A trop vouloir en faire, JG Jones se perd dans de la démonstration inutile. La surabondance de détails dans les visages, par exemple, rend souvent méconnaissable un même personnage d’une case à l’autre.
L’histoire, elle, m’a paru complètement décousue. Même si l’on peut deviner les intentions de l’auteur, je n’ai jamais su où il voulait vraiment aller tant son scenario tourne à vide. De nombreux thèmes émergent, à commencer par le racisme et la ségrégation, mais ils sont inexploités ou avortés, à l’image du Colosse Noir qui avait pourtant de quoi fonder une nouvelle mythologie, mais qui semble ici ne passer que par hasard…
Au final rien n’en sort, à part un manichéisme facile.
En résumé, c’est peut-être génial, mais je n’en ai pas compris grand-chose ni saisi l’intérêt.
Album sympa, très beau (dans le style d'Alex Ross) mais qui, à mon sens, ne va pas au bout des ses idées, pourtant assez sympathiques.