Sa Majesté des mouches
Une BD de
Aimée De Jongh
chez Dargaud
- 2024
De Jongh, Aimée
(Scénario)
De Jongh, Aimée
(Dessin)
De Jongh, Aimée
(Couleurs)
Montésinos, Éric
(Lettrage)
Bouazzouni, Nora
(Traduction)
Golding, William
(Adapté de)
09/2024 (13 septembre 2024) 352 pages 9782505128557 Autre format 503327
Une bande de garçons issus de la haute société anglaise échouent sur une île déserte à la suite du crash de leur avion. Le pilote et les adultes qui les accompagnaient sont morts. Livrés à eux-même sur une île paradisiaque, les voilà bien décidés à jouir de cette toute nouvelle liberté. Une nouvelle vie sans adulte et sans règles : des vacances. Ils se nourrissent de fruits, jouent et se baignent. Pour survivre, ils seront pourtant bien obligés de s'organiser et de reproduire les schémas sociaux inculqués. Le téméraire et gentil Ralph devient alors... Lire la suite
Très belle album, excellente adaptation, une autrice au mieux de sa forme. Couleur et cadrage maitrisé
:: CET AVIS CONTIENT DES (MINI) SPOILERS ::
Après le succès mérité de « Jours de sable », Aimée de Jongh était forcément très attendue pour son adaptation du best-seller « Sa majesté des mouches » de William Golding.
Sans démériter, l’exercice n’est pas tout à fait réussi.
La couverture est magnifique, certes, et les premières planches sont alléchantes ; le trait doux et rond de la dessinatrice fait mouche et crée d’emblée des ambiances envoûtantes. Pourtant, au fil de la lecture, l’impression de lire un roman illustré gagne peu à peu.
En effet, l’autrice a pris le parti d’une narration la plus proche possible de l’œuvre originale. L’idée est louable et aurait pu donner un résultat grandiose. Mais la voix off du narrateur devient vite envahissante et finit par mettre le lecteur à distance des évènements.
Il y a, dans de nombreux passages, plus de récitatifs que de dialogues. Comme si Aimée de Jongh ne parvenait pas à mettre en image l’action du roman sans l'appui du texte de Golding.
Et cela pèse fatalement sur le rythme global qui souffre d’un manque de tension, d'oppression, d’intensité. Plusieurs séquences m’ont paru trop diluées, même si les moments de silence ont bien sûr leur importance.
A contrario, une scène déterminante comme la danse tribale qui vire au drame, aurait dû être plus longue, ou découpée de façon à faire jaillir la folie qui s’empare des garçons à cet instant-là. Alors que sa tragique conclusion n’est décrite qu’en 4 cases. S’agissant du point de bascule de l’histoire, elle perd ainsi beaucoup de la puissance qu’elle est censée avoir.
Ce rythme irrégulier est aggravé par de multiples ellipses scénaristiques et quelques raccourcis faciles. Je ne vais pas m’étendre, mais citons par exemple la disparition du garçon à la tâche de naissance qui, bizarrement, n’a pas de réelle explication, ni l’air d’avoir la moindre conséquence sur le groupe. Ou encore, la fabrication des lances : mettez des adultes sur île déserte, je prends le pari qu’aucun d’entre eux ne serait capable de se fabriquer une lance à pointe de pierre ! Pourtant, ici, tous les enfants en sont armés sans que l’on ne sache ni comment, ni par qui elles ont été faites. On pourrait me rétorquer que je chipote mais cet élément a une importance cruciale dans l’histoire. De mon point de vue, il aurait été essentiel de s’y attarder, au moins le temps d’une case ou deux, sans trahir le livre originel.
Tout cela contribue à donner à « Sa majesté des mouches » des airs d’album jeunesse, ce qu’il n’est pourtant pas. Impression renforcée par le jeune âge des protagonistes et par le style presque enfantin, trop enfantin en tous cas, adopté par l’autrice. D’ailleurs, hormis Porcinet, tous les garçons ont des morphotypes et des faciès quasiment identiques, la caractérisation se faisant uniquement sur des détails (cheveux, taille…). Là encore, je ne peux m’empêcher de penser qu’il y avait moyen de donner aux enfants des « tronches » mieux indentifiables, quitte à enlaidir certains d'entre eux ou à exagérer leurs particularités.
Je précise que j’ai cité tous ces exemples pour étayer et préciser mon avis, pas pour critiquer gratuitement le travail d’Aimée de Jongh, que d'autres lecteurs trouveraient peut-être parfait – et c’est tant mieux. Je garde du respect pour elle, cependant, force m’est d’admettre que je suis resté largement sur ma faim.
Cet album n’est donc pas décevant en soi, il est juste bien en deçà de ce qu’il aurait pu être à mes yeux. Il n’en reste pas moins édifiant et tout à fait recommandable.