Le rêve du papillon
1. Lapins sur la Lune
Une BD de Richard Marazano et Luo Yin chez Dargaud - 2010
09/2010 (03 septembre 2010) 56 pages 9782205061154 Grand format 113280
Lors d'une sortie en montagne, Tutu se perd et, frigorifiée, s'endort sous une corniche. A son réveil, elle découvre un monde complètement différent : une ville au fond d'une vallée perdue qui semble plongée dans un hiver éternel. Tutu est immédiatement arrêtée par les lapins de la police secrète : l'arrivée d'une petite fille venue d'ailleurs provoque le désordre ! Pour la surveiller, le dictateur de la vallée ordonne son placement dans une famille déplacée, mais la petite fille s'échappe de son nouveau domicile dès qu'elle le peut et, au cours... Lire la suite
C’est un titre bien évocateur que celui du rêve du papillon. Une petite fille se retrouve devant un arbre fleuri et supplie le ciel de bien vouloir la laisser rentrer chez elle. Ce n’est visiblement pas possible lui explique un chat qui parle tant qu’elle n’aura pas retrouvé ce fameux papillon. Cependant, comment le reconnaître parmi les milliers tous semblables ?
L’auteur dépeint un univers pas aussi féérique que cela à mi-chemin entre songe et réalité. Dans cette ville-prison, elle est obligée de travailler à l’usine chaque jour sans pouvoir déjeuner. C’est un quotidien sombre et tourmenté qui nous est décrit. La ville est gouvernée par un empereur inaccessible qui se fait représenter par divers robots pour ne pas montrer son visage. Il est assisté par une police secrète composée de lapins crétins en habit noir. Cette petite fille ressemble étrangement à celle que l’on retrouve dans l’univers manga de Miyazaki notamment Le voyage de Chihiro.
Il y a un mélange de genres qui semble fonctionner entre ce qui relève du fantasque et des aspects néfastes d’une dictature. Au-delà de la fantaisie, on aborde des thèmes sérieux comme la liberté individuelle et la nécessité de combattre toutes les formes de totalitarisme. J’ai bien aimé ce côté décalé entre émerveillement avec ces somptueuses couleurs et ce graphisme tout en beauté et réalisme d’une société confrontée à la précarité et à l’exploitation. En effet, ce monde fantastique qui connaît un hiver éternel est en proie à une véritable révolution industrielle.
On s’abandonne avec délice aux dérives du scénario. L’impact visuel est aussi puissant que la colorisation est belle. C’est une œuvre singulière d’une remarquable réussite. En conclusion, c’est une histoire poétique avec des mots d’enfants mais pour les grands. C’est un beau voyage en immersion totale dans un univers coloré, magique, poétique et loufoque mais également cruel et émouvant.