L'odyssée d'Hakim
2. De la Turquie à la Grèce
Une BD de Fabien Toulmé chez Delcourt (Encrages) - 2019
06/2019 (05 juin 2019) 251 pages 9782413013365 Autre format 366476
En exil loin de son pays natal, Hakim trouve un peu d'espoir dans la naissance d'un fils. Mais de petits boulots en difficultés, la complexité du monde le rattrape une nouvelle fois et sépare sa famille. Livré à lui-même avec son enfant, Hakim va tenter de survivre, malgré les obstacles et la précarité, jusqu'à envisager le pire : monter sur un canot de fortune pour trouver un salut...
Nous avons quitté Hakim alors qu'il était avec sa nouvelle famille à Antalya en Turquie. Il va désormais suivre ses beaux-parents à Istanbul où la ville offre plus de possibilités en terme de travail, c'est du moins ce qu'il pense. Encore une fois, il y aura une belle désillusion malgré le charme de cette ville plus ouverte.
Dieu sait que j'aime bien Hakim mais je l'ai trouvé bien naïf à deux grandes reprises notamment au début de ce second tome. Il croit qu'il peut acheter de l'eau dans un supermarché et vendre les petites bouteilles à la sauvette sur un trottoir à proximité en se faisant une marge financière sans demander la moindre autorisation à quiconque. S'il était chef d'entreprise dans son pays, il devrait savoir que ce n'est pas aussi simple et qu'il faut accomplir un minimum de formalité. Bon, le résultat ne s'est pas fait attendre.
Par ailleurs, j'ai trouvé son attitude un peu scandaleuse vis à vis du médecin de sa femme au moment de l'accouchement de celle-ci où il refuse la césarienne proposée d'urgence car c'est trop onéreux. Le médecin lui fait comprendre qu'il n'a pas vraiment le choix pour la vie de son épouse et du bébé à naître. Je trouve qu'il n'a pas été très futé sur ce coup là et que c'est même assez choquant comme attitude même si on peut comprendre le désarroi financier. Comme dit, c'est une autre culture.
Une autre interrogation de ma part vient du fait que la France accepte d'accueillir sa femme car encore mineure mais sans son bébé qui se retrouve alors séparée de sa mère. Là aussi, je suis un peu dubitatif face à l'administration française et également par le choix opéré par le couple qui se sépare.
Cependant, ce qui m'a le plus choqué est le commerce des passeurs et de ce qui tourne autour. Ainsi, des magasins qui vendent des kits de sauvetage à Izmir en face d'une île grecque à savoir Samos. Ce commerce de la misère est épouvantable et moralement choquant.
Le passage concernant la traversée de la mer en canot d'infortune jusqu'à l'île de Samos a été le plus éprouvant. Pour autant, l'île ne se présente qu'à deux ou trois kilomètres des côtes turques et on a l'impression que c'est comme une traversée de la Méditerranée entre la Libye et l'île italienne de Lampedusa située à près de 300 kilomètres. Or, ce n'est pas vraiment la même difficulté de parcours maritime. Mais bon, je suppose que la réalité peut parfois être un peu plus compliquée surtout avec un enfant en bas âge.
Malgré toutes mes considérations purement personnelles et mes petites critiques factuelles sur le comportement, j'ai beaucoup d'admiration pour Hakim et ce qu'il a dû traverser comme épreuve. On se rend compte que la situation des migrants mérite qu'on s'y attarde sans préjugés et apportant un peu plus d'aide au nom d'une certaine humanité.
Je sais bien que ce n'est pas la tendance majoritaire qui est celle du repli sur soi et du rejet. Par ailleurs, l'actualité récente du genre « le responsable d'un centre d'accueil pour réfugié tué à coup de couteux par un demandeur d'asile soudanais connu des services de police » n'incite pas à la clémence. Je sais qu'il ne faut pas tout mélanger mais est-ce que tout le monde aura ce type de raisonnement ?
J'ai vraiment été bouleversé parfois par ce tome qui ne laissera pas indifférent le lecteur. Encore une fois, je salue la gentillesse, l'exemplarité et la bienveillance de Fabien Toulmé. On a hâte de voir comment tout cela va se terminer dans le dernier tome.