Info édition : Couverture cartonnée, format du livre 58, 5 x 39 cm, dos toilé. Impression en sérigraphie sur la couverture et découpe laser, carton 8mm. La vignette est imprimée aux encres pigmentaires/ – Le visuel du coffret est également imprimé en sérigraphie. Carton de 5 mm d’épaisseur : format 40 X 59 cm. Livre totalement imprimé aux encres pigmentaires sur un papier 100% coton. Toutes les pages sont protégées par une feuille de papier cristal de qualité muséale. Cette présentation à l’italienne permet d’apprécier les doubles pages pages qui ne sont pas pliées. Tirage : 60 exemplaires Préface par Enki Bilal en hommage à Philippe Druillet. Livre et portfolios numérotés et signés par ces deux très grands auteurs du 9ème Art.
Je ne connais pas Gustave Flaubert. À défaut de lire le roman, je suis allé me renseigner sur l'histoire, les personnages, le contexte du livre pour mieux apprécier cette adaptation de Druillet. D'ailleurs, c'est une histoire qui contient énormément de texte, parfois certaines pages ne sont qu'un bloc de texte tiré du roman, sans réels dessins, ce qui en rebutera sûrement certains.
Mais utiliser le texte d'un des plus grands romanciers du 19e siècle pour coucher sur papier l'imagination débridée de Druillet, ça promettait!
Maintenant, il faut savoir qu'en début de jeu Druillet admet que parfois il a carrément repris le texte mot pour mot, parfois il l'a adapté, parfois il l'a complètement réécrit. C'est assez facile de savoir quand on lit la plume de Flaubert et quand on lit celle de Druillet. Mais alors que dans Gaïl on aurait dit que le texte avait été écrit pour s'adapter aux dessins, ici ce sont les dessins qui sont là pour représenter le texte. Et c'est une véritable merveille.
Les changements apportés par Druillet semblent à première vue superficiels. D'abord, l'époque se situe dans le futur et non au 3e siècle avant J.-C. Sloane devient Mâtho; le compagnon de Sloane, Yearl, fait une brève apparition; et le design des personnages et des armes sortent tous d'un univers de science-fiction. Sinon, il y aura forcément eu quelques coupures à l'histoire, mais ça semble assez fidèle au texte d'origine dans l'ensemble.
Le premier tome, Salaambô, est mon préféré. C'est la rencontre avec cette femme qui fait rêver Mâtho et qui brûlera ensuite de la revoir. On nous présente les personnages et on pose les bases de l'histoire -- les mercenaires qui attendent que Carthage leur paye leur dû. Dois-je m'attarder sur le dessin? Magnifique! Salammbô est un dessin.
Le deuxième tome, Carthage, relate la deuxième rencontre de Mâtho avec Salaambô et nous présente les premières expositions de stratégies militaires et les premières hostilités. C'est grandiose, c'est sublime. Seulement, ce que je n'aime pas, c'est que Salammbô est devenue une photo numérisée. Druillet a toujours aimé insérer des photos dans ses albums, mais ici le personnage se meut en photos. Ça fait penser aux vieux romans-photos des années 80, justement. Je trouve ça laid. Autrement, c'est un autre excellent album.
Le troisième album, Mâtho, est là où le bât blesse. Ce ne sont pratiquement QUE des scènes de guerre. Mâtho prend l'avantage. Finalement c'est Hamilcar qui reprend l'avantage. Et là c'est Mâtho encore. Et puis Hamilcar encore. Encore et encore. L'une des critiques du roman, du moins parmi les critiques modernes que j'ai lues en ligne, c'est le trop gros surplus de batailles et le peu d'attention donné à Salammbô. Voici un endroit où Druillet aurait dû adapter un peu plus. L'intérêt se dissipe dans ce flux de combats incessants. Certains personnages meurent au détour d'une ligne dans un océan de texte. Narr'Havas, par exemple, n'aura servi à pratiquement rien dans l'histoire. Spendius disparaît sans fanfare ni trompettes, alors que c'était un personnage important. Si Druillet nous avait ramenés sur un chemin plus personnel et avait daigné donner des fins dignes de leurs noms aux personnages, même s'il devait diverger du roman pour accomplir cela, l'histoire s'en serait trouvée améliorée. Même les dessins finissent par être répétitifs à force de décrire toujours à peu près la même chose. La guerre, toujours la guerre. Mais Salammbô redevient un dessin.
Druillet a accompli quelque chose d'extraordinaire avec Salammbô, et maintenant je regrette qu'il n'ait pas adapté plus de romans de cette manière. Si vous êtes fan de Flaubert, Salammbô est une adaptation à découvrir absolument. Si, comme moi, vous ne connaissez pas, Salammbô demeure une adaptation qu'il faut absolument découvrir, pourvu que vous soyez prêt à accepter le côté roman de l'adaptation. Il en manquait peu pour que Salammbô ne devînt le grand chef-d’œuvre de Druillet.