L'homme Bouc
Une BD de Corbeyran, Éric et Aurélien Morinière chez Hachette (RobinSon) - 2020
09/2020 (16 septembre 2020) 192 pages 9782017044574 Format normal 403205
Adèle Foueix, marche dans les bois avec son chien quand, soudainement, elle le perd de vue. Elle part à sa recherche et découvre un spectacle aussi étrange que macabre : un homme nu à tête de bouc est assis à côté du corps du chien qui a été égorgé. Peu de temps après, un avis de recherche est lancé par la gendarmerie pour retrouver Adèle Foueix, qui a disparu… Corbeyran, auteur éclectique, signe son 400ème album BD et fête ses 30 ans de carrière avec L'Homme Bouc, un roman graphique de haute volée. Une oeuvre majeure dans laquelle le dessinateur... Lire la suite
En balade dans la nature et sous la pluie, Adèle doit s'enquérir de son chien. Elle rencontre alors un homme nu avec une tête de bouc. Sa disparition donne lieu à une enquête de gendarmerie aux répercussions inattendues.
Dès la couverture de cet album le ton est donné. Entre peur et fascination, Eric CORBEYRAN (qui signait là, au scénario, son 400ème album) et Aurélien MORINIERE, instillent lentement et subtilement une ambiance à la fois inquiétante et envoûtante. Le malaise s'empare du lecteur avec un mélange savamment dosé de répulsion et d'hypnotisme. Car le thème abordé concerne chacun, à des degrés plus ou moins profonds. Paganisme, chamanisme et animisme sont en effet aux racines mêmes de notre spiritualité. On peut, comme les personnages qui y sont ici confrontés, les rejeter ou au contraire s'y perdre. Ils ne laissent en tout cas pas indifférents.
Le dessin noir et blanc dans ce qu'il y a de plus maîtrisé est une pure merveille qui justifierait à elle seule la lecture de cet album. Les ambiances proposées par Morinière sont fabuleuses. On ressent la pluie, la puissance de la nature, l'épaisseur de l'obscurité. Il y a une parfaite évocation des atmosphères primitives puissamment teintées de charme et d'épouvante. On pense à certains albums de Comès (Iris, L'Arbre Cœur, …), la noirceur en plus.
Corbeyran s'est mis au service de cet univers graphique. Son histoire, déroulée avec habileté, tient lieu de fil rouge à l'évocation d'un univers à peine esquissé, aux frontières de la réalité cartésienne. Ainsi les deux auteurs convoquent notre mémoire ancestrale, celle qui nourrit nos peurs et notre émerveillement face à la nature. Accepter, croire et célébrer ou bien nier, réfuter et repousser les croyances fait partie de nos vies et c'est cela dont il est brillamment question.
J’ai tourné la dernière page de cet album un peu interloqué et frustré. Certes le dessin noir et blanc est parfait, il met idéalement en place l’atmosphère rurale, étrange…. Certes l’enquête est intéressante et Corbeyran sait distiller les ingrédients fantastiques au fur et à mesure… Mais à la fin, force est de constater qu’il y a plus de questions que de réponses… L’amateur de polar (éclairé mais peut-être trop rationnel) que je suis reste sur sa faim.
Le cahier graphique, très réussi, et les explications de Corbeyran et Morinière viennent un peu éclairer ma lanterne : Ici la volonté n’était pas tant « d’expliquer les mystères mais au contraire de les laisser dans l’ombre, à l’abri de toute forme de rationalité ». Dont acte, en ce sens, « l’homme-bouc » est incontestablement une réussite.
Sombre et moite sous ses airs de polar, « L’homme bouc » se révèle très actuel et franchement prenant. Il explore plusieurs pistes intéressantes mais n’en suit qu’une, plutôt inattendue. On pense forcément aux œuvres du grand Comès puisqu’il y est beaucoup question d’ésotérisme et plus encore de chamanisme, avec pour décor quasi unique les boueuses forêts limousines, noircies par un hiver sinistre. On accroche ou pas, mais le récit a le mérite d’aller au bout de son propos, sans concession, bien aidé par un rythme sec et des personnages peu diserts mais très humains. E. Corbeyran connait son boulot. Ce qui ne m’a pas empêché de noter quelques facilités scénaristiques (la captive muette qui dessine si bien qu’on reconnait sur sa feuille un modèle précis de voiture ou tous les détails d’une vieille chapelle ? mouais… passons).
A condition d’être indulgent, donc, le récit fait preuve d’une belle efficacité.
Le dessin n’est pas en reste. Dans un noir et blanc harmonieusement nuancé de gris, il permet des ambiances glaçantes parfaitement adaptées au scenario. On pourrait toutefois lui reprocher un certain statisme, l’ensemble manquant un poil de dynamisme. Par ailleurs, l’aspect photographique de certaines cases est parfois très marqué. Mais globalement, le travail d’Aurélien Morinière, que je ne connaissais pas, est bon, solide et rend la lecture fort agréable.
Bref, ce n’est pas parfait, mais c’est une bonne BD à découvrir si vous n’êtes pas rebuté par les enquêtes sordides nimbées de paranormal…
Adèle Foueix disparaît lors d'une promenade en forêt avec son chien. Gaëlle Demeter est chargée de l'enquête. Elle fait appel à son amie Blanche, chamane pour l'aider à comprendre certaines éléments traditionnels. Un thriller très bien construit par Eric Corbeyran, entre enquête policière classique et éléments fantastiques bien distillés. Les dessins en noir et blanc d'Aurélien Morinière sont fantastiques. Un excellent roman graphique.