La déconfiture
2. [Seconde Partie]
Une BD de Pascal Rabaté chez Futuropolis - 2018
02/2018 (22 février 2018) 115 pages 9782754823128 Format normal 319756
Juin 1940. Videgrain, soldat du 11e régiment, est sur les routes… Les Allemands ont enfoncé tous les fronts, c’est la débâcle. Les Stukas viennent faire des incursions meurtrières sur les colonnes de réfugiés qui fuient l’avancée allemande. Videgrain, qui a été séparé de son régiment, le rejoint à temps pour être fait prisonnier par l’armée allemande avec tous ses camarades. Au fil du chemin qui les emmène vers leur camp de détention, leur nombre s’accroît de jour en jour, confirmant l’étendue de la défaite française. Videgrain, son copain Marty... Lire la suite
Enième BD de guerre 40-45, on ne peut pas dire qu'on est pas servi tant les ouvrages sur le sujet sont multiples et ma foi, ce titre est plutôt réussi.
L'histoire en elle-même ne casse pas des briques, elle est plutôt prétexte à de belles rencontres avec une équipe de personnages aux caractères variés qu'on apprécie de suivre sur la route de la débâcle et surtout à des dialogues bien tournés et incisifs. Je retiens également des séquences originales (les scènes de nuit) dont le traitement graphique à coup de hachure est assez réussi et auxquelles il fallait penser.
Cependant, la fin est abrupte, me déçoit un peu et pose question :
SPOILER
Est-ce que le "héros" à la toute dernière case fort étrange, est sur le point de se faire arrêter par les allemands qui arrivent en voiture ?
Les personnages qui regardent vers la fenêtre de son appartement au dernier étage pourraient être des collabos qui l'ont dénoncé par peur ??
Un retour de manivelle par rapport au fait que le héros a abandonné son camarade quelques scènes plus tôt ?
FIN DU SPOILER
Bref, tout cela n'est que pure interprétation de ma part mais de ce fait, le récit reste très ouvert pour une suite.
De par ses dialogues travaillés, sa poignée de personnages, ses phases d'action circonscrites à des décors très simples, « La déconfiture » pourrait être facilement adapté au théâtre. Et cela donnerait probablement une pièce intelligente et cinglante.
Rabaté livre une vision crue de la défaite en se glissant au milieu de ses semblables. Des gens normaux devenus soldats, puis prisonniers, sans vraiment comprendre pourquoi.
Ici, pas de champ d’honneur ni bataille en cinémascope ; pas d’état-major ; pas de romantisme guerrier, de sacrifice héroïque ou d’esthétisation de la violence ; pas d’envolées nationalistes ni pamphlets libertaires ; pas plus de morale, de justice ou de leçon. C’est cela la déconfiture. Ce n’est pas que la défaite d’une nation, c’est surtout la défaite de l’âme humaine. Sans décorum.
A travers son personnage d'Amédée, un homme certes ordinaire mais instruit, déterminé, perspicace et posé, Rabaté questionne notre humanité. Si ses convictions à lui vacillent et qu’il ne peut s’en sortir sans piétiner ses valeurs, y serions-nous parvenus nous-même ? A chacun sa réponse...
Un diptyque édifiant aux dessins superbes. A lire absolument.
Ce deuxième tome m’a paru en retrait par rapport au précédent, sans doute parce qu’il est plus cruel du fait des agissements de la soldatesque allemande. Cette tendresse disparue, liée à un estompage du caractère picaresque du récit donne à l’album un ton non pas plus noir, le premier l’était déjà, mais surtout beaucoup plus désespérant.
Il n’en reste pas moins qu’une adaptation fidèle au cinéma permettrait au film de rafler maints Césars et d’être sacré toile de l’année.