Après l'Enfer
2. Le Bayou d'Oz
Une BD de Damien Marie et Fabrice Meddour chez Bamboo Édition (Grand Angle) - 2021
01/2021 (13 janvier 2021) 54 pages 9782818968567 Grand format 413915
« Pour Alice et Dorothy, l'âpre réalité du Sud vaincu est un conte noir à mille lieux d'Oz et du pays des Merveilles... ». La Guerre de Sécession terminée, trois confédérés démobilisés reviennent sur leurs terres exsangues. De leur rencontre avec Alice et Dorothy va naître l'espoir de se reconstruire autour d'un même but : retrouver le trésor du Sud spolié par ces mystérieux 12 soudards à la traîne des troupes de Sherman et menés par La Reine et le Chapelier. Le petit groupe s'enfonce dans le Bayou d'Oz où la frontière entre la vie et la mort se... Lire la suite
Je n'avais pas été franchement convaincu par le premier tome de ce diptyque. Ce n'était pas une raison pour moi de ne pas poursuivre ma lecture du second tome qui clôture ce récit qui s'inspire du magicien d'Oz pour le mêler à la guerre de Sécession et à des faits historiques précis.
Au niveau du dessin, c'est époustouflant de beauté. Le marais et le bayou sont magnifiquement retranscrits. On s'y croirait au milieu des alligators dans un décors mystique et enchanteur à la fois.
Bref, on retrouve Alice et Dorothy qui ont dû subir les pires désagréments de cette guerre fratricide et qui vont devoir lutter contre la reine et son chapelier. Il sera également question de la magie vaudou et des zombies qui en découlent.
J'en retiens une lecture assez originale mais qui ne m'a pas vraiment convaincu bien que possédant d'indéniables qualités.
Un changement d'optique assez radical, orienté vers le bayou et le vaudou, avec un lien entre les 2 tomes assez distendu. Le plus surprenant est le cahier graphique et son commentaire. Ce dernier est tout entier dédié à chanter les louanges des 2 albums et du scénario, dont la "profondeur est rarement atteinte dans la bande dessinée" (rien que çà !!), avec un retour assez lourd sur les références cinématographiques (pour ceux qui n'auraient pas compris) et la filiation revendiquée vis-à-vis de plusieurs films. Au final des albums et un ton prétentieux, dont on peut se dispenser.
Après un premier album très psychologique qui proposait une vision graphique très monochrome visant à rendre une ambiance de fin du monde assez dépressive, ce second et dernier est assez différent en ce qu’il change de style en changeant d’environnement. La petite fille apeurée devient centrale dans cette relation avec le Chapelier (qu’on imagine son violeur) et l’itinéraire magique va faire d’elle la véritable héroïne de l’histoire. Les auteurs voulaient aborder la thématique du Vaudou, très intéressante dans cette période de libération des esclaves et de reconstitution de mondes séparés, la société tribale et magique du Bayou, l’armée blanche du Klan d’un autre côté. Cette immiscion de la magie permet d’aborder le monde des esprits, des Loa, à même de résoudre le trauma des protagonistes.
La structure de l’album est bien plus simple en ce qu’elle reprend la chasse invisible dans un labyrinthe où Dorothy et ses protecteurs ne voient rien venir. Damien Marie (qui a proposé dernièrement le très bon 300 grammes) utilise sa culture cinématographique pour citer des références inattendues mais qui font mouche. Cette base référentielle plus axée sur la culture populaire que sur l’histoire ou le cinéma classique permet d’entrer dans ce qui pourrait à première vue ressembler à un patchwork casse-gueule. Associer en effet Le magicien d’Oz, Alice au pays des merveilles, Alien et Apocalypse now pourrait sembler très aventureux. Or ça fonctionne et avec une grande lisibilité du scénario et une relative simplicité des schémas narratifs on se passionne pour nos deux héroïnes.
Un peu moins inspiré graphiquement que le premier volume même si l’affinage de la technique d’encrage améliore la qualité générale, Le bayou d’Oz conclue logiquement et de manière tout à fait maîtrisée un projet très ambitieux sur la résilience et la liberté individuelle. Un diptyque inattendu qui confirme un scénariste à suivre après cet excellent diptyque.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2021/01/15/apres-lenfer-2/